Sur la base de l’accord de libre-échange nord-américain (Aléna), TransCanada a présenté sa demande d’arbitrage. Cet exemple souligne la dangerosité et la perversité des accords de libre échange comme le TTIP (Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement entre l’Europe et les USA).
15 milliards $ pour faire pression sur les Gouvernements
Le pipeline Keystone XL aurait dû transporter le pétrole des sables bitumineux de l’Alberta, Canada à Steele City dans le Nebaska, USA. Après 7 ans d’hésitations, le président Obama a décidé en octobre 2015 de ne pas autoriser la construction de ce pipeline car il entre en contradiction avec les actions prises contre le réchauffement climatique.C’est cette décision que TransCanada Inc attaque les USA et demande la somme pharamineuse de 15 milliards $ de dédommagement. TransCanada Inc pense que la décision du président Obama est «arbitraire et injustifiée en regard du traité commercial USA-Canada et qu’il s’agit d’une discrimination. Les retards et la décision ultime de ne pas délivrer le permis est une décision politique, directement contraire aux études du gouvernement US au lieu d’être basée sur les mérites du pipeline Keystone. TransCanada Inc a investi des milliards $ dans ce projet et ce refus ôte toute valeur à nos investissements. ».
L’entreprise se prépare à une lutte longue et coûteuse contre le Gouvernement américain et se dit prête à refaire une demande pour construire ce pipeline.
Détail piquant : TransCanada demande un dédommagement de 15 milliards $ alors que les coûts de la construction étaient devisé à 5,4 milliards $. Cette demande stratosphérique aurait pour effet de « faire réfléchir et dissuader » tout gouvernement qui désirerait se mettre en travers d’un futur projet pétrolier. Le lobby pétrolier US et Canadien soutient cette démarche.
Les grandes entreprises se sont octroyées des droits légaux afin de s’accaparer l’argent des contribuables.
TransCanada invoque le chapitre 11 de l’ALENA qui stipule qu’un investisseur (TransCanada) peut poursuivre un État s’il juge que ses droits économiques ont été violés ou qu’il a été exproprié de manière injustifiée et que ce faisant, il perd des profits potentiels.En un mot, si un Etat prend une décision qui nuit à la stratégie d’affaires d’une entreprise, celle-ci peut poursuivre le Gouvernement.
En 2015, le Canada a déboursé 172 millions $ à différentes entreprises et le Mexique 204 millions $. Pour le moment, les États-Unis n’ont pas à cette date encore perdu de cause. Jusqu’à aujourd’hui, la tactique utilisée par les corporations est de brandir la menace judiciaire pour aller récolter une partie des montants demandés. Souvent sans même avoir commencé à investir dans les projets contestés !
TransCanada souligne les ambitions des grandes entreprises qui sont à la base de ces accords commerciaux. Comme elle ne peut pas construire ce très profitable pipeline, elle demande une compensation financière aux contribuables américains. Qu’importe les problèmes climatiques, la pollution ou la santé des habitants, tant qu’il y a de l’argent à se faire. Les politiques doivent être conscients de ce stratagème en soutenant ce genre d’accord et la population doit être informée sur le détournement d’impôts.
60% des cas gagnés par les entreprises contre 40% pour les Gouvernements
Les firmes nord-américaines impliquées dans le schiste, les sables bitumineux, les forages, les mines, la chimie et toutes les autres formes d’activités qui mettent en péril l’environnement et la santé des populations scrutent ou se servent des failles dissimulées dans ces accords afin de mettre à table les gouvernements.Par le passé, la plupart des disputes sur les accords commerciaux (ISDS Investor State Dispute Settlement) se passaient dans un couloir Nord-Sud (pays riches et pauvres) avec des flux financiers à sens unique.
Aujourd’hui avec ces nouveaux accords entre pays riches, la tentation des entreprises de se servir dans les caisses plaines au-travers d’actions en justice, est une tentation trop grande pour être écartée.
Statistiquement, 60% des cas ISDS sont remportés par des entreprises et seuls 40% sont gagnés par les entités publiques. Les coûts de ses actions en justice varient de 8 à 30 millions $ selon l’United Nation Conference Trade and Developement. Le jeu en vaut largement la chandelle pour les multinationales et la multiplication des cas est une question de pure logique mathématique.
Protestations inutiles
« TransCanada devrait avoir honte de tenter d’extirper des milliards $ aux contribuables américains afin de faire exploser ses bénéfices après avoir été stoppée dans sa tentative de construction d’un sale et dangereux pipeline de pétrole bitumineux dans nos terrains » s'est plaint Michael Brune, CEO de Sierra Club.Le son de cloche est totalement différent chez TransCanada qui s’appuie sur le droit légal qui lui a été transféré au travers de l’accord NAFTA.
A l’échelle européenne, rappelons que l’accord TTIP (USA-Europe) utilise les accords de l’ALENA comme inspiration pour établir les règles de cet accord qui se négocie en secret dans les couloirs de Bruxelles.
Alors que tout cela ne fait aucun sens, une question émerge :
Pourquoi certains gouvernements sont-ils si déterminés à faire prendre autant de risque à l’argent versé par les contribuables en faveur d’entreprises sans scrupules ?