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Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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Pourquoi l’Arabie Saoudite connait-elle l’austérité désormais ?

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Certes les prix du pétrole sont bas, très bas, mais en réalité, il n’y en a plus beaucoup en Arabie Saoudite, et cette chute spectaculaire des cours du brut cache aussi une toute autre réalité, celle du « pic pétrolier ». Pour le moment il coule à flot, pourtant tout le monde se prépare au monde d’après et c’est aussi le cas de ce très grand producteur qu’est l’Arabie Saoudite.

Prenez le temps de lire cet article et de le lire aussi pour ce qu’il ne dit pas.


Charles SANNAT


Les bonnes résolutions de L’Arabie Saoudite pour l’année 1437, l’année qui commence d’après le calendrier islamique : sortir de sa dépendance pétrolière. Le programme d’une « rehab » volontaire qui prendra 5 ans, et dont les premiers changements, qui risquent de surprendre les Saoudiens, sont déjà au rendez-vous.

La diversification de l’économie, l’augmentation des prix et la création de nouvelles taxes, oui, Mais une baisse de la production pétrolière, surtout pas.

Le prix de l’essence a déjà doublé partout dans le pays, un saoudien ne payera plus jamais 14 centimes pour un litre de carburant. Il faudra oublier aussi les logements, l’eau, l’électricité payées en grande partie par l’État, les habitants vont devoir affronter les factures. Mais ce n’est pas tout, la TVA et tous ses avantages seront bientôt accessibles au peuple saoudien.Un déficit budgétaire fait toujours réfléchir. 89,2 milliards pour l’année passée et encore 80 milliards pour l’année qui vient: le ministère saoudien des finances a pris en note les précautions du FMI et concentre désormais tous ses efforts dans le changement du fonctionnement économique. D’après Francis Perrin, président de l’Institut Stratégies et Politiques Energétiques c’est par le secteur énergétique qu’ils vont commencer:

Sur le plan énergétique, l’Arabie Saoudite est en train d’amorcer une certaine diversification, avec des projets d’énergie solaire, ce qui est tout à fait nouveau pour ce pays qui avait longtemps trainé les pieds en matière d’énergie solaire, par opposition aux Emirats Arabes Unis et au Qatar, qui ont été pionniers dans ce domaine au moyen orient. L’Arabie Saoudite envisage un programme nucléaire pour diversifier sa production, rappelons que dans le monde arabe il n’y a qu’un seul pays, les Emirats arabes unis, qui ont lancé un programme nucléaire, mais l’Arabie Saoudite pourrait, dans les années qui viennent, prendre une décision dans ce domaine.

La production et l’exportation du pétrole assurent les trois quarts des recettes budgétaires de l’Arabie Saoudite. Même si le pays a pu « mettre de côté » 667 milliards d’euros au cours des années où un baril coutait plus de cent dollars, les saoudiens réduisent désormais leur budget. Le pays souffre donc de sa propre décision de ne pas plafonner la production pétrolière. Francis Perrin estime que ce comportement s’explique par la nouvelle politique de l’OPEP:« Précédemment l’OPEP baissait sa production quand les prix chutaient, mais depuis un an, l’Arabie saoudite et d’autres pays disent, si on réduire la production pour faire remonter les prix, il faut que ce soit dans le cadre d’un accord, entre l’OPEP et plusieurs pays non OPEP. Il n’y a pas de raisons que l’OPEP soit la seule à faire des efforts, dont profitent ensuite tous les producteurs de pétrole, qu’ils soient ou non membres de l’organisation. Ce changement de stratégie intervenu à la fin novembre 2014, et maintenu jusque la fin 2015, est un élément important de la transformation du paysage pétrolier mondial ».

Pendant que les producteurs OPEP et non OPEP attendent de savoir qui sera le martyr de cette crise pétrolière, et qui baissera sa production en premier, plusieurs pays n’ont pas les moyens de jouer à ces jeux, et ce pour diverses raisons:« Parmi les plus touchés on trouve le Venezuela, un autre pays membre de l’OPEP mais qui a très peu de réserves financières et une situation économique extrêmement difficile. En Amérique latine, un pays comme l’Equateur qui est un tout petit pays producteur de pétrole est également très touché. On peut penser en Afrique au Nigéria et à l’Angola, qui sont des pays en développement. Le Nigéria a une population extrêmement pauvre. On pense évidemment à l’Irak et à la Lybie, qui font face à des tensions internes très fortes, avec l’Etat islamique et qui font face à des couts de reconstruction considérables et qui auraient bien besoin de prix du pétrole plus élevé, pour d’une part financer des besoins de sécurité importants, et d’autre part financer une reconstruction nécessaire ».

Les conséquences de la chute pétrolière ne sont pas les mêmes pour les producteurs et pour les consommateurs. Pour plusieurs pays la production est devenue simplement non-rentable. D’après Francis Perrin le maintien des prix bas sur le marché du pétrole est une technique pour éliminer certains acteurs dans le secteur:

« Les bas prix du pétrole ont un impact positif sur la demande, sur la consommation, et négatif sur la production, ça veut dire que ces bas prix ont tendance à exercer un rééquilibrage du marché entre l’offre et la demande. La question c’est: « est-ce que les producteurs attendent que ce rééquilibrage se fasse par le marché — ça prend un certain temps et ça peut être douloureux, voire brutal — ou est-ce que certains producteurs décident d’accompagner ce mouvement de rééquilibrage, en baissant leurs productions? Pour l’instant ce n’est pas ce qu’ils font au moment où nous parlons »L’Arabie Saoudite ne vit pas de la même manière les conséquences de la crise pétrolière que le Venezuela, par exemple. Riyad possède quelques milliards d’euros et reste l’exportateur mondial numéro un d’hydrocarbures, mais elle réduit quand même son budget. Reste à imaginer où tout cet argent « économisé » ira.


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