Au lobby du livre, dont on a vu dans un précédent billet qu’il a gentiment propulsé une taxe sur les toners dans la tête de Fleur Pellerin, correspond maintenant celui des agents immobiliers qui s’est empressé d’aller rappeler au député Bulteau qu’elle devrait envisager rapidement de taxer les sites d’annonces immobilières de particulier à particulier avec exactement la même décontraction (relax, c’est la France) que le ministre, et un raisonnement consternant à l’appui de l’un des trop nombreux siphons de l’État.
En effet, pour la brave Sylviane, jamais en retard d’une mathématique boiteuse pour racler les fonds de poches des autres, les ventes immobilières de particuliers à particuliers ne passent pas par des agences et ne permettent donc pas la récupération de la TVA sur les honoraires que ces agences auraient générés en s’occupant de ces transactions. C’est un scandale. S’insère alors l’idée de « manque à gagner pour l’État » que permet ces nouvelles technologies en abolissant les intermédiaires.
Le fait que la transaction soit plus rapide, que le marché en soit rendu plus fluide, et que l’État se sucre tout de même au passage avec les frais notariés n’effleure même pas Bulteau. Et que le marché immobilier français soit, au regard des autres pays européens, le marché le plus lourdement taxé, que cette fiscalité débordante soit directement responsable des prix stratosphériques de l’immobilier en France, tout ça, c’est parfaitement périphérique aux préoccupations du député Bulteau : le pouvoir d’achat des personnes impliquées dans ces transactions, elle n’en a absolument rien à carrer puisqu’avant tout, des taxes qui ne rentrent pas mettent en péril, à terme, ses propres indemnités de parlementaire.
En tout cas, si on peut reprocher ses raisonnements ridicules à Bulteau, on ne peut pas remettre en cause sa volonté acharnée d’en finir une fois pour toute avec le marché immobilier en France, comme, du reste, l’ensemble du gouvernement qui, lui aussi, s’échine à le bloquer définitivement.
Prenez par exemple l' »APL accession » (c’est une aide publique personnalisée pour le logement) : l’élite du pays, découvrant avec stupeur — après tout le monde — que cette aide aurait une furieuse tendance à favoriser des loyers élevés, se serait décidée à plus ou moins programmer sa disparition dans le prochain projet de loi budgétaire pour 2015.
Si, en tant que libéral, on peut se réjouir de la disparition d’une distribution d’argent public, on ne peut s’empêcher de noter qu’elle s’éteint au profit du financement des prêts à taux zéro, qui ne sont qu’une autre forme de subvention déguisée, et qui garantit en tout cas que la ponction correspondante à cette subvention ou cette distribution ne s’éteindra pas, elle. Et, quoi qu’il en soit, cette nouvelle modification substantielle des règles du marché immobilier va encore une fois impacter ses acteurs.
Ces nouveaux bricolages fiscaux interviennent alors que les deux années passées ont été pourtant riches en bidouillages effrénés, sans même parler de l’épique parcours de la loi Duflot, dépecée lentement au fur et à mesure qu’on découvrait l’inanité des propositions de la pauvre ministre. Bref, on va encore tripoter les codes entourant l’immobilier en France alors qu’une bonne dose de stabilité et de calme dans ce secteur semble urgent à l’observateur un peu lucide.
Et puis tant qu’on y est, prenez aussi les dernières idées lumineuses du Comité de Bâle, institution internationale certes non contraignante mais dont les
Et accessoirement, cette nouvelle modification majeure de la finance immobilière va inévitablement entraîner un ajustement des acteurs du secteur, un de plus, au moment où, précisément, l’accession à la propriété en France n’est pas spécialement au beau fixe. Question timing, c’est vraiment judicieux : à force d’efforts idiots du gouvernement, des députés et des institutions bancaires, le marché immobilier français est maintenant bloqué. Lentement mais sûrement, les prix baissent.
Et s’il est tout à fait souhaitable que ceux-ci dégonflent, les raisons pour lesquelles ils le font ne laissent pas présager d’un avenir serein : fiscalité punitive, contraintes écologiques délirantes, paperasserie administrative toujours plus abondante, le tout ajouté à une conjoncture morose et une déflation nette de ces actifs risque bel et bien d’entraîner une glissade qui n’aura plus rien de contrôlé.
Mais voilà : le marché immobilier, en France, n’est pas bombardé de taxes et de contraintes fiscales par hasard. C’est, en réalité, l’une des plus grosses mamelles à laquelle tète goulûment l’État redistributeur, et, par conséquent, le robinet grand ouvert à émoluments juteux pour nos élus, tant au niveau local qu’au niveau national. Les volumes financiers que ce marché représente sont si énormes qu’ils ne peuvent que motiver ardemment les ponctionnaires de toutes sortes. Partant de cette constatation, il n’y a donc absolument aucune chance que la réalité, celle d’un marché suffocant sous une fiscalité délirante, atteigne un jour tous ces élus. Dans cette République où le respect de la propriété privée est (paradoxalement) inscrite dans les droits fondamentaux, tout sera donc entrepris pour la grignoter encore un peu plus sous les impôts divers. Sylviane Bulteau n’est, finalement, que la partie visible d’un iceberg de folles habitudes taxatoires.
Et plus cette propriété sera grignotée, plus les taxes pleuvront, moins elles rapporteront. Les élus, paniqués, continueront donc leur combat, voué à l’échec, et pleurnicheront bien sûr que rien ne se passe comme prévu. Rassurez-vous, le coupable ultra-néo-libéral est déjà trouvé.
Le Socialisme, vraiment, c’est Magique.