Nous sommes en 1962. Warren Buffett se fait présenter une idée d’investissement par son ami Dan Cowin. Celui-ci a découvert un fabricant de textiles de New Bedford au Massachusetts qui se vend en Bourse à un fort escompte par rapport à sa valeur intrinsèque. Le titre de Berkshire Hathaway se négocie aux alentours de 7,50$ alors que sa valeur intrinsèque est près de 20$. Buffett aime l’idée et commence à accumuler des actions.
Berkshire Hathaway est une entreprise en déclin qui vient de connaître neuf années consécutives de pertes. Elle est dirigée par Seabury Stanton, un homme aristocratique qui se croit investi de la mission de sauver l’industrie du textile en Nouvelle-Angleterre. Stanton utilise une partie des cash flows de l’entreprise pour effectuer des rachats d’actions sur une base régulière. La stratégie de Buffett consiste à accumuler des actions dans le but de les revendre à un prix plus élevé à Stanton lors de sa prochaine opération de rachat.
Stanton devient très inquiet suite aux achats de Buffett et croit qu’une tentative de prise de contrôle de sa société est imminente. Il rencontre personnellement Buffett pour s’enquérir de ses intentions. Celui-ci lui mentionne qu’il serait prêt à céder ses actions lors de la prochaine opération de rachat si celle-ci s’effectuait à un prix de 11,50$. Quelques jours plus tard, Berkshire Hathaway annonce une offre publique de rachat de ses propres actions à 11 3/8 $.
Buffett est absolument furieux ! Il trouve inacceptable que Stanton cherche à lui soutirer 12,5 cents alors qu’il avait une entente verbale avec lui pour un prix de 11,50$. Pourtant, Buffett utilisait lui-même ce type de méthodes lorsqu’il négociait l’achat d’actions de petites sociétés peu transigées sur les pink sheets. Buffett est tellement hors de lui qu’il décide de passer du rôle de vendeur à celui d’acheteur : le gestionnaire d’Omaha veut maintenant prendre le contrôle de Berkshire Hathaway !
Dans l’année qui suivit, Buffett réussit à devenir l’actionnaire majoritaire de la société de New Bedford. Vaincu, Seabury Stanton remit sa démission et Buffett devint président. Il transforma rapidement la société en véhicule pour ses investissements tout en tentant de maintenir en vie les activités de fabrication de textile. Peine perdue, Buffett dut se résoudre à mettre un terme définitif aux opérations textiles de Berkshire Hathaway en 1985.
L’achat de Berkshire Hathaway fut probablement la décision la plus irrationnelle de toute la carrière de Warren Buffett. De son propre aveu, il affirme qu’il se serait mieux porté s’il n’avait jamais entendu parlé de Berkshire Hathaway !
Philippe RANCOURT
Article original :
http://www.entrepreneurboursier.com/2010/12/08/berkshire-hathaway-la-pire-erreur-de-warren-buffett/