Pour de multiples raisons, il ne me paraît pas possible d’ouvrir ce débat sereinement.
Je vais donc utiliser une métaphore pour imager mes convictions, ce sera l’automobile
Étalée sur un peu plus d’un siècle, l’aventure automobile commence par l’incrédulité et la passion de la découverte. Seuls les inventeurs et quelques utilisateurs originaux et éclairés s’y intéressent. En France, c’est l’épisode des “taxis de la Marne”, en 1914, qui vulgarisera symboliquement l’intégration de l’automobile dans la société.
Lentement l’automobile va se développer entre les deux grandes guerres, pendant cette époque les inventions techniques significatives ont toutes été faites. La “Jeep” lors de la guerre de 39-45 sacralise la mobilité offerte par l’automobile, les années qui suivront verront une amélioration technique spectaculaire, l’accès au plus grand nombre, la fiabilité et le confort absolu.
On pourra parler de civilisation automobile accompagnant ou générant l’essor de la prise de conscience de la liberté individuelle, de ses conséquences pratiques.
Les infrastructures sont à son service, la vie s’organise autour de l’automobile.
C’est le règne de la liberté, la proximité de la technicité, l’ivresse de l’accélération, de la vitesse. La pensée et le comportement des hommes vont être profondément modifiés. Individualisme et compétition seront exacerbés. Le progrès qui en résulte est fulgurant
Mais cela a un coût et fauche des vies par milliers. Rien ne semble pouvoir arrêter l’hécatombe.
Un revirement apparaît alors. Commence le poids des contraintes sur l’usage de l’automobile. Restriction de la vitesse, ceinture obligatoire, permis à points, renforcement des règles de circulation et répression féroce.
Pour arriver à une conception des structures routières qui sanctionne par la destruction ou l’accident les excès de vitesse, ralentisseur, stop inversé, chicane de stationnement, rétrécissement des chaussées, etc…
Finalement s’installe la haine de l’automobile, certains n’en veulent plus, dans tous les cas son charme n’opère plus. Pour finir par transformer en punition tout déplacement automobile.
Ainsi l’automobile symbolise l’échec de la solution collective pour régler des problèmes individuels.
Qu’en aurait-il été :
- Si la situation avait été vue à partir des conducteurs initiateurs et seuls responsables de la circulation automobile, que la science tente aujourd’hui de carrément éliminer en les robotisant ?
- Si l’on n’avait pas imaginé que la route est un lieu égalitaire où tous ont un droit égal de circuler, que la collectivité doit réguler ?
- Si l’on avait trié d’abord les conducteurs par compétence, calquant les vitesses autorisées sur ces compétences. Puis les véhicules par catégorie, les voitures d’un côté, les camions de l’autre, sur des voies dédiées ?
Tous les pays ont systématiquement employé la force collective pour gérer la dynamique strictement individuelle de la circulation automobile.
Tous sont arrivés au même résultat, le désintérêt de leurs populations pour l’automobile.
De cela il ressort
Que la collectivité n’est pas en mesure de solutionner globalement les imperfections des actes individuels sans en écraser la dynamique.
Que seule la liberté individuelle permettant le progrès et l’épanouissement, la société se devrait de respecter cette liberté en se donnant les moyens de la canaliser individuellement.
Que tout acte et réflexion de masse sont voués à l’échec. La technocratie, la macro-réflexion paraissent utiles, en fait elles ne sont qu’une régulation de facilité porteuse d’échec, inévitablement.
Que notre société meurt, écrasée par sa gestion massifiée.
Elle ne comporte pas assez d’intelligences individuelles pour éviter cette massification technocratique, pour réguler au coup par coup les individualités qui se heurtent aux parois de verre de la technocratie, comme la mouche dans sa carafe piège.
Le coronavirus symbolisera probablement dans l’histoire des hommes le repli du monde occidental individuel, qui nous a tout donné, le meilleur et le pire, victime de la gestion de groupe, incapable d’avoir possédé en son sein suffisamment d’intelligences pour pouvoir gérer individuellement sa formidable évolution, maitriser ses intelligences moteurs.
En réalité le monde occidental meurt d’un trop plein naturel de bêtise collective qui aura étouffé ses intelligences individuelles.
Je crains fort personnellement d’avoir été plus souvent dans le clan de la bêtise collective que dans celui de l’intelligence individuelle… hélas.
Bien à vous. H. Dumas