Sur ce blog, je m'efforce de faire entendre un autre son de cloche sur la mondialisation et le commerce international. En France, nous avons souvent tendance à surestimer ce qu'on y perd et à minimiser ce qu'on y gagne, en la matière. Par exemple, la plupart des décideurs et des commentateurs voient d'un mauvais oeil les importations de produits venant de pays étrangers. Or, il s'agit d'une façon de penser un peu datée, car l'on peut aussi voir les importations comme un supplément d'activité pour les multinationales françaises. Et oui...
Par ailleurs, il n'y a jamais de pays perdant dans les échanges commerciaux, puisque de toute manière, on ne peut acheter des biens qu'à hauteur de ce qu'on peut vendre en échange ! Le commerce international est un exemple d'égalité ! En effet, ce qui compte, ce n'est pas tant l'équilibre de la balance commerciale, mais celui de la balance des paiements...
Mais les politiciens démagogues aiment jouer sur les peurs des individus pour les manipuler en les poussant à désirer des mesures ineptes et insensées, telle que le protectionnisme. Voilà bien un concept qui porte mal son nom, car non seulement il ne protège en rien l'économie nationale, au contraire même : il la met en danger. Car, dès que s'enclenche un processus protectionnisme, c'est tout un cercle vicieux d'attaques et de représailles qui démarre. De plus, le protectionnisme n'a jamais permis une augmentation des salaires, une des fausses promesses les plus courantes, il ne bénéficie qu'aux profits, en les faisant croître artificiellement, et encore seulement à court terme.
En Janvier, j'avais publié un article expliquant que la France était en moyenne plus protectionniste qu'il y a 15 ans ! Car, si les restrictions ont diminué dans l'industrie, elles ont nettement augmenté (plus 10%) dans le secteur des services, qui représente les 2/3 de l'économie. Jusqu'ici, personne n'a réellement vu les bienfaits apportés à la population ou à nos entreprises...
Cependant, il existe également un autre danger du protectionnisme, moins connu : celui de la restriction aux exportations, soit de produits intermédiaires soit de matières premières. De quoi détruire l'économie française en quelques mois ! Sur Mediapart, Philippe Ries l'explique très bien, dans un article rapportant une étude récente de l'OMC qui sonne l'alarme sur un doublement des mesures restrictives au cours des 6 derniers mois dans les pays du G20 :
"Le dernier rapport publié par l'OMC révèle une nette augmentation des mesures de restriction aux échanges prises par les pays du G20 qui représentent quelque 80% du PIB de la planète. La plupart des économies du G20 ont à un moment ou un autre (ces derniers mois) mis en place des mesures qui restreignent, ou ont le potentiel de restreindre, le commerce avec leurs partenaires.
Ce cinquième rapport consacre un éclairage aux restrictions à l'exportation, une forme en apparence paradoxale de protectionnisme illustrée par des cas spectaculaires comme l'interdiction officielle des exportations de blé par la Russie ou celle, officieuse (et partiellement politiquement motivée), des terres rares par la Chine.
En effet, la théorie économique indique que les restrictions aux exportations perturbent les flux commerciaux tout autant que les barrières aux importations, explique encore l'OMC. Elles pénalisent évidemment le pays importateur en le privant de produits ou composants qui lui sont essentiels et en lui imposant des prix plus élevés quand la substitution est possible. Et en réduisant le volume des exportations, elles détournent les produits vers le marché domestique avec un risque d'expulsion des fournisseurs étrangers. Elles aboutissent à favoriser indûment l'industrie nationale aux dépens de ses concurrents étrangers. Et elles peuvent enfin avoir un impact global puisque les restrictions à l'exportation de productions agricoles avaient considérablement aggravé les tensions au moment des récentes émeutes de la faim.
En Europe, et singulièrement en France où ils sont à la fois plus nombreux et de plus en plus bruyants, les partisans du protectionnisme se comportent toujours comme si une telle politique était à sens unique et pouvait être mise en œuvre sans entraîner de représailles immédiates et proportionnées. En réalité, une Europe qui céderait à cette tentation, n'aurait pas à redouter seulement des sanctions contre ses propres exportations. Elle pourrait également être privée de matières premières, produits et composants sans lesquels sa machine économique gripperait très vite."
Aymeric PONTIER
Source : http://aymericpontier.blogspot.com/2011/05/un-danger-meconnu-du-protectionnisme.html