C’est immanquable ! Après chaque effondrement des marchés, les dividendes redeviennent populaires ! On a chanté leurs louanges après la crise de 2002 pour mieux les ignorer par la suite lorsque le marché est reparti à la hausse. Ce n’est donc pas surprenant si le discours sur “l’importance du dividende” est de retour en force après la période boursière difficile que nous venons de traverser. Lorsque les marchés sont houleux, les investisseurs semblent percevoir le dividende comme une bouée à laquelle on peut s’accrocher…
Selon moi, le dividende ne devrait jamais faire partie des raisons importantes justifiant l’achat d’un titre. Il ne fait aucun sens d’assumer les risques inhérents à la Bourse dans le but de recevoir un dividende de 3% ou 4%. On peut obtenir le même genre de rendement avec des produits beaucoup moins risqués comme les obligations. La seule raison rationnelle d’investir dans les actions (compte tenu des risques que ça implique) est de viser une croissance de son capital (une hausse du prix de l’action). Le dividende, s’il existe, doit plutôt être perçu comme un bonus.
Une autre théorie affirme que les sociétés haussant leur dividende de façon régulière, année après année, sont d’excellents placements. Je suis d’accord, mais je crois qu’il ne faut pas confondre les causes et les effets. C’est la croissance de ses revenus et de ses profits qui permet à une société de hausser son dividende à chaque année. L’investisseur a donc intérêt à axer son analyse sur les causes de la croissance des profits et considérer les hausses de dividende comme un simple effet de cette croissance. Il faut aussi mentionner qu’avec une telle société, la hausse de la valeur des actions risque d’être largement supérieure à la somme des dividendes versés.
Par ailleurs, le versement d’un dividende ne doit pas être perçu comme un acte vertueux automatiquement favorable aux actionnaires. Retourner une partie des profits aux actionnaires sous forme de dividende est une décision d’allocation du capital faite par la direction d’une entreprise. Comme toute décision d’affaire, celle-ci peut s’avérer judicieuse ou peu avisée. Négliger des occasions de croissance ou tolérer un bilan très endetté dans le but de verser un dividende aux actionnaires ne sont pas nécessairement les signes d’une saine gestion.
En conclusion, il ne faut pas croire que je suis contre les dividendes. Huit des treize titres que je détiens en portefeuille en distribuent… Je pense simplement qu’il ne faut pas exagérer leur importance lorsqu’on investit à la Bourse. Dans le meilleur des cas, ils viennent bonifier le rendement. Dans le pire, ils sont des pièges dont l’investisseur doit se méfier.
Suggestion de lecture : le chapitre intitulé “The hullabaloo about dividends” du livre “Common Stocks and Uncommon Profits” de Philip A. Fisher (aussi disponible en français)
Philippe RANCOURT
Article original :
http://www.entrepreneurboursier.com/2009/10/19/le-dieu-dividende/