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Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

Charles-Sannat

« Préparez-vous à payer un chou-fleur 8 euros… ! »

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Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Houlala j’entends ma femme derrière qui me dit mais qu’est-ce que tu n’as pas encore inventé avec cette histoire de chou-fleur… tu es « fatiguant »… Sauf, que je n’ai rien inventé du tout et qu’au moment où j’écris ces lignes, les Canadiens doivent payer pas loin de 8 dollars LE chou-fleur, pas le kilo hein…

Le chou-fleur devient un luxe au Canada à cause du cours pétrolier…

Ma femme râle encore (toujours) derrière (moi je suis fatiguant et elle, elle est « pénible » à toujours se mêler de tout mais c’est comme ça que je l’aime), en disant mais en quoi le pétrole pas cher vient rendre le chou-fleur plus cher? C’est n’importe quoi ton article du jour… c’est « capillotracté » (un mot savant pour dire « tiré par les cheveux », on s’amuse comme on peut pendant les longues soirées d’hiver). Pourtant j’adore le chou-fleur. Le chou-fleur à la crème, le chou-fleur en gratin, la purée de chou-fleur aussi… et puis dans mon potager ça pousse bien les choux-fleurs, très facile, rien à faire, très rentable!!

Sauf que… il y a un rapport direct entre le prix du chou-fleur au Canada et la baisse du prix du pétrole, et je m’en vais vous en boucher un coin (sans gratin) avec un plaisir ineffable vu l’effet que mes explications ont pu produire sur ma tendre moitié à qui j’ai fini par arracher le commentaire suivant « mais on vit dans un monde de fous »… oui ma chérie, voilà, c’est ça, c’est exactement ça qu’il faut comprendre. C’est un monde de fous…

Allez accrochez vos ceintures, prenez votre respiration… prêts ? On y va !!

Le théorème du pétrole et du chou-fleur !

Soit Pi le nombre imparfait de la racine carrée du vecteur… non j’déconne ! C’était pour rire. Vous n’allez même pas avoir besoin des maths… tout au plus une addition et une soustraction, plus vraisemblablement vos capacités logiques de base, et croyez-moi, tout va bien se passer, même pour les pas forts en math!!!

Soit le CAD… le petit nom de la devise canadienne à savoir le dollar canadien.
Soit le CAD c’est-à-dire la monnaie canadienne qui est corrélée au pétrole puisque le Canada, comme la Russie, et comme la Norvège sont de gros pays producteurs de pétrole, de gaz et de gaz de schiste.

Cela veut dire que si le pétrole vaut très cher, les Canadiens vendent beaucoup de pétrole très cher en dollars canadiens. Cela augmente la demande en dollars canadiens pour payer le pétrole canadien. Du coup le dollar canadien monte beaucoup.

Inversement, quand le pétrole ne vaut plus tripette, la demande en dollars canadiens pour payer du pétrole canadien s’effondre et le dollar canadien baisse…. beaucoup !

Je pense que c’est clair. Relisez doucement et tranquillement en cas de problème…

Si le dollar canadien perd 50% de sa valeur à cause de la baisse du prix du pétrole, alors les produits importés payés en autre chose qu’en dollars canadiens voient leurs prix doubler en dollars canadiens, pour le Canadien du Canada qui fait ses courses au Quebec.

J’ai donc logiquement une pensée toute émue pour notre camarade et cousin Martin Prescott qui ne peut plus manger du chou-fleur (à 8 dollars j’aimerais bien voir sa tête dans le rayon du supermarché). Je vous propose donc d’offrir à Martin des choux-fleurs lors de son prochain passage chez nous (ce qui va drôlement l’arranger au passage de la douane… un trafic de choux-fleurs, je suis sûr qu’à Roissy nos amis douaniers n’ont encore jamais vu ça).

Bref, le prix du Chou-fleur a triplé et pour la salade c’est pareil !

Le prix du chou-fleur a triplé au Canada pour atteindre 8 dollars canadiens (5,51 dollars américains) suite à la baisse du cours du pétrole, écrit le New York Times.

La chute du prix du baril a également fait baisser le dollar canadien car l’économie du pays est dépendante de l’or noir et d’autres ressources énergétiques. C’est la raison pour laquelle les importations, entre autres de légumes frais des États-Unis pendant l’hiver canadien froid, coûtent plus cher en cas de baisse des cours, écrit le NYT.

A partir d’octobre, le dollar canadien a accéléré sa chute par rapport au dollar américain. Il y a deux ans 1 dollar canadien valait 0,93 dollar US — il est descendu aujourd’hui à 0,69 dollar.

Au final, les légumes frais sont devenus un luxe pour les consommateurs canadiens, remarque le NYT.

Selon le journal, un pied de salade Iceberg coûte désormais environ 3 dollars canadiens (2,07 dollars US) par rapport aux 90 cents canadiens habituels (60 cents américains). Le chou brocoli coûte 4 dollars US contre 1,5 dollars US pour deux auparavant. Enfin, le chou-fleur était vendu l’hiver dernier 2,5 dollars canadiens (1,72 dollar US).

Ce que vous voyez là c’est une inflation importée en raison d’une baisse de la valeur de la monnaie !

Rassurez-vous pour Martin et les Canadiens, je pense qu’ils peuvent encore se nourrir et je suis presque sûr que Martin s’amusera dans une prochaine vidéo à disserter sur mon théorème du chou-fleur et du pétrole, mais, le mécanisme à l’œuvre illustré par l’augmentation significative des denrées alimentaires fraîches et sommes toutes banales montre l’extrême fragilité de nos économies modernes.

Cela montre et démontre que les chocs monétaires peuvent être d’une violence extrême et affecter votre quotidien beaucoup plus vite que ce que vous pouvez penser.

Or, le Canadien qui aujourd’hui détient de l’or peut continuer à acheter des choux-fleurs, car si le dollar canadien a baissé, l’or exprimé en dollars canadiens s’est maintenu, conservant ainsi son pouvoir d’achat.

Les Canadiens ne sont pas les seuls concernés. Les Russes voient leur monnaie sacrifiée, mais les Norvégiens aussi… ce phénomène touche donc tous les pays producteurs. Mais regardez aussi du côté du Japon. A force de faire tourner la planche à billets, le Yen se déprécie enchérissant d’autant tous les produits importés pour les Japonais qui s’appauvrissent d’autant.

Encore une fois, l’étape ultime de la crise que nous traversons sera monétaire, et personne n’échappe à une crise monétaire.

En attendant mes chers amis, préparez-vous, il est déjà trop tard !

Charles SANNAT



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