Henri Dumas
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Libéral convaincu, je tire des expériences de ma vie une philosophie et des propositions.
Le tout sans prétention de vérité.
Mon blog : www.temoignagefiscal.com
Le collectivisme ne nourrit pas son homme
Audience de l'article : 1339 lecturesA cette époque 4/5 — soit 80% — de la population vit de l’agriculture. On peut dire que depuis des siècles l’économie est exclusivement agricole. Le capital — ici comme ailleurs indispensable à l’économie — se trouve donc concentré dans la propriété foncière.
Nous sommes au début d’une mutation qui verra le pouvoir économique et le capital passer du monde agricole au monde artisanal et industriel.
Les physiocrates sont les résistants de la dernière heure, ils perdront et seront emportés par la révolution bourgeoise de 1789. Mais avant cette absorption par l’histoire ils représenteront une certaine modernité et surtout ils auront raison avant l’heure, sans le faire vraiment exprès, en affirmant la primauté incontournable de l’agriculture sur tout le reste.
Quesnay croit à la propriété privée, à l’idée que telle qu’elle est imposée elle est juste et nécessaire puisque découlant naturellement des droits sociétaux édictés par la puissance qui gouverne le monde.
Cette propriété privée représente pour lui le capital, au point qu’il propose que l’impôt soit prélevé exclusivement sur la propriété foncière. Fiscalement donc rien de neuf en ce qui concerne le capital, tout comme aujourd’hui nous sommes loin de son acceptation comme unité d’accumulation et de transfert indispensable en tout sans lequel aucun progrès n’est possible.
Cependant, Quesnay trouve tout à fait normal que ce capital foncier, la terre, rapporte à son propriétaire. Ce qu’il refuse, qui fait son originalité, c’est que ses bénéfices soient réinvestis dans le commerce ou l’industrie qu’il considère comme stériles, inutiles.
On voit que la lutte pour le pouvoir économique et politique entre la bourgeoisie commerciale et industrielle et la noblesse propriétaire terrienne est en route.
En 1789 les terriens perdent, les bourgeois et leurs troupes gagnent. Aujourd’hui nous sommes encore, pour peu de temps, sous leur régime.
Que devient alors l’économie agricole ?
Les grandes propriétés sont dans un premier temps pour partie émiettées. Le pays reste majoritairement agricole, rapidement la taille des exploitations ne permet plus aux familles propriétaires d’en vivre correctement. Une profonde saignée sera faite au cours du temps dans la population jeune des campagnes pour les besoins humains de l’industrie et des guerres. A vil prix, les jeunes fuyant la campagne appauvrie.
Très rapidement le monde agricole n’aura plus les moyens d’assumer les capitaux nécessaires à l’acquisition du foncier qui lui est indispensable. Pour se défendre contre les capitaux flottants, ce monde agricole va se collectiviser.
Aujourd’hui cette collectivisation a transféré les ressources de l’agriculture vers le monde bureaucratique des coopératives qui la gouverne, depuis si longtemps que les agriculteurs qui n’ont pas eu la chance de pouvoir revenir à de vastes exploitations de terres riches sont dans la plus totale misère.
Parce que sans agriculture on meurt tout simplement de faim, le pouvoir économique de nos sociétés accepte de payer, à travers les subventions agricoles, les pots qu’il a lui-même cassés.
Cette paupérisation de l’activité agricole a permis de nourrir grassement et sans limite les armées du capitalisme industriel et commercial.
Cependant, pour éviter que le foncier agricole soit capté par ce nouveau capital et que l’agriculteur soit totalement ramené au rang d’esclave, un système de blocage des prix et des attributions du foncier agricole a dû être mis en œuvre.
Aujourd’hui, sauf par exemple pour des territoires comme les vignes du bordelais, le foncier agricole est complètement déconnecté de sa valeur réelle. Cela permet de maintenir des prix de production bas et de larges marges pour la bureaucratie des coopératives agricoles et pour les commerçants ou transformateurs intermédiaires.
Ceci étant.
Ayons ici une pensée émue pour tous les morts de faim liés à une folie politique issue des rangs du capitalisme industriel, le communisme. Je veux parler, vous l’aurez compris, des carnages liés à l’irrespect de l’agriculture, par exemple du fait de Staline ou de Mao Tsé-Toung.
Interrogeons nous sur le dernier avatar intellectuel de ce capitalisme industriel et commercial : l’écologie.
La situation est tragique
Le blocage artificiel du prix du foncier agricole permet toutes les dérives irrationnelles de rentabilité pour cette activité vitale. Dans ces conditions une folie utopique peut s’emparer de ce monde ou lui être imposée.
C’est le cas aujourd’hui avec l’agriculture écologique qui bien qu’en recul scientifique et technique de plusieurs décennies, peut imaginer un avenir économique du fait de la dévalorisation artificielle du foncier agricole.
L’idée que cette vision écologique de l’agriculture pourrait prendre de l’ampleur s’accompagne raisonnablement du constat que la production en sera si perturbée que la famine est au bout du chemin.
Ainsi nous aurons à penser à Quesnay, à son constat de la prédominance de l’agriculture sur tout le reste. Peut-être devrons-nous revenir à sa pensée économique, un comble.
Pourtant, remarquons que la situation globale est assez semblable à celle de son époque, aux environs de 1770.
En effet, la puissance du capital industriel et commercial est aujourd’hui contestée. Tout comme à l’époque le capital agricole a dû laisser la place au capital industriel et commercial, ce dernier devra sans doute demain laisser sa place au capital des activités de service.
Et ce dernier devra, comme son prédécesseur a financé l’agriculture qu’il avait détrônée, être capable de financer l’industrie et le commerce alors en difficulté mais qui resteront indispensables.
Si pour arriver à cela ce nouveau capital est obligé d’arrêter de financer l’agriculture, quelles que soient les excuses ou explications qu’il donnera — écologie en tête — nous mourrons de faim, de façon beaucoup plus certaine que de l’élévation de la température ou des océans.
Cordialement. H. Dumas