Quelques jours plus tard, c’était au tour de l’INSEE de publier ses chiffres du chômage (trimestriels cette fois) et d’annoncer une hausse de 0,1 point entre le 2ème et le 3ème trimestre 2013 du taux de chômage BIT en France métropolitaine, qui atteint désormais 10,5%. Quelqu’un est au chômage ausens du Bureau international du travail (BIT) s’il est en âge de travailler (15 ans ou plus) et s’il répond simultanément à trois conditions :
- être sans emploi, c'est à dire ne pas avoir travaillé, ne serait-ce qu'une heure, durant une semaine de référence ;
- être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours ;
- avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent ou en avoir trouvé un qui commence dans moins de trois mois.
Ces chiffres étant moins réjouissants, ils ont bien évidemment suscité moins de réactions de la part des membres du gouvernement ou du Président. En effet, le niveau de 10,5% du taux de chômage correspond à un niveau qui n’avait plus été observé depuis 1997. Si l’on inclut les DOM-TOM, le taux atteint même 10,9% :
Depuis 1975, le niveau maximal de chômage constaté pour la France métropolitaine a été de 10,8%. Il fut observé à deux périodes : une première fois au 2ème trimestre 1994, une seconde pendant les deux premiers trimestres de 1997.
De son côté, la DARES dresse en fait un portrait beaucoup plus précis de l’univers des demandeurs d’emploi, qu’elle classe en 5 catégories, indexées de A à E. Les trois premières catégories sont tenues de rechercher un emploi, pas les deux dernières :
Source : DARES
Si l’on prend en compte toutes ces catégories (et pas seulement la catégorie A), non seulement le nombre de chômeurs est bien plus élevé, mais la dynamique n’est plus du tout la même que celle décrite lors de la publication des derniers chiffres. En effet, d’une baisse de 20 500 on passe à une hausse de 55 900. De quoi tempérer sérieusement l’optimisme présidentiel. On arrive ainsi à un total de 5 528 900 chômeurs en France métropolitaine, ce qui correspond à une hausse de 343 000 sur un an, soit +6,6%.
À ceux-là il faut bien évidemment rajouter les demandeurs d’emploi d’outre-mer, ce qui fait monter le total à 5 854 200 [2]. Rapporté à la population active française de 28,467 millions, le taux de demandeurs d’emploi atteint ainsi 20,6%. Bien entendu, cet agrégat regroupe des situations hétérogènes. La situation des demandeurs d’emploi qui ne travaillent pas du tout et celle de ceux qui travaillent plus de 78 heures par mois est effectivement peu comparable.
Autre élément qui permet de limiter la portée de la ‘baisse’ du chômage : cette dernière tient davantage au dépliement des contrats aidés (notamment pour les jeunes) que du secteur marchand. En effet, le nombre de salariés du secteur marchand s’est pour sa part contracté de 15 600 sur le 3ème trimestre 2013 et de 132 500 sur un an.
La baisse du chômage annoncée est donc largement artificielle, due notamment aux contrats aidés. De plus, le nombre absolu est également sous-estimé en ne comptabilisant pas certaines catégories de chômeurs ni l’outre-mer. Le nombre de demandeurs d’emploi réel approche en fait les 6 millions, ce qui représente un cinquième de la population active.
[1] Les données de la DARES sont corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables (CVS-CJO).
[2] p.15 du rapport mensuel de la DARES : ‘Demandeurs d'emploi inscrits et offres collectées par Pôle Emploi en octobre 2013
Publié initialement sur 24hGold