Vous n'êtes pas membre (devenir membre) ou pas connecté (se connecter)
Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

Charles-Sannat

La vérité glaçante sur les États-Unis

Audience de l'article : 2525 lectures
Nombre de commentaires : 0 réactions
Je fais partie de ceux qui pensent que la situation aux États-Unis est particulièrement mauvaise et que les gens souffrent terriblement.

Ceux qui ont la chance d’avoir un travail et une couverture maladie s’en sortent toujours aussi bien mais ceci est également valable chez nous. Lorsque les deux membres d’un foyer travaillent, même si ce n’est pas Byzance, on s’en sort et c’est une grande chance.

Hélas, la précarité n’est jamais loin et la différence entre le “tout va bien” et le “c’est la catastrophe” est de plus en plus ténue.

Nous devenons tous de plus en plus fragiles et c’est la raison pour laquelle il faut apprendre à devenir de plus en plus “robustes”, le plus solide possible pour affronter les difficultés économiques que nous rencontrerons tous.

Aujourd’hui, je vous partage donc cette traduction d’un article américain qui éclaire d’une autre façon – parce que ce n’est pas moi qui l’écris mais un Américain – la réalité économique de ce pays.

Charles SANNAT

drapeau américain

Article de Paul Craig Roberts, publié le 18 février 2016 sur son blog : 

« L’économie américaine fut enterrée lorsque les emplois des classes moyennes furent délocalisés et le système financier dérégulé.

Les délocalisations ont profité aux cadres supérieurs et aux actionnaires car la baisse des coûts du travail a augmenté les profits. Ces profits ont ruisselé jusqu’aux actionnaires sous la forme de plus-values tout en profitant aux dirigeants sous la forme de « bonus de performance ». Wall Street a quant à lui bénéficié de la hausse des marchés engendrée par l’augmentation des bénéfices.

Cependant, la délocalisation des emplois a également entraîné les délocalisations de la croissance et du pouvoir d’achat des consommateurs. Malgré les promesses de « nouvelle économie » et de meilleurs emplois, les emplois de substitution consistent de plus en plus en des postes à temps partiels, des emplois mal payés dans les services, par exemple en tant que vendeur, serveuse ou barman.

La délocalisation des emplois industriels et dans les services qualifiés vers l’Asie a stoppé la croissance de la demande aux États-Unis, décimé les classes moyennes et engendré des perspectives d’emploi insuffisantes pour les diplômés de l’enseignement supérieur qui sont alors dans l’incapacité de rembourser leurs prêts étudiants. L’échelle de la promotion sociale qu’offraient les États-Unis en tant que « société des opportunités » a été vendue pour des profits à court terme.

Le crédit pour compenser la baisse ou stagnation des revenus

En l’absence de croissance des revenus des consommateurs pour porter l’économie, la Fed sous Alan Greenspan a eu recours à la croissance du crédit des ménages pour compenser la différence. Sous le régime de Greenspan, les revenus en stagnation ou en baisse des Américains furent dopés par la possibilité de consommer à crédit. Les citoyens étaient en mesure d’obtenir des crédits grâce à leur bien immobilier, qui s’était apprécié depuis, pour gagner ainsi en pouvoir d’achat.

L’expansion de la dette, largement corrélée au crédit hypothécaire, s’est subitement arrêtée lorsque la fraude perpétrée par un système financier dérégulé a provoqué l’effondrement des marchés immobilier et actions. Le renflouement des coupables a alors alourdi le fardeau de leurs victimes.

Sous Bernanke, l’économie américaine fut soutenue par les assouplissements monétaires, soit l’augmentation massive de la masse monétaire afin de sauver les banques « too big to fail ». Les liquidités fournies par la Fed se sont déversé sur les marchés actions et obligataires, enrichissant ainsi ceux qui avaient investi dans ces actifs. Les dirigeants des entreprises ont contribué à la hausse des marchés actions en utilisant les profits et en empruntant pour racheter les propres actions de leur société, donc en creusant leur dette.

Les bénéficiaires de l’inflation des prix des actifs financiers, produite par les QE et les rachats d’actions, sont bien moins nombreux que ceux qui ont profité de l’expansion du crédit à la consommation de Greenspan. Une poignée de gens relativement riches, ce n’est pas suffisant pour porter l’économie.

La politique des taux 0 de la Fed fut conçue afin de soutenir les bilans des grosses banques tout en privant les Américains du paiement d’intérêts sur leur épargne. Cette politique a réduit les revenus des retraités. Ils furent donc forcés de réduire leur consommation ou de taper dans leur épargne pour compenser, privant ainsi leurs héritiers d’un filet de sécurité.

En utilisant des statistiques sous-évaluées de l’inflation et du chômage en tant qu’écrans de fumée, le gouvernement américain a maintenu les apparences d’un redressement économique. Les étrangers ayant mordu à l’hameçon ont continué de soutenir le dollar en détenant des instruments financiers américains.

L’arnaque du calcul de l’inflation

Le calcul officiel de l’inflation fut « réformé » durant l’ère Clinton afin de sous-estimer fortement l’inflation. 2 méthodes ont été utilisées pour y parvenir :

  1. La première consiste à supprimer du panier de référence du calcul de l’inflation les produits dont le prix augmente pour les remplacer par des alternatives moins chères. Par exemple, si le prix de l’entrecôte augmente, on la remplace par un steak de ronde. Auparavant, l’inflation était calculée sur base d’un niveau de vie constant. Aujourd’hui, le calcul réformé mesure la baisse de la qualité de la vie.
  2. L’autre méthode utilisée pour sous-estimer l’inflation consiste à ne pas prendre en compte la hausse des prix lorsque la qualité augmente. Il est vrai que l’augmentation de la qualité peut provoquer une hausse des prix. Cependant, lorsque l’ancienne alternative n’est plus disponible il s’agit toujours d’une hausse de prix pour le consommateur. (…)
Ces 2 « réformes » ont permis de dissimuler la véritable inflation, mettant ainsi un terme à l’indexation du montant des aides sociales au coût de la vie. La baisse des revenus réels des bénéficiaires de la sécurité sociale a également impacté négativement la demande globale. La sous-évaluation de l’inflation donne également l’illusion que l’économie américaine se redresse vu qu’elle engendre la surestimation de la croissance du PIB. (…)

Sur les chiffres du chômage, qui s’élève réellement à 23 % aux États-Unis

Le taux de chômage rapporté par les presstituées est sans valeur vu qu’il ne prend pas en compte les travailleurs découragés, qui représentent un pan important des chômeurs américains. Le taux officiel est d’environ 5 %, soit celui rapporté par le calcul U-3 qui ne prend pas en compte les chômeurs qui ont abandonné leur quête d’un emploi par découragement.

Le gouvernement américain dispose néanmoins d’un autre mode de calcul, l’U-6, qui prend en compte les travailleurs découragés depuis moins d’un an. Ce taux officiel est de 10 %. Si on prend en compte les chercheurs d’emploi découragés depuis plus d’un an, comme c’était le cas auparavant, le taux de chômage américain s’élève à 23 % (voir John Williams sur shadowstats.com).

Les stimulations fiscales et monétaires ne peuvent remettre les chômeurs au travail que si des emplois locaux existent. Mais vu qu’ils ont été délocalisés, ces politiques sont inutiles. (…) Les politiques américaines du 21e siècle ont détruit la possibilité de voir augmenter la demande réelle des consommateurs. Les économistes le nieront car ils sont complices du globalisme et des délocalisations. Ils les vendent sous l’illusion du libre-échange qui soi-disant profite à tout le monde tout en étant incapables de prouver leurs dires. (…)

Sur la « nouvelle économie »

On nous a dit que les revenus allaient provenir d’emplois mieux rémunérés, de la « nouvelle économie », mais aucun signe des effets de cette mythique nouvelle économie n’est visible dans les statistiques de l’emploi.

Il n’y a pas de nouvelle économie. La nouvelle économie est telle la promesse des néoconservateurs d’une guerre en Irak qui devait être une promenade de santé de 6 semaines remboursée par le pétrole irakien. Alors que la facture s’élève à 3 trillions de dollars d’après Joseph Stiglitz et Linda Bilmes et que cette guerre a duré tout au long du 21e siècle et devient toujours plus dangereuse. (…)

Le gouvernement américain a abandonné l’ensemble de sa population à l’exception des riches. »

Crédit photo : Sergio Vassio via Flickr

Poster un commentaire