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Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

Charles-Sannat

« Et si cette fois il n’y avait pas d’accord ? »

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Nombre de commentaires : 3 réactions
Mes chères contrariées, mes chers contrariens !

Eh oui mes amis, voici encore sous vos yeux une aberration intellectuelle majeure de la part de nos « zinvestisseurs » financiers qui sont censés, selon la doxa libérale, être omniscients et capables d’assurer la juste formation des prix…
Face à l’afflux de bonnes nouvelles de ces derniers jours, c’est vrai qu’il y a de quoi être réjoui et de propulser les cours des actions vers des sommets, et celui de l’or… vers les sous-sols ! Avant de parler de tout ça, revenons quand même sur ce « shutdown » américain qui annonce une bataille politique féroce entre républicains et démocrates sur le budget évidemment mais également, dans les 15 jours qui viennent, sur le relèvement du plafond de la dette et là… c’est sacrément plus grave en tout cas potentiellement.

États-Unis: premier jour de paralysie pour l’État fédéral

Comme nous l’apprend l’AFP, « des centaines de milliers de fonctionnaires américains ont été forcés mardi d’entamer des congés sans solde pour une période indéterminée, faute d’accord budgétaire au Congrès, une mesure draconienne qui épargne toutefois les fonctions essentielles dont la sécurité. »

« La fermeture de l’État fédéral ne devrait toutefois avoir qu’un impact limité sur la première économie mondiale, contrairement à celui qu’aurait une impasse persistante sur le relèvement du plafond de la dette. Celui-ci doit faire l’objet d’un accord d’ici au 17 octobre, faute de quoi les États-Unis ne pourront plus faire face à toutes leurs obligations financières. »
J’apporterais tout de même un gros bémol car si le blocage devait durer, cela pourrait coûter jusqu’à un point de croissance du PIB, ce qui n’est pas rien… même pour l’économie mondiale très fragile.

« Du département de la Défense à l’agence de protection de l’environnement, tous les services fédéraux sont sommés de réduire immédiatement leurs effectifs au minimum vital, parfois à seulement 5 % de leur personnel. La Maison Blanche va fonctionner avec 25 % de son équipe… »

Eh oui, certains services vont devoir tourner avec seulement 5 % de leurs agents, ce qui fait très peu. En gros, il ne restera plus que les grands chefs.

Justement, à propos de services fédéraux réduits, il y en a qui vont être drôlement contents. Je suis tombé sur cet article fort pertinent de BusinessWeek expliquant que cela était un moment rêvé pour… frauder car les contrôleurs ne sont plus là pour contrôler.

« Moment de Madoff » général et fraude globale

Voici mon résumé et ma traduction de cet article dont vous avez le lien source ci-dessous.

Les milliers de personnes qui surveillent les marchés financiers américains sont désormais en congé sans solde

Il y a quelques jours, Bart Chilton, le directeur de la Commodity Futures Trading Commission US (CFTC), a indiqué que l’arrêt pourrait avoir des «conséquences désastreuses» pour les consommateurs et que certains « se lèchent les babines » à l’idée d’absence totale de contrôle puisqu’il ne restera plus que 30 personnes sur 650 en temps normal.

Du côté de la SEC, la « Securities and Exchange Commission », sur près de 4 000 employés seuls 252 personnes resteront pour « superviser » les activités de marché.

Cela impactera également directement les IPO, c’est-à-dire les introductions en Bourse, dans la mesure où il n’y aura plus personne pour instruire les dossiers… donc plus d’agrément, donc plus d’introduction !

Il est donc envisageable de se demander si l’arrêt de l’État fédéral n’est pas pour réjouir certains, notamment dans le monde de la finance. Or on connaît bien en particulier la proximité et les liens consanguins entre pouvoir politique et pouvoir bancaire.

Pourquoi cette fois-ci il pourrait ne pas y avoir d’accord !

Venons-en maintenant à ce qui me semble la véritable question essentielle de toute cette histoire, à savoir peut-on avoir la même situation dans 15 jours lors du débat sur le relèvement du plafond de la dette qui aboutirait dans ce cas à une cessation de paiement partielle des États-Unis ?

Je pense que la réponse est oui. Oui c’est possible et je vais tenter ici de vous dire pourquoi même si à l’heure où j’écris ces lignes les marchés sont en hausse, n’imaginant absolument pas que le pire puisse se produire.

Tout d’abord, les Américains sont des pragmatiques et… des tricheurs ! Et ces deux éléments de « caractère » sont importants pour la suite.

Quelle est la situation financière des USA ? En gros : dramatique. Surendettement à tous les niveaux, absence de croissance économique, désindustrialisation, et création monétaire importante de la part de la FED… avec peu de résultats.

Il y a deux façons de voir les choses. Soit on tente par tous les moyens de faire durer aussi longtemps que possible ce système complètement moisi ou alors, en bon pragmatique, on prend ses pertes et on se coupe un bras avant de mourir de gangrène. En clair, on préfère un défaut partiel et ordonné à une faillite retentissante et subie.

Ensuite politiquement, quoi que l’on en dise, ce sont les démocrates qui sont aux affaires actuellement. Quel serait l’intérêt politique des républicains d’attendre éventuellement de retrouver le pouvoir… pour devoir eux gérer la faillite et les conséquences de huit années de gestion démocrates ? Je ne dis pas que les républicains auraient fait une autre politique s’ils avaient été au pouvoir, et la crise a commencé en fin de mandat de G. Bush. Simplement, aujourd’hui, le contexte politique américain a considérablement évolué et de nombreux autres éléments peuvent être favorables à une faillite.

Combattre le leadership chinois devient une idée fixe américaine. Mieux qu’une guerre… l’arme économique. Imaginez que les USA soient en défaut de paiement partiel sur leur dette. Ce sont les Chinois qui sont les principaux détenteurs de bons du Trésor US. Donc c’est eux qui perdront des sommes considérables. Les USA sont également leurs principaux clients et la Chine reste avant tout une économie basée sur les exportations. Une faillite contrôlée US ferait inévitablement dérailler la Chine qui aurait beaucoup à perdre tout en sachant que les USA ne seront sans doute plus jamais capables de retrouver dans l’économie actuelle des taux de croissance suffisants pour financer leur endettement.

Tout cela Ben Bernanke devait le savoir parfaitement dans la mesure où il a surpris tout le monde (sauf nous, les contrariens) en annonçant que finalement il allait poursuivre ses QE… C’était il y a 10 jours. Une éternité et pourtant… c’était aussi un indice fort de ce qui se passe actuellement et pourrait préfigurer ce qui va se passer dans 15 jours. Vous remarquerez d’ailleurs que plus personne ne parle du successeur de Ben Bernanke… comme si ce problème-là n’existait plus… effectivement. Peut-être que dans 15 jours ce ne sera plus une question du tout tant la situation sera devenue catastrophique.

De plus, il se pose le sujet idéologique d’un parti républicain pris en otage par sa frange la plus droitière incarnée par le Tea Party dont une bonne partie ne rêve que de casser l’État fédéral, de supprimer tout impôt ou presque et d’en arriver à l’État le plus minimal possible.

Enfin, il ne faudra, pour aucun des deux protagonistes, perdre la face publiquement. En ayant choisi le blocage pour le budget 2014, les républicains se sont mis dans une situation où il leur sera extrêmement difficile de revenir en arrière et dans 15 jours voter un relèvement du plafond de la dette sans sourciller, et c’est une différence majeure avec ce qu’il s’est passé les fois précédentes et pourtant particulièrement peu relevée les « zobservateurs ».

Le mois d’octobre pourrait donc s’annoncer particulièrement difficile à passer et l’on doit envisager désormais le fait que l’on pourrait ne pas passer le mois d’octobre.

Le cours de l’or plonge, la demande de l’Inde en berne

En attendant, l’or et les métaux précieux subissent une nouvelle attaque de grande ampleur aujourd’hui avec une baisse de plus de 3 %.
Selon un article de Capital, la raison c’est que les achats d’or en provenance de l’Inde pourraient se contracter de 5,3 % cette année, en raison des restrictions mises en œuvre par le gouvernement qui cherche à contenir un déficit des comptes courants record. Le secrétaire aux affaires économiques du sous-continent Arvind Mayaram a indiqué à la presse que les cargaisons étaient passées en un an de 845 tonnes à 800 tonnes à fin mars.

Pourtant, ce type de nouvelle ne devrait en aucun cas entraîner une telle baisse du métal jaune, surtout dans un contexte d’incertitude comme celui dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui.
Encore une fois, pour comprendre les mouvements sur l’or il faut du temps, le temps que l’information arrive jusqu’à nous.

La dernière chute de l’or ? Des rumeurs de ventes de la Banque centrale italienne et française

C’est un article de Reuters parfaitement officiel nous expliquant que la dernière chute de l’or a été provoquée par des rumeurs aussitôt démenties de ventes massives de la part de la Banque de France et d’Italie afin de financer un nouveau plan de relance.

Ce qui est passionnant dans tout ça ce sont les propos tenus par Salvatore Rossi, le directeur général de la Banque centrale italienne, qui a déclaré que l’or joue un rôle spécial dans les réserves officielles des banques centrales.

« Non seulement il a la caractéristique essentielle de permettre la diversification, en particulier lorsque les marchés financiers sont fortement intégrés, en plus il est unique parmi les actifs en ce sens qu’il n’est pas émis par un gouvernement ou une banque centrale, de sorte que sa valeur ne peut pas être influencée par des considérations politiques ou par la solvabilité d’une institution.

Ces caractéristiques, associées à des raisons historiques… et psychologiques, militent en faveur de l’importance de l’or en tant que composante des réserves des banques centrales.

L’or soutient l’indépendance des banques centrales dans leur capacité comme l’apporteur final de stabilité financière intérieure. »

Je crois que l’on ne peut pas être plus clair sur l’intérêt et l’importance de l’or… Pourtant, les cours n’ont pas évolué de façon fameuse cette année… Mais l’année n’est pas finie et il se pourrait bien que le mois d’octobre nous réserve quelques très désagréables surprises.

Je vous rappelle donc très logiquement que l’on ne s’assure pas une fois que sa maison a brûlé mais avant ! L’or est une assurance, pas un placement, et c’est exactement ce que vient de nous expliquer officiellement le patron de la Banque centrale italienne qui pourrait avoir à recréer une monnaie dans les prochains mois, ceci expliquant sans doute cela.

À demain… si vous le voulez-bien !!

Charles SANNAT

Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Le Contrarien Matin est un quotidien de décryptage sans concession de l’actualité économique édité par la société AuCOFFRE.com. Article écrit par Charles SANNAT, directeur des études économiques. Merci de visiter notre site. Vous pouvez vous abonner gratuitement www.lecontrarien.com.

Article de Capital sur l’or et l’Inde

Dépêche Reuters passionnante sur l’or!
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3 commentaires

  • Lien vers le commentaire Gilles Lerat mercredi, 02 octobre 2013 15:39 Posté par gilles lerat


    Charles, c'est génial !
    Le coup du défaut ordonné, oui c'est possible. Ca fait sens en prenant en compte leur côté pragmatique (la situation actuelle ou on laisse s'accumuler les déficits m'ayant toujours étonné), et leur côté tricheur (c'est notre endettement mais c'est votre problème).

    Moi, je pensais qu'ils iraient toujours plus loin dans le QE ... jusqu'à ce que tout s'effondre. Apparemment, il y aurait là bas des gens qui réfléchissent quand même un peu.


    Quelles seraient les conséquences d'un défaut partiel sur l'EUR/USD ?