La création monétaire est directement liée au niveau du taux d'intérêt car celui-ci va déterminer le coût du crédit. Or, c'est par le biais du crédit bancaire qu'est créée la monnaie. Plus il y a de crédit dans l'économie, plus il y a de création de monnaie et plus la masse monétaire s'accroît.
Rappelons que, sous le présent système monétaire, une banque peut créer de la monnaie en prêtant de l’argent, car elle n’a pas besoin de posséder l’argent qu’elle prête. Elle le crée à partir de rien, par un simple jeu d’écriture comptable. Comme il faut payer des intérêts sur la dette, il faudra créer de plus en plus de monnaie pour servir la dette. Le système monétaire actuel ne peut donc bien fonctionner qu’en engendrant une inflation continuelle (augmentation de la masse monétaire). Pour les économistes keynésiens, la politique monétaire de la banque centrale ne doit pas avoir pour objectif unique la stabilité des prix. Elle doit définir ses objectifs en fonction de la conjoncture économique. En période de récession, elle doit davantage redouter les risques d'une création insuffisante de monnaie que ceux d'une reprise de l'inflation. Pour ce faire, elle doit favoriser l'activité économique en rendant moins cher l'accès au crédit et moins intéressant l'épargne et les placements, quitte à entraîner une inflation plus visible pour le consommateur. En période de forte croissance, elle doit au contraire se préoccuper des risques inflationnistes et faire de la stabilité des prix sa priorité, quitte à entraîner un ralentissement de l'économie. Mais quelle que soit la situation, la politique monétaire est en proie à un dilemme « inflation / croissance », car toute action favorisant la croissance risque d'accentuer les risques d'inflation, tandis que toute tentative de stabilisation monétaire risque d'avoir des effets récessifs.
« Le Gouvernement Americain a une technologie, qui se nomme la planche à billets (ou son équivalent électronique d’aujourd’hui) qui l’autorise à produire autant de dollars qu’il le souhaite à un coût quasiment nul. » (Ben Bernanke, président de la Fed)
La Fed n’a pas vraiment peur de la déflation parce qu’elle sera toujours en mesure de la prévenir aussi longtemps que le présent système monétaire restera en place. La Fed a un pouvoir de création quasi instantanée de monnaie. Même pendant le marasme boursier de 2001-2002, la masse monétaire n’a jamais cessé de croître. La croissance de M3 s’est ralentie à 3% en 2003, mais à aucun moment elle n’a cessé de croître, comme on peut le voir sur le graphique suivant.
Cette croissance débridée de M3 a pour conséquence une perte continue du pouvoir d’achat de la monnaie qui ne peut plus garantir le rôle de réserve de valeur qu’elle avait autrefois (avant la création de la Fed). Le dollar n’est rien d’autre qu’un étalon de mesure qui se rétrécit année après année.
- Avec M3 en hausse de +10% par année, cela signifie que les Etats-Unis impriment, en une année, des nouveaux dollars pour une valeur 22 fois supérieure à celle de toute la production annuelle mondiale d’or !
- Et cette croissance de la masse monétaire n’est pas le seul apanage des Etats-Unis. Pour vous donner une idée, les banques centrales du monde entier ont imprimé, en 2006, de la monnaie supplémentaire pour une valeur largement supérieure à celle de tout le stock d’or mondial (155’000t en 2006) !
Le président de la Fed, Ben Bernanke, a clairement expliqué qu’il disposait de tous les moyens pour éviter une déflation, y compris celui de larguer des billets de banque par hélicoptère ! N’oublions pas que Bernanke est un éminent spécialiste sur la question de la Grande Dépression des années 1930. Malgré cela, beaucoup d’analystes continuent de penser que la Fed sera incapable d’empêcher la déflation lorsque le citoyen américain, surendetté, freinera sa folie dépensière et se remettra à épargner.
L’argument des déflationnistes est qu’à ce moment-là, l’offre totale de monnaie et de crédit se contractera et que la déflation se produira. Cette idée est très séduisante, malheureusement, elle comporte une erreur fondamentale de raisonnement : le consommateur n’a jamais été, et ne sera jamais, le moteur de l’inflation. C’est la banque centrale et non le consommateur qui est le moteur de l’inflation. Ce n’est pas le consommateur qui a fait perdre 95% du pouvoir d’achat du dollar, c’est la Fed, depuis sa création en 1913.
Presque tout le monde pense que la déflation représente la plus grande crainte de la Fed. Et les dirigeants de la Fed ne manqueront aucune occasion de répandre cette pensée parce qu’elle est nécessaire à la sauvegarde du présent système monétaire. Après tout, voudrait-on investir dans des obligations du gouvernement à 30 ans qui ne rapportent que 5%, si on savait qu’il n’existe aucune chance pour qu’une déflation se produise, et si on savait que le dollar était assuré de perdre encore une grande partie de son pouvoir d’achat ? La banque du Japon le ferait peut-être, mais quel investisseur sain d’esprit pourrait l’envisager ?
La Fed a les moyens de maintenir l’inflation, et elle le sait. La plus grande crainte de la Fed, c’est que tout le monde le sache…
Cette crainte de la déflation est une excellente chose pour le patron de la Fed car il peut poursuivre sa politique inflationniste à sa guise (poursuivre l’accroissement de l’offre de monnaie). Ci-dessous, quelques points importants à retenir concernant le débat inflation-déflation:
1) Sous notre présent système monétaire, les deux issues sont destructrices. La déflation, car elle augmente le poids de la dette, et l’inflation car elle conduit à une mauvaise allocation des ressources. ;
2) Les banques centrales ont reçu le pouvoir de créer une quantité illimitée de monnaie-papier, donc de réduire son pouvoir d’achat à volonté ;
3) Aujourd’hui, les prix peuvent baisser sans que cela ne soit dû à une déflation. Les produits manufacturés en Chine, par exemple, causent une pression baissière sur les prix de certains produits chez nous, mais cela ne va pas causer une déflation, bien au contraire. Car ces pressions baissières sur les prix vont donner encore plus de liberté aux banquiers centraux pour poursuivre l’inflation, dont les effets seront temporairement masqués par ces prix en baisse ;
4) Le présent système monétaire ne peut qu’engendrer une inflation continuelle qui ne sera interrompue qu’occasionnellement par des craintes de déflation, mais pas par de la déflation véritable. Cette inflation continuera jusqu’à ce qu’une crise monétaire se produise ;
5) S’il existait une chance pour la Fed de laisser se produire une période de déflation qui purgerait la dette du système, cette chance a disparu depuis longtemps. La seule solution qu’il lui reste est de poursuivre l’expansion monétaire, ou de mourir ;
6) L’inflation se poursuivra jusqu’à ce qu’il y ait une chute de confiance totale dans le système monétaire (crise monétaire). Mais crise monétaire et déflation ont des significations totalement différentes. La déflation est, par définition, une augmentation du pouvoir d’achat de la monnaie, causée par une réduction de l’offre de monnaie. La monnaie prend alors de la valeur. Une crise monétaire est le résultat d’une perte très rapide de la valeur de la monnaie
7) Une crise monétaire et une déflation ont des conséquences radicalement différentes au niveau de l’investissement. Des actifs comme les obligations du gouvernement, qui performent extrêmement bien durant une période de déflation, seraient, avec le cash, les pires investissements durant une crise monétaire.
Cette dévaluation régulière de la monnaie n’éveille aucun soupçon de la part du public qui a fini par voir dans la hausse des prix un phénomène aussi naturel que le lever du jour. Il ne dispose malheureusement pas de moyens pour mettre à jour cette fraude, puisque le seul référentiel dont il dispose se trouve être la monnaie-papier elle-même.
Nous allons voir à présent quels moyens nous avons à disposition pour faire abstraction de cette inflation lorsque nous étudions les signaux envoyés par les prix. Combien de traders utilisent encore des graphiques en dollars sur de très longues périodes de 15 à 20 ans ? C’est bien la preuve qu’ils n’ont aucune idée de ce qu’est l’inflation. A cause de la perte du pouvoir d’achat du dollar, le graphique est en fait complètement biaisé, et les signaux ne veulent plus dire grand-chose. C’est comme de regarder le monde à travers un miroir déformant, vous ne verrez pas la réalité !
L’inflation induit une forte distorsion des signaux sur tout graphique de très long terme, avec des prix en dollars.
Léonard SARTONI