Après la chute très importante de ces derniers jours, le marché français a besoin de souffler. Je crois peu à un franchissement rapide à la baisse des 3000 points. Cette zone est un support fort pour le marché. Les cours pourraient dans un futur proche poursuivre leur reprise technique, animés par une forte volatilité. Au delà, tout va dépendre effectivement des statistiques US, les bonnes faisant grimper les indices, les autres les plombant. Quoi qu'il en soit les marchés anticipent une récession et il est possible que celle-ci ait lieu dans 6 mois. Mais comme d'habitude la bourse anticipe très en avance. La politique monétaire américaine est finalement assez lisible et j’oserais dire que la banque centrale américaine n’a pas le choix.
Essayons de nous mettre à la place du président de la FED. Seule une montée exagérée des taux longs peut le pousser à relancer la monétisation de la dette US, car dans ce cas, le coût du financement de cette dette et de l'économie des Etats-Unis deviendrait insupportable et fortement dépressif. Or la grande leçon des évènements récents est que la dégradation de la note américaine n’a pas fait pas monter les taux longs US car les marchés estiment que la dette américaine est encore tout à fait fiable et les investisseurs n’expriment aujourd’hui que la crainte d’une nouvelle récession. L’autre facteur de stabilité du compartiment obligataire américain est qu’il y a peu d’alternative au placement de la masse énorme de capitaux en circulation dans le monde. La dette européenne n’est pas d’un grand attrait à part celle des pays du nord et la dette émergente ne représente pas un volume suffisant. Le compartiment obligataire américain ne souffre donc pas et est alimenté par les liquidités issues de la vente des actions dans le mini krach que nous venons de vivre, ce qui maintient les taux longs à un niveau très bas. Ben Bernanke n'a donc pas intérêt à faire acheter les obligations US par la FED puisque celles-ci se vendent bien et que la portion longue des taux est à la baisse. Par ailleurs plus les taux longs sont bas, plus la prime de risque des actions est haute, maintenant ainsi un équilibre entre les actifs. Sous la pression des républicains et dans ce contexte d’équilibre des taux, le patron de la banque centrale américaine pourrait donc laisser la récession se développer un peu sans stimuli car après tout, les baisses d’activité font partie de la vie des pays dont l’économie est faiblement administrée. C’est une des contreparties du surplus de croissance des pays très libéraux et les américains y sont habitués. Cela aurait pour intérêt de laisser courir un peu de destruction créatrice telle que la décrivait Schumpeter pour repartir sur des bases économiques plus solides après une déferlante Keynésienne fort justement destinée à enrayer la crise déflationniste du défaut de paiement des subprimes. Le maintien de taux courts très bas suffirait à alimenter le crédit et l’injection au coup par coup de liquidités dans le système bancaire pourrait intervenir en cas de difficultés comme celles que risque de connaitre Bank of America prochainement. Les créanciers de l’Amérique seraient heureux et rassurés de constater que la FED cesse d’élargir son bilan. Voilà quelle stratégie nous aurions envie d’adopter à la place de Ben Bernanke et c’est celle qu’il semble programmer.
Les indices pourraient donc poursuivre leur baisse encore plus bas pour toucher des niveaux que nous avons malgré tout déjà connus, pour remonter ensuite. Je reste convaincu que les émergents continueront de soutenir la croissance mondiale et de faire évoluer les prix vers le haut du fait, entre autres, des sous-capacités de production dans le domaine des matières premières. Nous avons, sur le plan boursier, une stratégie claire d’accumulation à la baisse sur les matières premières, les actions émergentes et les actions à fort rendement pérenne.
Bien sur, la FED peut décider de nouveaux stimuli monétaires, mais elle devra les justifier auprès de ses créanciers par des anticipations de récession profonde et une baisse majeure des cours de bourses. Ce n'est actuellement pas le cas et cela ne change en rien notre stratégie d'accumulation vers les niveaux fixés.
L’avenir à plus long terme, qui est celui qui nous intéresse le plus sur Futures, est dépendant des décisions politiques.
La récession va tirer les taux longs vers le bas, certes. Mais s’il elle est suffisamment profonde, la baisse de l’activité peut faire diminuer fortement les recettes fiscales si les taux de prélèvement des gens aisés ne montent pas et peut ainsi aggraver le déficit budgétaire en augmentant encore l’endettement des Etats-Unis. Ce qui serait l’occasion pour les agences de rating de dégrader à nouveau la note du pays. Ce nouvel abaissement pourrait diminuer la clémence des investisseurs obligataires envers la dette américaine et occasionner une nouvelle fuite vers les biens tangibles avec une montée des matières premières. Les taux longs finiraient par monter et la FED serait obligée de reprendre la monétisation de sa dette aggravant la fuite devant la monnaie. L’inconnue est désormais la tolérance des investisseurs obligataires au développement de l’insolvabilité américaine. L’impression que l’on a après la dégradation de la note US est qu’elle forte et surtout qu’une aversion pour la dette américaine ne pourra se manifester que lorsque les bourses domestiques chinoises se seront ouvertes au monde, que le yuan aura intégré le système de change flottant et qu’il se sera réévalué, constituant ainsi une véritable alternative pour le placement des capitaux. D’ici là de l’eau aura coulé sous les ponts, le prix des matières premières sera plus élevé et il est difficile de dire à quel niveau sera la dette américaine. Cela dépendra des décisions politiques qui seront prises aux Etats Unis en particulier au niveau fiscal. D’ici là, la montée des salaires émergents, la modification des parités de change avec eux aura poussé les prix de production à la hausse et peut-être permis le début d'une relocalisation de certaines industries en occident, alimentant ainsi la croissance.
Je le redis : la cause racine de la crise est la sous-évaluation chronique de la monnaie chinoise et les délocalisations industrielles massives qui en ont découlé. Si cette distorsion paritaire diminue, le différentiel de croissance entre les pays mûrs et les pays dits émergents se restreindra. L’inflation baissera chez les émergents et grimpera dans les pays occidentaux qui n’ont plus de réelles capacité de production, facilitant ainsi le règlement du problème de la dette. En contrepartie les émergents pourront acheter leurs matières premières beaucoup moins cher.
Tout le problème actuel est que selon moi, la Chine n’a pas réglé l’addition de la croissance insolente dont elle bénéficie depuis 15 ans. Elle la paiera par une baisse de sa croissance et une dévalorisation de ses réserves de change, sinon le monde restera très déséquilibré sur le plan économique.
L’évolution des marchés à long terme dépend donc beaucoup des décisions politiques sur la fiscalité américaines et sur les parités monétaires chinoises.
A quelles échéances seront prises ces décisions ? ...
Reste l’évolution de l’Europe ! Elle est tellement faible politiquement qu’elle parait incapable d’influencer l’économie mondiale. Le mieux que je puisse lui souhaiter, c’est une véritable gouvernance économique européenne conduite par les allemands. Mais bien sûr, cela n’engage que moi.
Bonne semaine !
Son Blog : http://futures.over-blog.com/