Etre un jeune sans diplôme est un avantage. Le ministre du travail comprend qu’ « il serait plus agréable pour une association ou pour une collectivité de prendre » un jeune « avec bac plus deux, ou bac plus trois, mais ce n’est pas l’objectif. » Non, nous ne rêvons pas : le ministre du travail entérine une discrimination effarante et infondée. Le travail scolaire n’est pas récompensé, il n’est même pas encouragé. Le nivellement par le bas devient une politique officielle de ce gouvernement : il vaut mieux ne pas être diplômé, peut-être même ne pas détenir un baccalauréat, pour obtenir un de ces emplois aidés. Ainsi, le jeune qui n’aura pas son bac pourra avoir un travail pendant que celui qui aura fait l’effort de faire des études, passer une licence, pointera à Pôle Emploi. Il y a là une notion de justice sociale difficile à saisir.
Des emplois aidés pour des secteurs aidés : voilà la réalité de ces emplois d’avenir. Ecoutons Michel Sapin : « on lance le dispositif, il faut mobiliser les réseaux et informer les jeunes, les associations et les collectivités. » A la discrimination scolaire, s’ajoute la discrimination sectorielle car on a beau chercher le mot « entreprise » dans les déclarations, on ne le trouve pas. Le gouvernement se tourne donc vers des collectivités qui vivent déjà de l’argent des contribuables et des associations qui elles-mêmes sont le plus souvent subventionnées, comme le dernier numéro des « Dossiers du Contribuables » sur les associations le démontre.
Les emplois d’avenir sont financés aux trois-quarts par l’Etat. En effet, la participation financière de l’Etat dans ces emplois n’est pas mince : « il y a 75% d’aides de l’Etat » confirme Michel Sapin. A ce taux, on pourrait dire que les jeunes qui bénéficieront de ces emplois d’avenir pourront être assimilés à des fonctionnaires puisqu’ils toucheront l’argent des contribuables. Reste à savoir à quoi ils seront réellement employés et ce que cela apportera à la nation.
Un fait est incontournable : il y a de moins en moins d’emplois. Le salariat est à la dérive parce que les entreprises coulent. Le nombre d’entreprises qui mettent la clé sous la porte augmente : dans le secteur industriel, par exemple, plus de 24.000 emplois ont été supprimés en 2012. Le monde de l’entreprise est en berne, il disparaît petit-à-petit et les emplois avec. Mais au lieu d’alléger les charges patronales, de baisser les impôts sur les sociétés, de mettre en place des politiques d’incitations à la création d’entreprise, seules capables de générer de vrais emplois, le gouvernement préfère maintenir la pression fiscale pour pouvoir subventionner. C’est un non-sens politique.
Une économie saine et digne de ce nom ne fonctionne pas avec des subventions ou des aides. Michel Sapin met en place des politiques de l’emploi qui tournent en rond et qui, surtout, consacre l’assistanat dans le monde du travail. Il n’y a pas de relance de l’emploi possible dans tel contexte.
Michel Sapin, ministre de travail qui fut aussi ministre de l’économie dans le gouvernement de Lionel Jospin, devrait pourtant savoir qu’il s’engage dans une impasse. Etre généreux de l’argent des contribuables n’a jamais constitué une politique économique et encore moins une politique durable. Surtout pas en matière d’emploi. S’il le croit, il faudrait alors qu’il rebaptise son ministère pour devenir le « ministre du travail assisté. »