Les prix de l'immobilier sont en grande partie inversement corrélés aux taux. Lorsque les taux baissent, les prix montent puisque les mensualités de crédit diminuent. Or il existe une véritable bulle sur les obligations souveraines. Les taux obligataires n’ont jamais été aussi bas en France, en Allemagne ou aux Etats-Unis alors qu’il existe une crainte réelle sur la solvabilité de la plupart des pays occidentaux. Dans des conditions normales, les taux devraient monter et faire baisser l'immobilier. Le problème est que dès que les taux montent, les banques centrales produisent de la monnaie en diminuant ainsi la valeur de l'argent et en provoquant la hausse du prix des biens tangibles quels qu’ils soient. Elle souhaitent en effet dans un contexte d’endettement majeur et de perte de compétitivité des pays occidentaux, éviter toute hausse des taux susceptible de se traduire par une récession-déflation avec destruction de l'économie. Cela me conduit à faire le pari que les dirigeants des banques centrales et les élus de tout bord, y compris en Allemagne, ne laisseront pas les taux monter en France. Que font-ils actuellement ? Ils font marcher la planche à billets pour noyer la dette à taux fixe des états dans la production de monnaie. En revanche, ils exigent un strict contrôle des budgets pour que cette dilution de la dette ne soit pas sans fin. Ce qui est tout à fait pertinent. Que fait l'immobilier dans ce contexte : il baisse modérément, mais il ne s'effondre pas car les taux ne montent pas.
La création monétaire pléthorique actuelle devrait justifier également une hausse des salaires qui ferait remonter le pouvoir d'achat immobilier. Or pour l’instant, il n’en est rien. Devant cette quasi-stagnation des revenus, beaucoup d’intervenants, donc Friggit, estiment que les prix de l'immobilier vont baisser pour normaliser le rapport prix sur revenu disponible car ils partent du postulat que les taux vont monter et les revenus stagner.
En fait, pour que les salaires montent, il faut que les indices des prix montent en proportion de la production de monnaie. On n’augmente pas de 5% les salaires lorsque l’indice progresse de 1 %. Inversement on n’augmente pas de 1% les salariés lorsque l’inflation fait monter les prix de 5% par an. Ca n’est pas tenable plus d’un an ou deux. Or l’homme pris pour modèle dans les indices des prix achète un téléphone portable et une télévision tous les mois, une voiture tous les 6 mois, mange tous les 15 jours et consacre 10 % de ses dépenses à son logement. Autant dire qu’il n’existe pas. D’autant moins qu’avec l’indice Core inflation, il ne mange pas, ne se chauffe pas, ne se déplace pas. Donc pour que les indices montent pour cet homme modèle, il faut que les produits fabriqués aujourd'hui chez les émergents et surpondérés dans les indices des prix deviennent plus chers. J’estime que ce phénomène a déjà commencé aujourd’hui. Les chinois délocalisent leur production à l’ouest de leur pays et désormais vers d’autre pays du sud est asiatique. La fourchette d’appréciation du Yuan s’est élargie. Et surtout les américains relocalisent certaines de leurs productions pour des raisons qui devraient être pérennes : hausses des salaires émergents, augmentation des coûts d’acheminement des marchandises, volonté de faire croitre la réactivité de fabrication.
Un deuxième phénomène est en train de naitre. L’orthodoxie financière apparait comme étant de plus en plus léthale pour l’économie. Les prises de positions électorales récentes des hollandais, des socialistes français et des socialistes allemands sur ces sujets sont sans équivoque. Le keynésianisme risque de faire école chez les européens qui rejoindraient en cela les américains et les anglais. Un économiste de la Bundesbank, a écrit la semaine dernière que "l'Allemagne pourrait, dans le futur, avoir un taux d'inflation plutôt supérieur à la moyenne de la zone euro". Le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble s'est par ailleurs prononcé en faveur des hausses de salaires, alors que les demandes se font de plus en plus fortes dans le pays : "il est normal que les salaires augmentent plus fortement chez nous actuellement que dans tous les autres pays de l'Union européenne". Jeudi dernier, il a ajouté que le pays pouvait se permettre une inflation comprise entre 2 et 3%". Alors que la limite défendue par les plus orthodoxes est souvent celle des 2% par an.
Autant dire que si ce phénomène se poursuit les indices des prix ne pourront plus ni dissimuler l’inflation ni rester sous 3%. Que va-t-il se passer alors ? Les revenus, les loyers et les prix à la consommation vont augmenter, les rendements immobiliers vont monter et les prix immobiliers ne vont pas s’effondrer, en tout cas dans les zones ou l’on n’a pas sur-construit en Scellier. Ces prix peuvent éventuellement continuer à baisser encore un peu mais pas nécessairement à Paris dans les premiers arrondissements et certainement pas dans les proportions avancées par certains. Ils devraient stagner ensuite puis monter en valeur faciale. Les rendements locatifs devraient quant à eux s’apprécier. Dans tous les cas, les loyers et la plus value en monnaie courante de l'immobilier préserveront plus de valeur que les obligations ou les supports euros qui sont destinés à être laminés par l’inflation. Et si vous achetez à crédit et à taux fixe, vous avez même de bonnes chances de gagner de l'argent.
Bonne semaine !