Charles Sannat
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Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.
“À propos du Donald” par Charles Gave
Audience de l'article : 2179 lecturesCharles Gave est un libéral. Un vrai.
Certes un vrai libéral n’aime pas la sécurité sociale et autres charges. Il n’aime pas l’assistanat et préfère l’idée de responsabilité individuelle.
Mais un vrai libéral aime avant tout la “liberté”, et pour tout vous dire, je suis ébahi intellectuellement de voir un immense courant se former chez les gens non-idéologues et qui sont simplement des observateurs aiguisés de la situation mais aussi concernés par la chose publique.
Ce courant les unit tous, quelles que soient les sensibilités d’origine, et toutes les conclusions se rejoignent. Notre pays n’est plus que l’ombre de lui-même (mais c’est aussi valable pour les USA) et si nous en sommes arrivés là, c’est parce que nous avons laissé gagner une classe qui se comporte comme des crapules et rapine les peuples en bandes organisées.
Alors oui, voir les crapules avoir peur, cela fait du bien à défaut de faire changer les choses, mais un jour viendra où la peur changera de camps et ce jour-là n’est plus si loin que cela. C’était ma note d’optimisme du jour.
Charles SANNAT
“Il y a bien longtemps au tout début des années 60, j’étais tombé par hasard sur un jeune homme qui venait de s’échapper de Roumanie et qui comme bien des Roumains parlait le français. Durant la discussion il me dit soudain « Vous avez quelqu’un de très bien en France et c’est le Général … Salan. » Pour ceux à qui cela ne dit rien, ledit Général Salan était l’un des quatre officiers qui avaient commis une tentative de coup d’État contre de Gaulle quelques mois avant.
Quelque peu interloqué, je lui dis, « Certes, certes, mais pourquoi ? »
La réponse fut sublime de profondeur. « Voyez-vous, me dit-il, la radio Roumaine officielle ne cesse d’en dire du mal. »
Et c’est là que je compris pour la première fois que dans les pays où la liberté d’information n’existe pas et où sévit un « ministère de la Vérité », la population pour se faire une opinion n’a pas d’autre moyen que de prendre le contre-pied de la vérité officielle. L’ennui bien sûr est qu’en termes logiques, le contraire d’une erreur peut ne pas être la vérité, mais une autre erreur, mais cela reste utile.
Je n’ai jamais oublié cette leçon et je l’applique depuis avec bonheur.
Prenons un premier exemple dans le domaine de la politique.
À la fin des années 70, aussi bien l’économie américaine que le prestige des USA dans le monde entier étaient au plus bas, ce qui réjouissait infiniment toute la gauche française.
Reagan fut désigné, à la loyale, comme le candidat républicain chargé de lutter contre le très incompétent président Carter, au demeurant un fort brave homme.
Dans les mois qui suivirent, les journaux français « de gauche » furent remplis d’injures adressées à l’acteur de seconde zone, à l’ignare, à l’inculte, au demeuré mental qui osait prétendre qu’il allait redresser son pays.
Comme chacun sait, la France s’est toujours distinguée par la qualité des élites qu’elle sélectionne, depuis le rescapé de l’attentat de la rue de l’Observatoire jusqu’à l’Homme Normal qui nous gouverne. On aurait aimé plus de modestie de la part de la classe jacassière, mais à l’impossible nul n’est tenu.
Connaissant un peu Reagan et encore mieux les USA, c’est à ce moment-là que j’ai cessé de lire Le Monde en partant du principe que l’information était une chose, la désinformation une autre. Après tout, c’est déjà difficile de comprendre ce qui se passe mais si en plus des incompétents à l’esprit faux essaient de me faire prendre des vessies pour des lanternes, je ne vois pas pourquoi je devrais les payer pour accomplir cette forfaiture.
Prenons un deuxième exemple dans le domaine de la stature morale d’un personnage et je vais parler de Soljenitsyne qui venait d’être expulsé d’URSS après avoir publié « l’Archipel du Goulag », ce coup de boutoir qui fit sauter le mur de Berlin.
Invité à « Apostrophes » (je crois), il y rencontra Jean Daniel qui lui tint à peu près ce discours : « Lui et Soljenitsyne avaient toujours lutté pour la Liberté. (On voit l’outrecuidance de la part d’un homme qui était pour l’alliance avec les communistes, que personne n’avait jamais mis en prison et qui venait à l’émission dans son joli costume bleu, bien rasé, prospère et sentant bon la lavande )… et donc il ne comprenait pas comment le prophète Russe pouvait venir en France pour expliquer que le communisme était une abomination juste avant des… élections cantonales (ou municipales, je ne sais plus).
Je me souviens de l’air absolument ahuri de Soljenitsyne qui à l’évidence se demandait qui était ce jean-foutre en face de lui. « Quand le sage montre la lune du doigt, l’imbécile regarde le doigt » dit la sagesse populaire. Et du coup, rebelote, je n’ai plus jamais lu le Nouvel Observateur qu’il m’arrivait parfois de parcourir d’un derrière distrait avant cet incident.
Le lecteur ne peut imaginer à quel point ne plus lire ces deux publications libère l’esprit et permet de recommencer à réfléchir tant il est vrai qu’essayer de comprendre pourquoi tous ces gens pensent faux est une tâche sans aucun intérêt.
La seule chose qui compte c’est d’essayer de penser juste soi-même. Comprendre pourquoi les autres pensent faux ne fait pas faire de grands progrès intellectuels.
Le pauvre Revel s’y est brisé.
Et donc, en suivant cette méthode, après cinquante ans de lectures, je suis arrivé à repérer les gens ou les publications qui pensent de travers, ce qui est bien utile et surtout économise un temps précieux.
Ce qui m’amène à mon sujet, l’inénarrable monsieur Trump.
Depuis Reagan, Thatcher, Jean Paul II et Soljenitsyne je n’avais plus jamais vu un tel débordement de haine et d’insultes dirigées à l’encontre de ce brave homme d’affaires new-yorkais qui semble avoir comme gros défaut de beaucoup aimer les femmes, surtout si elles sont jeunes et originaires de l’Est de l’Europe. Comme le disent les plaisantins à New-York, les femmes de Trump montrent bien que les USA ont besoin de travailleuses immigrées puisqu’à l’évidence, elles font le boulot que personne d’autre ne veut faire.
Ce qui n’empêche pas tous les nuisibles habituels d’y aller de leurs commentaires.
Les « hommes de Davos » et autres « Oints du Seigneur », Attali, Minc, BHL etc. ne peuvent supporter qu’un homme qui risque d’être élu attaque leur rêve, ou plutôt leur cauchemar mondialiste et prétende à restaurer les droits du Peuple et la Souveraineté Nationale.
Tous les partisans de la grande fusion des Nations en un seul peuple s’alarment de ses propos visant à contrôler une immigration devenue folle. En tant que libéral, je suis favorable à l’immigration mais encore plus à l’application de la Loi votée localement et librement par les citoyens. Chacun peut faire venir qui il veut chez lui, mais à condition que ce quelqu’un commence par respecter la loi du pays dans lequel il est invité et à condition qu’il ne soit pas rentré en fraude. Nul ne peut se prévaloir de sa forfaiture est un principe intangible du droit.
Tous les stipendiés du ministère de la Vérité, dans les médias, l’éducation ou la culture, c’est-à-dire tous ceux qui nous ont imposé les lois mémorielles et le politiquement correct, sont affolés parce que cet homme dit ce qui lui semble juste et vrai et que les auditeurs qui sont aussi et surtout des citoyens adorent et se précipitent en masse à ses meetings. La langue de bois, ou novlangue, vient de recevoir un coup fatal car aux USA, la parole libre est protégée par le premier amendement : « Le congrès des États-Unis ne fera pas de loi pour limiter la liberté d’expression ». À quand ce premier amendement en France ?
Mais ce qui me réjouit le plus, c’est que les ploutocrates qui ont pris le contrôle du système politique en prenant le contrôle de la banque centrale aux USA étaient persuadés que celui qui pouvait mobiliser le plus d’argent pour sa campagne serait automatiquement élu. Et comme c’était eux qui le choisissaient et qui lui fournissaient l’argent, ils étaient bien tranquilles sur leur tas d’or.
Or, Trump fait une campagne qui ne lui coûte quasiment rien, tout en étant milliardaire, ce qui est à hurler de rire tandis que Jeb Bush, le candidat « officiel » a dépensé plus de $ 100 millions pour rien avant que de renoncer piteusement tandis que l’autre candidat « officiel » Rubio a lui aussi jeté l’éponge. Ne reste plus face à Trump que Ted Cruz, qui dans son genre, ne sera pas plus facile à manipuler que ne le sera Trump.
Et donc je suis en train de connaître un bonheur intense : tous les gens que je méprise et qui nous ont amené dans la situation où nous sommes sont en train de courir en rond en glapissant que ce qui est en train de se passer est horrible, que nous allons droit à la catastrophe, et tout ça à cause du vote d’une population ignorante, ce qui sous entend bien entendu qu’ils croient profondément que la démocratie ne marche pas et que faire voter le peuple est une erreur. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont toujours pensé. On pense à la phrase de Montaigne, inattendu soutien de Trump : « J’aime bien les gens de mon pays qui n’en savent pas assez pour raisonner de travers. »
Mais à la place de Trump, je porterais un gilet pare-balles, à tout hasard, tant ces gens-là n‘aiment pas perdre de l’argent…
En fait, je ne connais pas monsieur Trump, je n’ai pas la moindre idée de son programme et je ne suis même pas sûr qu’il en ait un. Ma principale inquiétude porte sur la décoration de la Maison Blanche si par hasard il était élu, tant il est vrai que la Trump Tower à New-York est un monument impérissable à la gloire de tout ce qui est doré sur tranche.
Mais on n’élit pas un Président pour son goût exquis… sinon monsieur Hollande serait encore à la mairie de Tulle.
Plus sérieusement, il semble que Trump ait mis le doigt à un endroit qui fait très mal.
La classe moyenne aux USA, plutôt blanche et conservatrice socialement, a été non seulement laminée économiquement dans les vingt dernières années mais aussi son système de valeurs a été attaqué comme jamais.
Non seulement « on » les a ruinés, mais en plus « on » leur a dit sans cesse qu’ils étaient idiots de croire à des choses comme le patriotisme, la famille, l’honnêteté, la fidélité, le respect de la parole donnée ou l’égalité devant la loi (si les citoyens américains étaient égaux devant la loi, les Clinton et la moitié de Wall Street seraient en prison) et que sais- je encore….
Et donc le citoyen de base aux USA se précipite aux réunions de monsieur Trump. Et ce qui affole le plus ses adversaires est bien sûr que la participation électorale risque de monter très, très fort, car après tout, toutes ces classes « élitistes » se rejoignent sur un objectif et un seul : empêcher le peuple de s’exprimer.
Il est quand même plus simple de faire élire une marionnette si seulement une petite moitié des électeurs se donne la peine d’aller voter que si tout le monde va voter. On reste entre amis, un peu comme en France entre les deux partis dits de gouvernement. (On se demande bien pourquoi ils ont été affublés de ce titre tant ils ont été incapables de gouverner l’un ou l’autre, mais cela fait sans doute partie de la novlangue, enseignée dans nos écoles depuis quarante ans). Bref, je crois que lorsqu’il s’agit de parler de l’émergence de monsieur Trump, il faut bien faire la part des choses et sérier les problèmes.
Le but premier est de se débarrasser de ces élites corrompues, incompétentes, mortifères et vaniteuses. J’ai souvent parlé dans ces colonnes de la conversation que j’avais eu avec Thomas Hoenig alors Président de la Reserve Fédérale de Kansas City, qui m’avait dit en terme clairs que la Fed avait été capturée par une ploutocratie et que la politique monétaire des États-Unis était menée par cette ploutocratie au bénéfice de cette ploutocratie.
Et se demandait Hoenig, la question essentielle était de savoir comment le citoyen américain allait récupérer sa démocratie.
Eh bien, le Donald est peut-être le début de la réponse. Et comme la même capture non-démocratique s’est passée dans les médias, dans l’enseignement, dans la diplomatie, le but essentiel de tout citoyen devrait être d’abord de virer tous ces nuisibles. On voit mal si telle est la mentalité du peuple Américain aujourd’hui, ce que semble confirmer le bon parcours de Saunders à gauche, comment Mrs Clinton pourrait être élue tant elle représente cette classe honnie. Si monsieur Trump réussit à nous débarrasser ne serait-ce qu’un petit peu de cette classe de sangsues, nous serions déjà tous gagnants.
Tant qu’à faire, bien sûr, il vaudrait mieux qu’ils soient remplacés par des gens compétents et je n’ai aucune information spéciale sur le fait de savoir si le Donald est compétent ou non et à vrai dire, cela m’est égal. Ce n’est pas trop demander que de s’attendre à ce qu’il ne soit pas plus incompétent que ses prédécesseurs tant cela paraîtrait difficile. S’il était simplement incompétent mais honnête, cela serait déjà un gros progrès.
Dans la vie comme dans les affaires, il faut savoir sérier les problèmes.
Mon fils quand il était dans l’armée française en tant que lieutenant avait posé une question à son capitaine qui lui avait répondu : « Lieutenant, dans la vie, il y a deux sortes de problèmes : les problèmes de lieutenant et les problèmes de capitaine. Cela m’a l’air d’être un problème de lieutenant. Rompez ! »
Se débarrasser des corrompus est un problème de lieutenant qui doit être réglé avant que l’on ne trouve un capitaine compétent. Ne pas inverser les priorités me semble être déjà un bon début. Mais en tout état de cause je serai toujours reconnaissant au Donald de m’avoir fait rire comme peu de fois dans ma vie. Le spectacle de l’affolement de toutes mes crapules favorites à l’idée que leur monde de copinage et de crime allait peut-être s’écrouler est un des rares moments de bonheur intellectuel que j’ai connu depuis longtemps.
Et de cela, il faut le remercier.”
Source ici Institut des Libertés
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