Bon, vous savez que nous faisons face à la novlangue orwellienne tous les jours. Ce n’est pas un phénomène nouveau. À titre personnel et n’ayant que 38 ans, la première fois que j’ai été confronté à ce système de communication, c’était en 1986. Oui, l’année de Tchernobyl. Jusqu’à cette date-là, tous les dimanches nous allions aux champignons ! J’adorais ces moments d’aventures en forêt et en famille. Mais comme le nuage radioactif s’était arrêté à la frontière, mon papa avait traduit naturellement qu’il nous avait donc bien aspergé. Et sachant que les champignons concentrent les radioéléments, les balades en forêt furent supprimées pour mon plus grand malheur.
« Lorsque les mots perdent leur sens, les gens perdent leur liberté. »
Cette citation me semble-t-il est de Confucius. Le sens des mots est essentiel. Or ces derniers temps, les mots perdent leur sens. Ce glissement sémantique est gravissime. C’est grâce à lui que dans 1984, qui est un véritable chef-d’œuvre, le ministère de la Guerre devient le ministère de la Paix. Que le ministère de l’Intérieur devient celui de l’Amour. Oui mes chers contrariens, bientôt on nous expliquera que la torture est un acte d’amour. Pourquoi pas ! Et il faudra sans doute applaudir et dire oui bien sûr… Sinon on nous taxera d’anti-patriote, ou encore de complotiste.Oui les mots ont un sens, enfin ils en avaient un… Plus maintenant.
Par exemple, notre Président nous dit qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôts… Ce qui veut dire que vos zimpôts vont augmenter. D’ailleurs, les droits de mutation lorsque l’on achète un bien immobilier viennent d’augmenter de 2 % (un peu moins mais en gros)… 2 % de 100 000 euros cela commence à faire un peu de sous… Mais ce n’est pas un impôt, c’est un droit de mutation, rien à voir voyons.
Les mots ont un sens disais-je…
Par exemple l’histoire de Brétigny ! C’est un mystère ferroviaire au-delà du réel. Il a fallu quelques heures pour connaître la raison de l’accident. Une éclisse fixée par 4 boulons. Or les quatre boulons sont partis tout seuls.
Certaines mauvaises langues du coup expliquent que lorsque l’on vous dit que les boulons sont partis par « une opération du Saint-Esprit, il faut comprendre qu’un esprit pas sain du tout à fait partir les boulons »… Ce qui donne, dans la bouche de notre Président, qu’à ce stade, il ne peut pas privilégier l’acte de malveillance… Bien sûr que non mes amis, les mots ont un sens et les mots peuvent désigner des maux que l’on ne saurait voir.
Vous remarquerez donc l’absence totale désormais d’information sur la catastrophe de Brétigny. Cette absence d’information est l’information. Comme les mots ont un sens, parfois, il vaut mieux ne plus rien dire. Attendre un peu que l’émotion retombe. Attendre le 15 août que nous soyons tous à la plage pour dire que finalement les boulons ont été déboulonnés. On sera au soleil en train de faire bronzette, en septembre on aura tout oublié, et puis on trouvera bien un sujet pour faire diversion.
Les mots ont un sens disais-je mais leur sens est désormais inversé. C’est incroyable. Mais c’est vrai, tous les jours sous nos yeux. En politique bien sûr, et évidemment en économie.
La reprise de l’emploi aux USA !
L’emploi repart aux USA, c’est la reprise, c’est génial, ils sont trop forts nos grands zamis les Zaméricains qui nous zécoutent pour nous protéger de nous-mêmes (béni soit les Zaméricains et leur Président, je ne tiens pas à me faire embastiller au ministère de l’Amour de Washington vu que ma femme me tanne depuis cinq ans pour aller là-bas, pour le moment je résiste et je lui ai vendu un tour de camping-car en Espagne ouf.)Voilà, tout va bien, Ben Bernanke, le mamamouchi en chef, va pouvoir arrêter d’imprimer de la fausse monnaie, le dollar va redevenir fort et tout le tintouin…
Mais de temps en temps, il y a des bugs dans la machine (pour ne pas dire la matrice, terme forcément à connotation complo-déclino-pessimisto-fin-
C’est donc un article de Wall Street Journal du 14 juillet qui nous apprend qu’en fait, et pour faire court, il n’y a aucune reprise de l’emploi aux USA. C’est juste qu’en fait Obama a lancé une nouvelle loi pour donner aux gens une couverture médicale surnommée « obamacare ». Elle va devenir obligatoire en 2014, c’est-à-dire demain.
Or cette loi oblige les employeurs de 50 salariés en équivalent temps plein ou plus de proposer une assurance santé pour les salariés qui travaillent plus de 30 heures par semaine et cela va avoir un coût pour les employeurs, or les employeurs n’aiment pas payer plus, surtout aux USA où ils ont une sainte horreur de tout ce qui ressemble à un nouvel impôt imposé par l’État fédéral.
Plus de 30 heures…. Voilà la faille ! Résultat, les patrons US licencient massivement les CDI à temps plein de plus de 30 heures pour tout remplacer par des temps partiels… Logique. Le gouvernement fait une loi et le peuple s’adapte. Un peu comme nous en France avec les services à la personne. Les taxes augmentent ? Pas de problème, on repasse au travail au noir… comme avant !
Notre camarade Philippe Béchade en a très bien parlé aujourd’hui sur BFM (vidéo en podcast sur le site du Contrarien) et c’est bien le seul à aborder ce sujet avec courage (un peu Delamarche également).
Résultat : tout le monde est ébahi par la reprise américaine, par les relocalisations aux États-Unis car grâce aux gaz de schiste l’énergie est pas cher, et par les créations d’emplois.
Sauf que tout cela n’est qu’un mirage de la novlangue, la réalité est tout autre. En Union Soviétique (je m’en souviens même si j’étais gosse), tous les ans on avait les chiffres de production de blé, de chaussures, de voitures, etc. qui étaient systématiquement en forte progression. Tout le monde était content sauf le peuple qui n’avait pas de bagnole pour rouler, pas de godasses pour marcher et pas de blé pour bouffer. Mais les statistiques étaient bonnes… Les mots ont un sens disais-je. Nous en sommes arrivés exactement au même point. La démocratie sémantique n’est plus qu’un vieux souvenir.
Il n’y a donc pas de reprise aux USA. Il y a peu, très peu de relocalisation malgré le prix de l’énergie (par contre il y a de forts dégâts environnementaux et ils seront durables) et bien entendu, il n’y a pas de création d’emplois. Plus grave, c’est à une destruction des « bons » emplois à laquelle nous assistons, maquillée en « reprise économique ». Finalement, les mots n’ont plus de sens mais les maux persistent et s’aggravent.
Ben Bernanke a parlé (encore)
Aujourd’hui, le bug dans la matrice, c’est lui ! Au moins c’est officiel, et cela aura plus de poids que mes petites analyses de comptoir entre amis. Voici l’essentiel de son intervention. Pour le reste, je vous renvoie au lien ci-dessous où vous aurez la totalité de la dépêche.« Le président de la Banque centrale américaine, Ben Bernanke, a réaffirmé mercredi à Washington que l’état de l’économie américaine, et surtout de l’emploi, justifiait encore une politique monétaire très accommodante, soulignant ne pas avoir de « parcours prédéterminé » pour réduire son soutien à l’économie.
« Parce que nos rachats d’actifs dépendent de l’évolution de l’économie, ils ne sont pas sur un parcours prédéterminé », a déclaré M. Bernanke lors de son témoignage bi-annuel sur la politique monétaire du pays devant une commission du Congrès.
« Si les conditions économiques s’améliorent plus rapidement que prévu et que l’inflation apparaît faire un retour décisif vers notre objectif (de 2 %), le rythme des achats pourrait être réduit plus rapidement », a-t-il expliqué.
« Mais si les perspectives de l’emploi devaient se montrer moins favorables (…), le rythme actuel des achats pourrait être maintenu plus longtemps », voire « être accéléré pour un moment », a-t-il indiqué devant la Commission des services financiers de la Chambre des représentants.
Voilà mes chers contrariens où je voulais en venir, je ne sais pas si vous avez bien compris (humour) mais les mots ont un sens. Lorsque l’on vous annonce que la création monétaire va cesser car tout va mieux que bien, il faut comprendre que comme tout est plus pire qu’avant, on va l’augmenter d’un poil… mais comme les marchés doutaient, il a dû être beaucoup plus clair…
Je vous dis depuis le début de l’année que Ben n’arrêtera jamais la planche à billets, qu’il ne le peut pas, mais le faire croire lui a certainement permis à lui et à d’autres d’acheter de l’or pour pas cher. CQFD !
Charles SANNAT
Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Le Contrarien Matin est un quotidien de décryptage sans concession de l’actualité économique édité par la société AuCOFFRE.com. Article écrit par Charles SANNAT, directeur des études économiques. Merci de visiter notre site. Vous pouvez vous abonner gratuitement www.lecontrarien.com.
Lire l’article sur les derniers propos de Ben Bernanke grand mamamouchi de la planche à billetsArticle du Wall Street Journal sur les fausses créations d’emplois aux USA