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Bourse stratégie du jeu d'échec

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Vous gagnez des sommes hallucinantes en bourse ? Sachez pourtant que votre cerveau ne sait compter que jusqu’à cinq

Il est facile de noter, au fil de nombreuses lectures, les conseils essentiels des grands traders à succès.

Il existe une vingtaine de préceptes à retenir et qu’il faut appliquer scrupuleusement  avant de pouvoir crier victoire sur les marchés financiers.

Parmi les préconisations, deux retiennent particulièrement mon attention de part leurs liens étonnants avec des découvertes scientifiques récentes sur le fonctionnement du cerveau. 

D’abord, les champions du trading surveillent l’apparition de configurations graphiques particulières dont le facteur de succès est élevé.

Ensuite, ils ne suivent  jamais plus de 3 à 5 valeurs en parallèle durant la journée.

Des travaux effectués sur d’autres champions en leur genre, les grands maîtres aux échecs, montrent en quoi cette stratégie est commune aux grands gagnants de nombreuses pratiques concurrentielles, et aussi pourquoi cette combinaison de deux règles est performante.

Des chercheurs Américains de l’institut de technologie du Massachusetts viennent de découvrir que le cerveau humain, s’il n’est pas aidé de symboles mathématico numériques est totalement incapable de scruter des collections d’objets en effectif dépassant le chiffre cinq.

Cette limitation est commune à d’autres espèces animales : singes, corbeaux, loups …

Les traders plaident que l’expérience leur a démontré qu’au-delà de 4-5 valeurs à suivre, ils perdent de la concentration, et qu’ils tendent à se disperser, réduisant ainsi leurs performances.

D’où vient cette limitation ?

On sait depuis des générations que 5 est un nombre vraiment surprenant car si l’on ôte cinq de dix, il reste cinq … donc ce n’était pas la peine … c’est presque magique.

Mais, la magie n’est pas en cause dans l’affaire qui nous importe !

Les scientifiques en scrutant l’activité des neurones de la partie frontale du cerveau ont découvert que les neurones situés à cet endroit sont spécialisés dans l’identification d’un nombre unique d’objets.

Certains neurones ne s’activent qu’en présence d’un objet, d’autres de deux objets, certains en présence de 3  objets … et ainsi de suite jusqu’à cinq. Au-delà, plus rien ! Il n’existe que 5 catégories de neurones.

Au-delà du chiffre cinq, il faut utiliser des subterfuges numériques pour gérer des « paquets d’objets », mais ce faisant, en perdant la vue de détail individuelle.

Ainsi, le surveillant de baignade à la piscine municipale n’a pas une vue précise de chaque individu dans l’eau.

Il construit des grappes de nageurs regroupés par zones, et il scrute continuellement que tout se passe bien « à la louche ». 

Finalement, ceci n’est pas très rassurant … la présence d’un gardien est plus réconfortante que sa propre efficacité.

On comprend aussi pourquoi les arbitres dans les sports collectifs sont parfois dépassés par la situation dans leur tâche d’arbitrage des sports collectifs.

Le dilemme n’est pas tant  la vision des actions occultées par des sportifs surnuméraires, que celui d’une limitation du cerveau qui néglige toute information au-delà du nombre cinq.

Pourquoi n’y a-t-il que cinq neurones du nombre ?

On ne connaît pas la raison exacte de cette limitation. Sans doute que les animaux, à l’état natif, n’ont pas statistiquement besoin  en pratique, de distinguer des nombres supérieurs.

Depuis les années 60, les psychologues se sont considérablement intéressés aux performances des maîtres au jeu d’échecs, et ce, à tel point que ce jeu fut qualifié de drosophile des psychologues (la mouche drosophile, du fait de la taille de son génome, du peu d’informations qui y sont codés, et de sa rapidité de reproduction est l’objet de travail de tous les étudiants en biologie).

Il est rapidement apparu que ce n’est pas la capacité à calculer un grand nombre de coups à l’avance qui distingue l’expert du néophyte, mais uniquement la capacité à percevoir très vite des configurations pertinentes et favorables pour la suite sur l’échiquier.

Le trader à succès recherche aussi continuellement des configurations graphiques qu’il a mémorisé, et dont il connaît la valeur prédictible statistiquement très favorable.

Ce domaine est d’ailleurs le sujet de nombreux ouvrages affublés du vocable d’analyse technique.

On sait maintenant que la mémoire des champions d’échecs est structurée par des groupes de deux à cinq pièces qui apparaissent fréquemment dans des positions typiques. Ces groupes sont appelés des  chunks .

La mémoire des champions est organisée en réseaux d’environs 50000 chunks porteurs de sens pour la suite du jeu.

Les champions s’y réfèrent pour permettre une analyse rapide des situations et anticiper la suite du déroulement de la partie.

 A titre de comparaison rappelons que si l’on connaît 10000 mots dans une langue étrangère, on peut considérer que l’on est quasiment bilingue … alors 50000 !

Comme pour le trader, ce qui intéresse le champion d’échec, c’est que l’organisation des connaissances en grand nombre au sein du cerveau génère une restriction de l’espace de recherche des coups afin de rester concentré au maximum sur de vrais objectifs profitables.

La concentration sur un nombre restreint d’objectifs, et l’exploitation d’une large palette de coups efficaces  sont les deux axes majeurs de la réussite, aussi bien aux échecs, qu’en bourse.

 En pratique, ces règles s’étendent à tous les domaines dans lesquels une compétition s’opère : le sport, la survie du monde animal, les entreprises, le commerce, ou la recherche par exemple.

Jouer, c’est expérimenter le hasard.  Mais, dans les succès répétés il n’y a pas de place pour le hasard.

Aussi, l’utilisation efficace du système des chunks par les joueurs d’échecs, et l’exploitation favorable des configurations chartristes par les traders, sont révélatrices du fait que c’est les insulter injurieusement que de dire « Jeu d’échec » ou « Jouer en bourse ».

Ils tirent leurs performances de la discipline, et du sérieux de leurs approches.

Ce ne sont pas des génies, mais simplement des travailleurs acharnés qui se placent aux limites des possibilités du cerveau humain … et, il est vrai que cette délimitation sépare la normalité, de l’exceptionnel, donc du génie … cependant sans y basculer !

 

Christophe Gautheron

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