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Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

Charles-Sannat

Après le Sarkhollande, voici l'Obamney

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Mes chères contrariées, mes chers contrariens,

Les journalistes adorent les formules « concepts ». En France, nous avions donc le Sarkhollande, la contraction de Sarkozy et de Hollande. L'idée de ce mot concept était de dire que fondamentalement, la politique qui serait menée par l'un ou par l'autre serait assez peu différente, dans la mesure où la réalité économique et des pouvoirs de forces s'imposent à tous, et qu'en plus bien sûr, les marges de manœuvre sont faibles.

Obama Romney, même combat

En pleine élection présidentielle américaine, la même logique s'applique aux États-Unis. Elle est résumée sous le terme « d'Obamney », la contraction cette fois du président sortant Obama et de son adversaire républicain Romney.

Alors il semblerait que Romney souhaite le départ du gouverneur de la Banque centrale américaine (la FED), Ben Bernanke. Ok et « so what ? », comme diraient nos amis d'outre-Atlantique. On peut remplacer le coach sans changer la stratégie de jeu ni les joueurs...

En cas de victoire, le camp républicain pourrait-il stopper la politique de création monétaire de la Réserve fédérale ? À mon avis, c'est impossible. Pour la simple et bonne raison que malgré toute l'idéologie libérale des républicains, laisser faire le marché dans la situation actuelle c'est vouloir déclencher non pas une récession mais une dépression bien plus grave que celle de 1929.

Si la FED stoppe ses QE et ses programmes d'assouplissement quantitatif (j'adore cette expression), alors la bourse de New York s'effondre en ligne droite. Avec cette chute, c'est la retraite de millions de retraités américains qui seront drastiquement diminuées (puisqu'une partie importante du capital placé par les retraités l’est dans des fonds de pensions investis en forte majorité sur les marchés actions).

Non, la véritable inquiétude de Wall Street, c'est plutôt de voir Obama réélu mais sans majorité dans l'une des deux chambres, ce qui pourrait paralyser l'exécutif et rendre difficile tout compromis « bipartisans » sur deux sujets clés, que sont :
1/ La politique fiscale avec le fameux « mur fiscal » (« fiscal cliff »), puisque aux États-Unis aussi il va peut être commencer à être temps de réfléchir à une façon de payer les dettes.
2/ Le plafond de la dette de l'état fédéral qui doit être relevé et nécessite un accord des chambres... donc des républicains.

Une élection de Romney serait donc plus sereine pour les « marchés » et les « zinvestisseurs ». Il n'est pas impossible d'ailleurs que cet élément de la majorité nécessaire pour gouverner pèse dans le vote d'aujourd'hui.

Côté politique étrangère, Romney sera sans doute moins consensuel qu'Obama, pour autant que l'on puisse dire d'un président américain qu'il fut consensuel.
Le prochain président US sera le président... US, pas le Président du Monde. Il protège et défend les intérêts des États-Unis.

Enfin, le cauchemar pour nos financiers serait un mauvais remake de l'élection de 2000 où il avait fallu un mois de bataille juridique avant que la Cour suprême ne déclare (injustement) « deuble U Bush » président.
L'incertitude serait, dans le moment actuel, une très mauvaise chose et aggraverait un climat déjà fortement dégradé.

Qui est Romney ?

Comme les surprises ne sont pas à écarter et bien qu'Obama ait été déjà largement élu et réélu par les Européens, c'est avant tout au peuple américain de voter... et le peuple américain n'est pas le peuple européen (je ne peux pas en dire plus sous peine d'être immédiatement taxé d'anti-américanisme primaire et stupide), si vous voyez ce que je veux dire...

Alors voici une petite bio rapide du peut-être futur président après quelques jours de suspens insoutenables....

C'est un homme intelligent, diplômé d'Harvard (qui n'est pas une petite fac), qui a fait fortune en participant à la création de l'un des plus gros fonds d'investissement américains. Il n'est pas vraiment parti de rien, puisqu'il est un fils de gouverneur, ceci expliquant beaucoup cela, sans pour autant retirer de talent à cet homme.

Croyant et rigoureux, c'est un grand travailleur et surtout... un bon gestionnaire, comme il a pu le prouver en redressant les comptes des JO.

Détaillons donc un peu.

Après avoir passé son enfance à Bloomfield Hills (Michigan), Mitt Romney réside deux ans et demi en France dans les années 1960, en tant que missionnaire mormon. En 1971, il participe aux deux campagnes politiques menées par ses parents et obtient, la même année, un Bachelor of Arts de l'Université Brigham Young, puis un Master of Business Administration à Harvard, en 1975.

Romney se spécialise dans le conseil en stratégie et intègre Bain & Company en 1977. Il en devient plus tard le directeur général et parvient à la sortir de la crise financière qu'elle connaît.

En 1984, il cofonde et dirige Bain Capital, qui devient une des plus grandes sociétés d'investissement aux États-Unis ; son bénéfice net, estimé entre 190 et 250 millions de dollars, permet à Mitt Romney de financer ses campagnes politiques.

En tant que membre de l'église mormone, Romney est, pendant sa carrière d'homme d'affaires, évêque de sa congrégation, avant de devenir président de son diocèse de Boston. Il abandonne ensuite Bain Capital et son rôle dans l'Église afin de se consacrer à la politique.

Candidat sans succès du Parti républicain à l'élection sénatoriale de 1994 dans le Massachusetts face à Ted Kennedy, il retourne à Bain Capital.

Désigné président du « Comité de Salt Lake City chargé de l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2002 », Romney parvient à redresser les finances du comité, ce qui relance sa carrière politique. Il devient gouverneur du Massachussets à l'issue de l'élection de 2002.

Il est à l'origine d'une réforme permettant à tous les habitants de bénéficier d'une assurance maladie avec le choix de souscrire auprès de l'État ou auprès d'une compagnie privée d'assurance. Il redresse également les finances de son État, allégeant le déficit de deux milliards de dollars grâce à une combinaison de réduction des dépenses, d'augmentation des impôts et de baisse des impôts sur les PME.
Il ne brigue pas un second mandat de gouverneur en 2006 et préfère se porter candidat à la primaire présidentielle républicaine de 2008, qu'il perd au profit de John McCain, après avoir néanmoins remporté plusieurs primaires. Une nouvelle fois candidat en 2012, il parvient à être désigné par le Parti républicain afin d'affronter le président sortant, Barack Obama, à l'élection présidentielle. Son colistier est le représentant Paul Ryan.

Mitt Romney est le fils de George W. Romney (1907-1995) qui fut, notamment, président de American Motors Corporation de 1954 à 1962, gouverneur du Michigan de 1963 à 1969 et candidat aux élections primaires républicaines pour l'élection présidentielle de 1968. Sa mère, Lenore LaFount-Romney (1908-1998), était une ancienne apprentie actrice de la fin des années 1920, et elle fut candidate au poste de sénateur du Michigan en 1970. Les arrière-grands-parents de Mitt Romney étaient des mormons polygames qui avaient fui les États-Unis pour le Mexique à la fin du XIXe siècle avec leurs enfants à cause de l’interdiction de la polygamie par le gouvernement fédéral, à un moment où l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours n’avait pas encore renoncé à cette pratique. C'est ainsi que George Romney naquit au Mexique, dans une colonie mormone.
À la suite de la révolution mexicaine de 1910, la famille Romney revient aux États-Unis et s'installe dans l'Idaho, avant de s'établir dans l'Utah à Salt Lake City.
Dernier d'une famille de quatre enfants, Mitt Romney est élevé dans le strict respect de la foi mormone. Il a 22 ans quand il épouse sa petite amie de l'école secondaire, Ann Davies, convertie à sa foi et avec qui il aura cinq enfants.

En 1966, il n'a que 19 ans quand il part pour deux ans en France comme missionnaire mormon. En 1968, il est victime d'un grave accident de voiture en Gironde, à Bernos-Beaulac. Le président de mission retourne aux États-Unis suite au décès de son épouse dans ce même accident. Mitt Romney se voit alors confier la direction des quelque 200 missionnaires que compte la « mission française » dont le siège est à Paris ; à cette époque-là deux autres missions mormones – la « mission franco-belge » et la « mission franco-suisse » – couvrent une partie de la France. Il dépassera les objectifs fixés de prosélytisme. De ce séjour, il garde l'image d'un pays plus archaïque que révolutionnaire. Il déclare ainsi au Wall Street Journal en novembre 2007 qu'une victoire de Hillary Clinton à l'élection présidentielle de 2008 « ferait de l'Amérique la France du XXIe siècle : une ancienne grande puissance devenue un second couteau ».

En 1975, il obtient un MBA et un diplôme de droit à Harvard. Il entre alors chez Bain & Co., un cabinet de stratégie qui a entre autres clients la firme Monsanto de 1977 à 1985, puis se laisse convaincre par six collègues et amis de participer à la fondation de Bain Capital, une société d'investissement. Une photographie faite alors par un journaliste du Boston Globe qui ne la publiera qu'en 2007, montre les sept fondateurs de Bain Capital avec des billets dans les poches, entre les dents..., indiquant ainsi leur statut de golden boys. Il prend alors comme assistant principal T. Coleman Andrews III, petit-fils de T. Coleman Andrews, un candidat indépendant à la présidentielle de 1956. À l'époque, Romney négocie avec Bain & Co. la possibilité de revenir au cabinet en cas d'échec de Bain Capital. Ce sera en fait un immense succès, tous les fondateurs et premiers membres devenant de richissimes hommes d'affaires. Au cours des années, la réussite professionnelle de Romney lui permet d'amasser une fortune personnelle estimée à 200 millions de dollars.

Trois des co-fondateurs de Bain Capital travailleront pour Romney l'homme politique : Eric Kriss, qui fut son secrétaire des finances, et Fraser Bullock, également mormon, qui fut son bras droit pour l'organisation des Jeux olympiques d'hiver de 2002, et surtout Bob White, qui détient une partie des parts des Boston Celtics et assiste de près Romney dans la campagne présidentielle de 2012.

En 1999, il est chargé de sauver de la faillite les Jeux olympiques d'hiver qui auront lieu en 2002 à Salt Lake City, où se trouve le siège du mormonisme. Il parvient à clore son budget avec un excédent de 100 millions de dollars et à rétablir la réputation des JO, jusqu'alors minés par la corruption.

Voilà, vous savez tout, ou presque, il vous manque bien quelques rumeurs concernant les rapports entre la société Bain Capital et la CIA, mais vu que ce sont des rumeurs, nous n'en parlerons pas dans nos colonnes !!

Charles SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
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