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Thibault Doidy de Kerguelen

Thibault Doidy de Kerguelen

Je suis président de la Compagnie Financière et Patrimoniale de Normandie. Vous pouvez me suivre sur mon site http://maviemonargent.info/

Petit cours de monétarisme pour les nuls (part 1)

Audience de l'article : 2877 lectures
Nombre de commentaires : 2 réactions

Vous avez été quelques uns à me faire remarquer que tout le monde n’était pas au même niveau de compréhension du monétarisme…

Un minimum de réflexion s’impose pour comprendre ce qui se passe sur les marchés financiers en faisant de petits détours incontournables…

Les économistes du XIX° prenaient souvent des exemples tirés de l’observation du travail des paysans qui formaient alors l’essentiel de la population.
Ainsi, Böhm-Bawerk a montré qu’en investissant un peu (de son temps) un paysan pouvait augmenter sa production et sa productivité, donc sa richesse.
Financiarisons son exemple…

Le paysan vend sa récolte de blé à un grossiste qui lui donne en échange des billets (de la banque centrale).
Si le paysan les garde sous son matelas en continuant à vivre en autarcie, cet argent ne circulera pas.
Le paysan n’augmentera pas sa richesse.

Si au contraire, ce paysan utilise une partie de ces billets pour acheter du pain, il sortira de l’argent (de dessous de son matelas) qui ira dans le tiroir-caisse du boulanger qui pourra alors payer de la farine supplémentaire à son fournisseur qui pourra à son tour payer des paysans pour leur acheter davantage de blé dont le prix augmentera ce qui augmentera leur richesse…
Dans ce cas, l’argent circule. Le boulanger augmentera sa richesse de période en période ainsi que son fournisseur et d’autres paysans dont le nôtre.

C’est simple. Tout est simple. Tout le monde a compris.
Le concept de circulation monétaire est fondamental. Il conditionne (avec l’innovation et l’investissement) la richesse des nations et de leurs habitants.

Cette circulation monétaire est possible car le paysan et toutes les autres personnes qui lui sont économiquement liées dans ce circuit monétarisé ont confiance dans les billets qui circulent.
Là se trouve un problème important qui a été fort mal résolu pendant des siècles…

En effet, les hommes ont cru pendant longtemps que la monnaie (dont les billets de banque) a pour contrepartie l’or, ce qui est une grave erreur car, la véritable contrepartie de l’argent qui circule est la richesse créée qui en a été à l’origine, à savoir ici la récolte de blé de notre paysan, ce qui est une création de valeur.

L’or ne joue aucun rôle positif sur le plan monétaire. Pire même : le bombardier furtif B-2, Ben Bernanke, a montré dans ses premiers travaux académiques que la cause réelle de la crise de 1929, la Grande Dépression, a été l’achat de quantités très importantes d’or en particulier par la Banque de France.

En effet, en transposant ce problème dans l’exemple de notre paysan, s’il achète de l’or avec ses billets, il ne s’enrichira pas et il en sera de même pour toutes les personnes qui gravitent autour de lui (son argent ne circule pas, il est stérilisé).

En achetant des quantités très importantes d’or dans les années 20, les autorités françaises ont donc bloqué la circulation monétaire, ce qui a cassé la croissance des pays les plus développés au point de provoquer une crise très grave.

Dans les années 60, le général de Gaulle a voulu reprendre cette politique monétaire erronée en exigeant de l’or en contrepartie des dollars gagnés grâce aux excédents de la balance commerciale de la France, ce qui a provoqué une saine réaction des autorités américaines : le 15 août 1971, le Président Nixon, suivant les avis de ses conseillers (monétaristes), a décidé de ne plus rendre le dollar (US$) convertible en or.

C’est la date la plus importante de l’histoire économique moderne à partir de laquelle les monnaies sont définies les unes par rapport aux autres, sans être arrimées à l’or qui n’est qu’un métal dont le prix est déterminé en… dollars (US$) par les marchés.

A partir de cette 1° partie qui rappelle quelques bases fondamentales, la 2° partie permettra de comprendre les derniers développements des politiques monétaires et leurs conséquences, ce qui est fort mal compris généralement…

Jean Pierre Chevallier


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2 commentaires

  • Lien vers le commentaire titi mardi, 02 février 2016 09:33 Posté par zetiti

    @gatling : vous nous faites le coût du PIB là.
    Sinon je trouve qu'il y a un truc qui cloche dans l'exemple du paysan. Je dirai plutôt que, s'il est le seul à conserver ses billets, il va s'enrichir au détriment des autres qui font tourner la machine au bénéfice de tous.
    D'ailleurs si on pousse le raisonnement plus loin, en imaginant que tout le monde thésaurise, et donc vit en autarcie, il n'y a plus du tout de circulation de monnaie et donc plus besoin d'en avoir.
    Et puis, il y a un deuxième problème, il y a une limite à ce que le paysan peut thésauriser de la sorte : c'est la quantité de billets disponibles. Ou alors on imagine qu'elle est infinie mais on commence à s'éloigner des modèles concrets et rattachés à l'observable.
    C'est le problème des modèles simplificateurs.

    Je suis d'accord que la circulation de la monnaie est corrélée à la création de richesse, il suffit de se dire que plus un même billet permet d'effectuer des transactions différentes, plus la richesse échangée (j'hésite à dire "créer") est importante.
    Mais l'exemple de gatling nous montre que ce n'est pas suffisant dans un monde de ressource disponible finie (au moins à un instant t donné). C'est la qualité des échanges qui fait la création nette de richesse au niveau globale. sinon il suffirait effectivement de détruire la production de son client pour susciter davantage de commande de sa part et que tout le monde soit riche... et mort de faim.

    Par rapport à votre exemple sur la politique monétaire de De Gaulle, je me demande si le problème, à la base, c'est le surachat de l'or, ou le fait qu'un pays impose sa devise comme moyen d'échange international pour les principales matières premières. Si, en tant que chef d'état, on n'est pas tout à fait sûr des intentions de ce pays (et qu'on n'a pas trop confiance), il peut paraitre raisonnable de s'affranchir, au moins en partie, du risque en convertissant la dite devise en autre chose pouvant servir de réserve de valeur, plutôt que de risquer de voir celle-ci tendre vers 0 si, au hasard, le dit-pays, décide d'affaiblir sa monnaie en en inondant le marché. Je ne dis pas que c'est une bonne idée, simplement que c'est une réaction rationnelle à une décision prise par un autre acteur.
    A qui la faute, l'oeuf ou la poule?

  • Lien vers le commentaire dindonsauvage jeudi, 28 janvier 2016 11:22 Posté par gatling

    Joli l'exemple du paysan. Ce que je lui conseille pour s'enrichir encore plus, c'est d'acheter d'énormes quantités de pain et le bruler. Comme ça, sa demande en blé explosera!