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Bourse et impulsivité

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Hyperactifs, tenez vous à l’écart des marchés, vous avez un dysfonctionnement maladif qui vous perdra

Las, vous regardez votre montre, il est midi. Vous scrutez le compteur de vos opérations, et vous constatez que vous en êtes déjà à la onzième.

Vous avez pris trop de positions. Vos résultats financiers sont plutôt médiocres.

Vous réussissez à capter de beaux mouvements, cela fait votre fierté, mais cela n’arrive pas suffisamment  souvent pour rendre votre compte résultat attractif.

Aujourd’hui encore, votre courtier est celui de vous d’eux qui s’est le plus enrichi … et c’est sans risque pour lui.

Au fond de votre être, vous savez que vous  prenez des signaux à trop faible probabilité de réussite, mais … c’est plus fort que vous, quelque chose vous pousse à réagir ainsi !

Ce biais d’accumulation frénétique de positions dans l’optique de faire un gros coup est très connu.

Il se nomme l’overtrading : en Français, on traduirait cela par : prise de positions compulsives en nombre trop marqué.

La chute est vertigineuse : vous n’êtes plus vous-mêmes.

Vous sentez que vous êtes sous l’emprise d’un petit démon qui dévore vos facultés de résistance aux envies. 

En quelques semaines, vous êtes passé d’investisseur calme et occasionnel à spéculateur quotidien et compulsif.

Votre situation est celle d’un drogué, qui tente de survivre entre deux prises … de positions sur les marchés.

Vous investissez frénétiquement des sommes considérables. Vous vous demandez comment cela va se terminer ? Et, surtout, pourquoi les autres arrivent à se limiter, et pas vous ?

 A ces questions deux points particuliers : une bonne nouvelle, et une mauvaise nouvelle.

La mauvaise nouvelle est qu’il va falloir stopper net vos incursions sur les marchés financiers.

En effet, vous tressez la corde avec laquelle vous vous pendrez car vous êtes malade !

La bonne nouvelle est que tout cela n’est pas de votre faute car vous êtes victime d’un phénomène qui dépasse votre conscience,  et votre volonté.

Pourquoi diable certaines personnes deviennent-elles esclaves  plus facilement et plus rapidement que les autres à certaines activités ?

Des neurobiologistes de l’Université de Cambridge  travaillant sur les phénomènes de  susceptibilité aux drogues  indiquent la voie.

Il semblerait que de nombreuses personnes  portent des  facteurs de prédisposition   génétique à l’addiction.

Certains fragments d’ADN de leur génome favoriseraient une incapacité à résister à diverses natures de  pulsions.

Les gènes en question, produisent ce que l’on nomme les récepteurs de la dopamine, des molécules implantées dans la membrane des neurones, et sur lesquelles viennent se fixer la dopamine.

La dopamine est un neurotransmetteur que l’organisme fabrique à partir de l’alimentation. Dans le cas général, les neurotransmetteurs sont des molécules qui participent à l’efficacité du signal électrique au sein de zones très précises du cerveau.

Elle intervient dans tous les circuits neuronaux de l’appétence et du plaisir, et donc dans leurs dérèglements.

Chez les individus victimes d’addiction, par exemple vis-à-vis du chocolat, de l’alcool, du travail, de la bourse, des jeux vidéos, ou du sport,  des récepteurs de dopamine spéciaux dits D2 et D3 sont en carence, voire inexistants dans les formes sévères.

Les récepteurs D2 et D3 sont impliqués dans les actes de tempérance de l’impulsivité.

Ce sont eux qui transmettent les signaux permettant de ne pas céder aux envies de l’instant, et de les reporter.

Ainsi, votre overtrading est peut être le symptôme d’un nombre anormalement bas de récepteur D2 et D3.

L’impulsivité est généralement associée à divers autres troubles du comportement, addiction au jeu, à l’alcool, à la cigarette, au chocolat, ou le syndrome d’hyper activité par exemple.

Ainsi, au tréfonds de votre personnage, vous connaissez depuis l’enfance votre vulnérabilité.

La maîtrise des pulsions, autrement nommée techniquement  contrôle inhibiteur , est en partie constitutionnelle, c'est-à-dire donnée par mère nature à la naissance, et en partie acquise.

Ainsi, l’éducation est essentielle pour élaborer et renforcer le contrôle inhibiteur.

Ce contrôle se développe lorsque l’on apprend à un enfant à gérer ses frustrations, et à ne pas céder à ses envies immédiates.

C’est très facile pour les petits car le système cognitif est en devenir, donc particulièrement malléable.

Ensuite, pour  l’adulte, rien n’est perdu, mais l’effort de reconstruction risque d’être colossal.

Alors, vous overtradez  vraiment ? Faites bien attention, car il se pourrait bien que vous soyez génétiquement programmé pour perdre à ce jeu de patience et de finesse qu’est la bourse.

Je ne vous le souhaite pas, mais c’est une probabilité élevée, gardez cela à l’esprit !

 

Christophe Gautheron

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