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Michel Delobel

Michel Delobel

Gestionnaire de portefeuille sous mandat via une société de gestion agréée, trader pour compte propre et formateur au trading et à l'investissement en bourse, je suis aussi fondateur du site Fenêtre sur Cours et de la société ACGest, via laquelle j'accompagne également mes clients dans la constitution et le développement de leur patrimoine, la préparation de leur retraite ou encore l'optimisation de leur fiscalité.

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Délit d’initié lors du rachat d’AirGas par Air Liquide ?

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Ceux qui s’intéressent un peu aux marchés financiers ont assisté mercredi dernier à un phénomène assez rare pour être signalé : la chute du titre Air Liquide de plus de 8% en séance ! La raison ? L’annonce du rachat de son homologue américain AirGas en espèces sonnantes et trébuchantes pour 13.4 milliards de dollars, soit 143 dollars par titres...

Un prix jugé cher payé et qui explique le recul du titre Air Liquide mercredi dernier. Mais là n’est pas l’objet de cet article. Ce qui a attiré mon attention et ma curiosité, c’est le prix proposé par Air Liquide, représentant une prime de plus de 50% par rapport à la moyenne du cours de l’action AirGas le mois précédant l’opération. Je suis donc allé faire un petit tour sur le graphique d’AirGas, pour aller voir un peu plus loin que le dernier mois écoulé.

 
Une hausse pour le moins suspecte

Première constatation : avant l’annonce de l’opération, le titre n’avait pas connu une année boursière particulièrement flatteuse : à 115$ au 31/12/14, et après une timide poussée jusqu’à 119$ début mars, le titre a entamé une longue glissade, tombant jusqu’à 86$ début octobre, avant de se reprendre un peu. Le 12 novembre, soit 3 séances avant l’annonce du rachat, AirGas cotait 94.6$, en recul de près de 18% depuis le début de l’année.

Quant aux volumes échangés tout au long de l’année, ils tournaient autour du million quotidien, avec quelques pics à 1.6 ou 1.8 millions le 20 mars ou encore le 24 août lors du plongeon des marchés. Début novembre, les volumes tournaient même plutôt autour des 300.000 titres quotidiens.

Là où cela devient suspect, c’est que dès le vendredi 13 novembre, le titre a brusquement bondit de 7.6%, dans des volumes records de plus de 3 millions de titres ! Lundi, la hausse se poursuivait, avec une progression de 4.3% après un pic de près de 9% en séance, le tout dans des volumes cette fois de 3.7 millions ! Et mardi, juste avant l’annonce, le titre gagnait encore plus de 7% !

Qu’on n’aille pas me faire croire qu’il n’y a pas eu de fuites ! Comment expliquer sinon une telle hausse dans de tels volumes, sans aucune actualité particulière ?

Mais que fait la police ?

Ou plutôt, que font les autorités de marché (la Securities Exchange Commission ou SEC en l’occurrence,  pendant de l’AMF aux Etats-Unis) ? Pas grand-chose pour l’instant, et pas grand-chose en général ! Nulle part en tout cas je n’ai vu le moindre article ou la moindre allusion à un délit d’initié. Même s’il est sans doute un peu tôt pour dire si une enquête sera ou non ouverte, je constate en tout cas une nouvelle fois que les règles qui s’appliquent ne sont pas les mêmes pour tout le monde.

En tant que gérant de portefeuille sous mandat, je suis par exemple à la fois particulièrement contrôlé sur mes opérations personnelles (ce qui est normal) et sur les opérations faites pour mes clients, et je n’ai par exemple pas le droit de donner des conseils d’achat et vente, car je pourrais influencer les cours (ce qui peut se comprendre).

Là où cela commence à devenir moins compréhensible, c’est que les règles ne semblent pas être les mêmes pour tout le monde. Pourquoi sinon autoriserait-on des analystes de grandes banques ou société de gestion à donner des recommandations à la hausse et à la baisse sur des valeurs, alors que ces mêmes sociétés font en parallèle de la gestion ? Je sais, on va nous répondre que ces structures sont indépendantes. Mais comment nous faire croire qu’il n’y a pas d’échanges entre les analystes et les gérants d’un même groupe, qu’il soit coté ou non ?

Quant aux délits d’initiés, à quand remontent les dernières sanctions qui ont fait un tant soit peu parler d’elles ? Je me souviens du cas EADS (devenu Airbus) il y a une dizaine d’année, avec de forts soupçons qui pesaient sur les dirigeants. Mais ces derniers ont été blanchis par l’AMF. On a également parlé d’opérations de ventes anormales sur les compagnies aériennes, sur les compagnies d’assurance et les entreprises du World Trade Center juste avant les attentats du 11 septembre. Mais des sanctions ont-elles été prononcées ?  Non, au motif que les spéculateurs n’étaient pas liés à Al-Qaida, les enquêtes ayant donc conclu à la pure coïncidence !!!  Sincèrement, vous n’en n’avez pas marre qu’on nous prenne pour des c..s ? Moi si !
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