On vous parle beaucoup des différents traités internationaux en cours de négociation actuellement dans le monde et cela de façon généralement opaque.
On pense notamment au plus célèbre d’entres eux, et celui qui nous concerne le plus directement, le TAFTA plus connu sous le vocable « traité transatlantique » entre l’Europe et les Etats-Unis (mais il y aussi les TTIP, PTCI…).
On oublie néanmoins un autre projet qui va s’annoncer particulièrement délétère aussi bien sur l’emploi en Europe (en particulier industriel) mais aussi sur le respect des normes de sécurité ou d’hygiène.
Je vous propose donc pour bien démarrer cette nouvelle semaine un « dossier spécial » destiné à alimenter nos réflexions sur ces sujets. Il se compose de cet édito, d’une interview audio que j’ai donnée à la radio Sputnik sur cette thématique et de deux articles.
En effet il s’agit dès 2016 d’accorder à la Chine le statut « d’économie de marché ».
« Selon une étude du think-tank américain Economic Policy Institute (EPI), l’afflux de produits chinois en Europe pourrait augmenter de 25-50% en 2016 grâce à son nouveau statut économique. Les Européens n’auront plus de mécanisme de réduction des importations chinoises qu’ils utilisent contre la Chine dans son statut actuel, explique l’EPI ».L’information importante à retenir donc est qu’à partir du moment où ce statut d’économie de marché est accordé à la Chine il n’y aura plus aucun mécanisme légal de réduction des importations chinoises.
Logiquement, alors qu’il subsiste encore quelques barrières et qu’en particulier l’Europe peut lancer des enquêtes anti-dumping par exemple, cela ne serait plus possible et ouvrirait grand la voie à une augmentation significative des importations chinoises en Europe.
Logiquement toujours, si on importe plus de Chine, on fabriquera moins en Europe d’où la prévision de nouvelles fermetures d’usines et d’une augmentation du chômage que l’obtention d’un tel statut entraînerait.
Des conséquences en terme d’emplois très difficiles à chiffrer
Il est parfaitement illusoire de croire que les modèles économiques sont en mesure de prévoir avec précision les pertes d’emplois qui seraient induites. Tout cela relève beaucoup plus de la « cuisine » statistique que de la science exacte. On vous prétendra évidemment le contraire, tout comme on vous dira d’ailleurs qu’octroyer un tél statut à la Chine permettra sans doute de « relancer la croissance » ou de « créer encore plus de richesses »… c’est en réalité vrai, mais cette croissance ou cette création de richesse ne sera pas pour vous. Elle sera uniquement, exclusivement réservée aux grandes multinationales.Là encore, il ne faut pas s’y tromper, il ne s’agit ni d’enrichir les petits Chinois, ni de faire plaisir aux petits Européens, non l’idée c’est comme toujours de développer le chiffre d’affaires de ceux qui sont implantés dans toutes les zones économiques, c’est de permettre de produire à bas coûts et de revendre bien plus cher.
Il n’y aura donc pour les populations aucun gain spécifique, ce qui est d’ailleurs le cas pour le phénomène de la mondialisation au sens large.
Une clause « d’économie de marché » est structurellement déflationniste!
L’hypocrisie des autorités monétaires et économiques mondiales atteint tout de même des sommets. Vous entendez les grands gouverneurs des grandes banques centrales de la planète répéter à l’envie qu’il faut « lutter contre la déflation » alors que dans le même temps ils mettent en place consciemment les conditions même de la déflation et ces conditions portent en partie le nom de mondialisation.
Explication rapide…
Si vous fermez des usines ici avec des emplois « chers » et des salaires élevés pour les remplacer par des Chinois low-cost, vous aviez avant un consommateur solvable pour 1 000 euros par mois, remplacé par un petit gars au salaire de 100 euros par mois. Certes le coût de production baisse, mais le « pouvoir d’achat » disponible aussi… vous enclenchez une spirale déflationniste.Cette spirale qui a démarré à la chute du mur de Berlin et avec l’effondrement du communisme, qui par définition empêchait toute mondialisation puisque la moitié du monde ne parlait pas à l’autre, est restée invisible pendant des années par qu’il fallait atteindre certains effets dits de seuils! Aujourd’hui les seuils sont atteints, le chômage est devenu massif et endémique en occident et ce n’est pas les petits Chinois et leurs salaires bas qui prennent le relais de la consommation.
Avec un tel taux de chômage les salaires n’arrivent plus à progresser, dans certains pays comme l’Espagne, l’Italie, ou encore évidemment la Grèce, les salaires chutent même de manière drastique.
Si les autorités monétaires veulent lutter contre la déflation c’est en luttant contre les facteurs déflationnistes eux-même qu’elles réussiront. Cela implique de lutter contre la mondialisation avec son ajustement des salaires par le bas.
Comprenez-moi bien, ce n’est pas la mondialisation qui est en cause c’est l’ajustement vers le bas le problème !
Dans un monde intelligent qui ne serait pas dirigé par l’appât du gain à court terme (donc pas capitaliste), nous aurions procédé à une mondialisation avec un ajustement par le haut. Nous aurions conditionné l’ouverture de nos frontières à la mise en place de salaires identiques, de minima sociaux et d’une véritable protection sociale. Dans un tel contexte économique nous aurions déclenché un cycle inflationniste vertueux.Les grandes multinationales, les lobby et autres groupes de pression ont voulu évidemment plus de profits, tout de suite ce qui est leur logique même d’existence.
Hélas, contrairement à ce que l’on veut croire la somme des intérêts individuels n’est pas forcément égal à l’intérêt collectif. En clair la volonté de profits à court terme vient casser la possibilité de faire du profit à long terme par la création de la plus grande déflation de tous les temps. Une déflation mondiale liée à la mise en place d’une mondialisation ratée.
Enfin des dettes élevées dans une économie déflationniste, ne peuvent que conduire à une insolvabilité généralisée.
Alors, en attendant, préparez-vous, il est déjà trop tard !
Charles SANNAT
Pas de mondialisation réussie sans la Chine, l’Inde et la Russie
L’attribution éventuelle du statut d’économie de marché à la Chine en 2016 aurait des conséquences néfastes pour l’Europe, affirme le think tank américain Economic Policy Institute (EPI). Pourtant, la mondialisation économique est impossible sans la Chine, l’Inde et la Russie, affirme Charles Sannat, économiste français.
Selon l’Economic Policy Institute, l’attribution du statut d’économie de marché à la Chine dans le cadre de l’OMC provoquera une chute de la production en Europe, l’augmentation de l’afflux de produits chinois à prix plus bas de 25-50% et une hausse du chômage d’ici 2020.
Pourtant, d’après Charles Sannat, économiste français et fondateur du site insolentiae.com, le monde fait face à une véritable volonté de mondialiser l’économie au maximum.
« Vous ne pouvez pas avoir de mondialisation réussie tant que vous n’aurez pas une intégration totale de la Chine, de l’Inde et même de la Russie dans l’économie mondiale », souligne l’économiste dans son entretien pour Sputnik.M. Sannat estime que le monde représente le terrain de jeu des grandes multinationales, qui ont une puissance de frappe colossale par rapport à des Etats de petites tailles.
Il souligne qu’il ne s’agira pas d’une destruction massive d’emplois en Europe, et notamment en France, car le taux de chômage est déjà très élevé. Dans l’hexagone, on s’attend à une suppression de 360.000 emplois par rapport à la population active qui est de 24 millions de personnes.L’économiste français explique le taux élevé du chômage en France, qui « ne peut structurellement pas baisser en France comme ailleurs en occident » par « des pressions extrêmement fortes des pays low-cost ».
M. Sannat voit deux solutions pour remédier à ce problème. Soit les prix des produits fabriqués en Chine sont alignés sur les prix des produits européens, soit, à l’inverse, les produits européens concurrencent les produits chinois au niveau des prix. D’ailleurs, la première solution est bien entendu la plus souhaitable car dans ce cas cela serait un mécanisme inflationniste pour l’économie. Alors que la spirale déflationniste est le lot actuel de la Grèce et de l’Espagne.
C’est également dans la puissante économie qu’est l’Allemagne, que « les mini-jobs à 1 euro de l’heure » sont proposés. « Aucun problème pour travailler à 1 euro de l’heure à condition que le prix de mon loyer soit de 10 euros par mois ».Selon Charles Sannat, le problème de la mondialisation telle qu’elle est menée aujourd’hui est qu’elle est « profondément déflationniste » et ne peut donc « mener les pays européens que vers l’insolvabilité générale ».
La Chine économie de marché: les conséquences pour l’Europe et les USA
Selon des chercheurs américains, l’attribution éventuelle du statut d’économie de marché à la Chine en 2016 menace l’économie européenne. 3,5 millions de chômeurs supplémentaires, ainsi que des économies française, allemande, italienne et britannique largement impactées, pourraient être une conséquence directe.
Est-ce une menace réelle où une fausse alerte? Le nouveau statut de la Chine est-il si épouvantable que ce que le voient les chercheurs américains? Des experts apportent des réponses à ces questions pour Sputnik.L’impact chinois sur l’économie européenne, d’après les experts américains
Selon une étude du think-tank américain Economic Policy Institute (EPI), l’afflux de produits chinois en Europe pourrait augmenter de 25-50% en 2016 grâce à son nouveau statut économique. Les européens n’auront plus de mécanisme de réduction des importations chinoises qu’ils utilisent contre la Chine dans son statut actuel, explique l’EPI.
L’expansion chinoise impactera d’abord les producteurs de textile, de vêtements, d’appareils informatiques et optiques ainsi que d’autres branches de production. Suite à cela, plus de 3,5 millions de salariés perdront leur travail entre 2017 et 2020. La France, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni seront les pays dont les économies seront les plus impactées, estiment les experts de l’EPI.
« Une volonté des Etats-Unis d’affaiblir l’économie européenne »
Grafian Cinak, expert du Centre d’analyse géopolitique polonais, estime que cette recherche traduit la volonté des Etats-Unis d’affaiblir l’économie européenne. Actuellement, l’Union européenne est un compétiteur majeur des Etats-Unis et c’est pour cela qu’ils sont intéressés par un affaiblissement de l’économie européenne: Washington se rend compte que la coopération sino-européenne serait avantageuse pour les deux pays, estime M. Cinak.Dans le même temps, les Etats-Unis sont « stratégiquement intéressés par un affaiblissement du potentiel d’exportation chinois, d’où les efforts pour semer la peur et le doute envers tout ce qui est chinois », poursuit l’expert polonais interrogé par Sputnik. Les Etats-Unis se servent du nouveau statut éventuel de la Chine aux mêmes fins. Mais plusieurs pays européens ont déjà reconnu la Chine comme une économie de marché, estime-t-il.
M. Cinak fait remarquer que le scénario des relations sino-européennes dépend de la politique qui sera choisie par l’UE envers à la Chine. Si Washington et Bruxelles signent l’accord sur le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, il faut s’attendre à une résistance européenne à l’expansion chinoise. Mais si les Vingt-Huit choisissent une politique économique indépendante, ils seront plus loyaux envers la Chine et se rendront compte que les marchés orientaux constituent une possibilité de développement de l’économie européenne, plongée actuellement dans une crise.
Les Etats-Unis « aiment faire peur à l’Europe »
Vladimir Bačišin, économiste slovaque et professeur de l’institut Paneuropéen à Bratislava, estime pour sa part que les experts américains « aiment faire peur à l’Europe ». « Pourquoi? Mais parce que l’afflux de produits bon marché impactera probablement les Etats-Unis eux-mêmes. C’est une première chose. Deuxièmement, avec le changement de statut de l’économie chinoise les innovations de la Silicon valley pourraient se retrouver dans l’Empire du Milieu… Et cela impacterait gravement les Etats-Unis », lance l’expert.Le chercheur de l’Institut de l’économie et de la politique mondiale chinois Xiao Licheng considère que les experts américains ne cherchent pas à faire peur aux européens et que les résultats de cette recherche ne sont que leur propre opinion. Dans le même temps, M. Licheng appelle à constater si leurs conclusions correspondent à la réalité. « La Chine et l’Europe sont étroitement liées au niveau commercial. Dans ce contexte, l’opinion des experts américains en question n’a pas de légitimité », estime-t-il.
Source Sptunik ici
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