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L'or - Fiche 5 : La Tragédie Monétaire du 20è siècle et la Crise de 1929

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Werner Wüthrich, docteur ès sciences politiques à Zürich (Horizons et débats n°34, décembre 2005) :

 

« Ferdinand Lips¹ s’oppose à la thèse selon laquelle la grande crise économique des années trente s’explique par le rétablissement partiel du système de l’étalon-or. D’après les partisans de cette thèse, le système de l’étalon-or aurait empêché de créer de la monnaie pour stimuler la conjoncture.

 

Ferdinand Lips¹ est d’un autre avis. D’une part, il n’y avait plus alors de système classique d’étalon-or, d’autre part, l’économie et la Bourse des Etats-Unis avaient été gonflées artificiellement, dès les années vingt, d’une monnaie créée à partir du néant. Ce n’est pas un hasard si les historiens nomment cette époque les flambantes années vingt. A un essor artificiel succède inévitablement une chute désastreuse.

 

Le système classique de l’étalon-or n’aurait pas permis une telle évolution, et la grande crise n’aurait pas non plus eu lieu. Lips était convaincu que les fluctuations conjoncturelles inévitables et les adaptations structurelles auraient été plus modérées si l’Etat n’avait pas gonflé l’économie par des «piqûres monétaires».

 

Le krach de 1929 et la récession qui a suivi résultaient d’excès et d’une politique monétaire débridée. Contrairement à une affirmation fréquente, ce ne sont pas les bas prix qui ont accentué la crise, avec ses millions de chômeurs, mais la perte de confiance dans les banques et les autorités ainsi que, en dernière analyse, les doutes de l’homme en lui-même. En Allemagne, cette situation a généré le national-socialisme. »

 

 

De nombreuses banques américaines font faillite durant la Grande Dépression. De 28'000 établissements bancaires en 1926, ce nombre descend à 15'000 en 1933. Simultanément, le taux de chômage grimpe jusqu’à 25%. L’indice principal Dow Jones des actions américaines perd jusqu’à 89% de sa valeur. L’ampleur de la crise rend l’étalon devises-or intenable dans de nombreux pays. Les faillites de banques amènent les épargnants à retirer leur argent liquide et leur or et à le conserver chez eux, ce qui aggrave encore la situation des banques. A mesure que les banques ferment, la masse monétaire décline en causant une déflation sévère. A l’idée que le dollar puisse être dévalué de 41% vis-à-vis de l’or pour relancer l’économie, les investisseurs commencent à transférer leurs capitaux à l’étranger et à vider leurs comptes en exigeant le paiement en pièces d’or. Après avoir tenté vainement de convaincre les citoyens de laisser leur argent à la banque, le gouvernement dicte dans l’urgence une nouvelle loi bancaire :

 

 

Le 5 avril 1933, le président Roosevelt décrète illégale la possession d’or pour les citoyens américains, et leur ordonne de restituer pièces d’or, lingots d’or et certificats d’or aux banques fédérales de réserve avant le 1er mai 1933, au prix de $20,67/once.

 

 

 

Cette confiscation est un véritable vol à grande échelle. Les contrevenants risquent une amende de $10'000, mais les bijoux et les pièces de monnaie de collection ne font pas partie de l’ordonnance. Après cette date, le dollar sera dévalué de 41% en faisant passer le prix de l’or de $20,67/once à $35/once, soit une hausse de +69% pour le métal. D’un seul coup, toutes les dettes en dollars sont dévaluées de 41% vis-à-vis de l’or ! C’est un moyen très pratique d’effacer une partie des dettes accumulées en faisant payer tous les détenteurs de dollars, y compris ceux que le patriotisme a poussés à rapporter leur or à la Fed avant la date fatidique. L’interdiction de posséder de l’or à des fins d’investissement durera jusqu’en 1975.

 

Durant l’entre-deux-guerres, la bataille contre la « monnaie du citoyen » fait rage dans de nombreux pays. Lénine, Mussolini et Hitler restreignent, eux aussi, le commerce de l’or.

 

De 1935 à 1940, le stock d’or de la Fed passe de 9’000t à 19’500t, et représente plus de la moitié du stock d’or monétaire mondial. Les Américains se retrouvent en situation dominante et New York détrône Londres comme première place financière mondiale.

 

Léonard SARTONI

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