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Michel Delobel

Michel Delobel

Gestionnaire de portefeuille sous mandat via une société de gestion agréée, trader pour compte propre et formateur au trading et à l'investissement en bourse, je suis aussi fondateur du site Fenêtre sur Cours et de la société ACGest, via laquelle j'accompagne également mes clients dans la constitution et le développement de leur patrimoine, la préparation de leur retraite ou encore l'optimisation de leur fiscalité.

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Suppression de l’abattement sur les moins-values : comment le fisc nous reprend d’un côté ce qui nous « donne » de l’autre ?

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Il y a 3 ans est apparu l’abattement pour durée de détention sur les valeurs mobilières. Le principe était simple : au-delà de 2 ans de détention, vos plus-values boursières bénéficiaient d’un abattement de 50%  (et de 65% au-delà de 8 ans de détention). L’idée était plutôt louable : favoriser l’actionnariat de « long terme » par rapport aux spéculateurs de court terme et autres traders, même s’il s’agissait surtout de faire un peu passer la pilule de l’augmentation globale de la taxation sur les plus-values de valeurs mobilières.

Le problème, c’est que les moins-values étaient aussi concernées. Résultat, en soldant une position en perte au-delà de 2 ans de détention, la moins-value dégagée se voyait aussi réduite de moitié d’un point de vue fiscal ! Une aberration, totalement contraire au principe de déductibilité des moins-values et de report pendant 10 ans.

J’avais d’ailleurs évoqué le sujet dans un article publié l’année dernière (que je vous invite d’ailleurs à relire ). Après plusieurs actions de la part d’associations de défense des actionnaires individuels, le législateur est finalement revenu sur cette aberration, en supprimant l’abattement dans le cas des moins-values.

Un cadeau aux actionnaires individuels ? Je parlerais déjà plutôt d’un juste retour des choses plutôt que d’un cadeau. Mais le fisc s’est malgré tout habilement débrouillé pour reprendre d’un côté ce qu’il donnait de l’autre. Comment ? En changeant tout simplement la façon de comptabiliser les moins-values reportées d’une année sur l’autre.

Depuis l’éclatement de la bulle internet et depuis la crise des subprimes (générateurs de fortes moins-values chez certains), et avec l’envolée de la fiscalité sur les plus-values boursières pour les détenteurs de comptes titres, le fisc avait en effet mis en place un formulaire (le 2041-SP)  permettant de reporter les moins-values pendant 10 ans.

Ainsi, un investisseur ayant réalisé 10.000 euros de moins-values en 2008, une plus-value de 6.000 euros en 2009 et une plus-value de 8.000 euros en 2010 ne se voyait pas taxé en 2009, et n’était taxé que sur 4000 en 2010 (8.000 – (10.000 – 6.000)).

Mais surprise cette année ! Plus de formulaire 2041-SP, mais un nouveau formulaire, le 2074 (2074-CMV pour sa version simplifiée et la partie qui nous concerne). Le but de ce formulaire ? Intégrer les abattements pour durée de détention.

Mais là où le bât blesse, c’est que l’abattement n’est pris en compte qu’après déduction des moins-values antérieures ! Une aberration et une injustice, qui revient à traiter différemment deux investisseurs ayant réalisé les mêmes plus-values sur des titres détenus lus de 2 ans, sous prétexte que l’un aurait des moins-values antérieures !

Démonstration : imaginons que Mr Martin et Mr Dupont, grâce au bon travail de leur gérant Michel Delobel (toute coïncidence avec un gérant effectivement nommé Delobel est purement volontaire J ), ont tous deux réalisé des plus-values de 10.000 euros en 2015, éligibles à l’abattement de 50%.

Mais Mr Martin, dont le compte était précédemment géré par sa banque ( !), avait réalisé en 2014 une moins-value de 5.000 euros, alors que Mr Dupont était lui en plus-value. Que se passe-t-il d’un point de vue fiscal pour l’un et l’autre ?

Mr Dupont va tout simplement déclarer 5.000 euros de plus-values, du fait de l’abattement de 50% pour durée de détention. Il ne paiera donc des impôts que sur 5.000 euros.

De son côté, on aurait pu penser que Mr Martin procède de la même façon : 5.000 euros de plus-values, compensées toutefois par ses 5.000 euros de moins-values de l’année précédente. Mais le formulaire 2074-CMV ne présente pas les choses de cette façon. Les moins-values antérieures sont en effet imputées AVANT la prise en compte de l’abattement.

Ainsi, Mr Martin commence par retirer ses 5.000 euros de moins-values de 2014 à ses 10.000 euros de plus-values de 2015, puis applique ensuite l’abattement de 50% sur les 5.000 euros de plus-values restantes.

Là où Mr Dupont fait donc une économie d’impôts sur 5.000 euros de plus-values, Mr Martin ne fait lui une économie d’impôts que sur 2.500 euros de plus-values, ayant perdu le bénéfice de l’abattement sur les 5.000 premiers euros du fait de sa moins-value précédente. Une double peine en quelque sorte. Formidable non ? Une raison de plus en tout cas pour laisser tomber le compte titre et passer sur PEA.
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