Ce 10 mai, une proposition de loi visant à bannir l'exploration et l'exploitation des gaz naturels de schistes emprisonnés sous le sous-sol de France sera discutée au parlement. Suite à un premier article où je remettais en cause la brutalité de la position défendue par la proposition du député Christian Jacob, il m'a paru utile d'apporter certaines précisions, compte tenu des critiques que ce premier opus a suscitées.
Mon article du 14 avril visant à critiquer la position de principe de l'état disant "non" aux gaz de schistes avant même d'être en mesure d'évaluer la réalité des risques environnementaux brandis par les opposants à l'exploitation de cette source d'énergie m'aura valu d'une part un lectorat inhabituellement élevé, pas mal de soutiens discrets, et un nombre tout aussi élevé d'insultes et d'anathèmes insidieux ou vociférants, sur lesquels je reviendrais lors d'un prochain article.
Laissons de côté les polémiques à deux euros et les attaques ad hominem de ceux qui n'ont rien d'autre à m'opposer - Je ne roule hélas pas pour l'industrie pétrolière, ni personne d'autre d'ailleurs. Dommage, elle paierait bien !- et intéressons nous au fond des critiques émises par les deux parties, pro et anti gaz de schistes. Le principal sujet de préoccupation est évidemment environnemental. Je vais essayer de résumer ici les arguments pro et anti qui alimentent la controverse, en espérant qu'ils susciteront un débat serein...
1 - Utilisation des Shale Gases: un fort potentiel de réduction des pollutions liées aux hydrocarbures classiques
Le Gaz Naturel est principalement utilisé comme source de chauffage, source de production électrique, et source de chaleur industrielle ou domestique. L'intérêt de cet hydrocarbure est que sa combustion génère moins de pollutions indésirables que la combustion de fioul, et, surtout, de charbon. Particules de suie, microparticules imbrulées, rejets souffrés, etc... seront bien moins nombreux par l'usage du Gaz Naturel (source: EPA)
Or, si la France fait un peu figure d'exception en ce domaine, du fait de la prépondérance de l'électricité nucléaire, dans le monde entier, notamment aux USA, au Canada et plus encore en Chine, la principale perspective ouverte aux Shale Gas est une cannibalisation des parts de marché du charbon, en priorité, et des fiouls liquides ensuite. Ce qui est indubitablement positif pour l'environnement respirable.
Reste "la" question du CO2. Ne pouvant résumer toute la littérature "climato-sceptique" à chaque article, je reprécise simplement que le "climato-scepticisme" ne consiste pas, comme certains le répètent de façon erronée en toute circonstance, à "nier que le climat change", car il change tout le temps sous l'action de facteurs éminemment naturels, mais à contester, nombreuses références scientifiques à l'appui, que les changements actuels soient inhabituels, porteurs de dangers inaccoutumés, et provoqués en majorité par les changements de concentration de CO2 dans l'atmosphère. En outre, l'oeuvre clé des "climato-alarmistes", à savoir les rapports de l'organisme ONUsien connu sous le nom français de GIEC, est fortement remise en cause du fait, entre autres questions épistémologiques, de la non prise en compte systématique des découvertes qui ne vont pas dans le sens du "carbocentrisme" en matière climatique. (cf. Mon dossier "réchauffement")
Ajoutons que le scandale du "climategate" (climate gate 1 - C2 - C3 - C4 ) a prouvé, entre autres malversations, que les courbes d'évolution des températures récentes présentées par le GIEC comme la preuve de l'existence d'un problème avaient été artistiquement retravaillées par une équipe de scientifique ayant subordonné leur savoir à un acte de pur propagande, pour produire des courbes "effrayantes".
Les rejets de CO2 ne constituant donc très vraisemblablement pas le problème climatique que l'on veut nous faire croire, il m'apparait sage de ne pas considérer le CO2 comme un polluant, comme tout agriculteur ou botaniste le sait, d'ailleurs.
Mais imaginons un seul instant que je me trompe: et bien, le gaz naturel produit seulement un gros tiers (37% pour être précis) du CO2 que la quantité rejetée pour une même production électrique par une centrale à charbon. Donc permettre la cannibalisation du charbon par le gaz naturel est une extrêmement bonne opération du point de vue environnementaliste.
2 - Extraction des gaz de schistes : point sur les arguments en présence
Mais naturellement, le point focal de ralliement des anti-gaz concerne les questions liées à son extraction. Les cinq arguments clé, présentés par les organisations anti-gaz de schistes, et contestées par les organisations pro-gaz, dans lesquelles on trouve évidemment les professionnels de l'extraction eux mêmes, sont les suivant:
- L'extraction des gaz de Schistes par fracturation hydraulique utilise des produits dangereux qui pourraient contaminer les nappes phréatiques
- Des forages mal isolés pourraient laisser échapper des produits nocifs dans les aquifères
- Les eaux utilisées pour la fracturation, une fois retournées en surface et rejetées dans les systèmes d'assainissement, pourraient polluer la chaine hydraulique.
- Les quantités massives d'eau utilisée opèrent une ponction lourde sur une ressource rare
- L'exploitation des gaz de schiste abime les paysages.
(1 & 2 ) pollution des aquifères :
Les produits utilisés pour la fracturation hydraulique sont des agents chimiques courrament utilisés dans des produits grand public. Cela ne signifie pas qu'ils sont inoffensifs en toute circonstance, mais qu'ils n'occasionnent pas d'effets pervers dans des conditions d'utilisation normales. Il est essentiel, lorsque l'on parle de la dangerosité d'un produit, d'y associer les conditions d'utilisation ad hoc. Après tout, l'eau de javel est innoffensive comme nettoyant du sol mais extrêmement nocive, mortelle même, si vous en avalez. Cela n'interdit pas l'utilisation d'eau de javel pour nettoyer son sol.
Source : Ground Water Protection council (pdf) - cliquez sur le tableau pour l'agrandir
La question qui se pose est donc de savoir si les produits utilisés pour fracturer une roche à plus de 1000 mètres de profondeur peuvent contaminer des nappes aquifères situées à moins de 100 mètres, de façon "ordinaire" ou de façon "accidentelle", et si, aux concentrations utilisées, ces contaminations peuvent avoir le moindre effet sur la santé.
Pollutions "ordinaires" : raison garder...
Préalablement, notons que les pollutions de nappes phréatiques sont hélas fréquentes: ainsi, par exemple, l'agriculture est couramment montrée du doigt pour la pollution de certaines nappes par des nitrates.
Là encore, tout est question de dosage. Le législateur, sur la base des données scientifiques existantes, a défini un seuil (avec une grosse marge de sécurité !) à partir duquel une eau nitrée est impropre à la consommation directe. En dessous de ce seuil, les autorités médicales, au vu des connaissances actuelles, ont déterminé que les nitrates éventuellement ingérés par un organisme vivant n'auront aucun effet négatif. On peut dire la même chose de la plupart des oligo-éléments présents dans la plupart des bonnes eaux minérales: aux concentrations ordinaires, ils sont bénéfiques ou neutres, ils ne deviennent nocifs qu'au delà d'un certain seuil.
Le même raisonnement peut être tenu avec d'autres substances que les nitrates. Très rares sont ces occurrences qui entrainent une interdiction pure et simple de la consommation des eaux considérées. Tout simplement parce que en dessous de certaines concentrations, ces "pollutions" sont indécelables. Dans un simple verre d'eau du robinet, vous trouvez une grande quantité de substances qui, à de hautes concentrations, seraient nocives. On peut même y trouver des particules d'or... Là encore, faute de mieux, le législateur définit des seuils et les agences de l'eau vérifient que les eaux consommables restent en dessous de ces seuils.
Dans ce document de l'état de New York que je citerai à nouveau plus loin, on découvre (page 22, Pdf), que l'eau du robinet peut contenir en quantités non nulles, entre autres, des composants tels que l'antimoine, l'Arsenic (et oui !), du Barium, du Béryllium, du Mercure, du Sélénium, du Plomb, etc... Ces composants sont présents de façon naturelle dans l'eau, mais évidemment, des activités humaines ont pu à certains endroits modifier les quantités de certains polluants. En attendant, aux concentrations observées la plupart du temps, ils ne rendent pas l'eau impropre à la consommation.
Peut on donc imaginer que des substances utilisées pour la fracturation profonde des schistes se retrouvent dans les aquifères situées plusieurs centaines de mètres plus haut à travers des couches de roche, dont certaines sont imperméables, et ce à des concentrations susceptibles de nuire ? Certaines de ces substances étant potentiellement mortelles en cas d'ingestion à haute dose ou cancérigènes, la question n'est pas sans importance.
Naturellement, l'industrie dit "non" (exemple PDF) et les écologistes disent "oui" (exemple). A qui faire confiance ?
Le point de vue des régulateurs publics
Les agences environnementales des états fédérés des USA ont largement adopté le point de vue de l'industrie. Avant que le lecteur n'en déduise qu'elles sont toutes corrompues par les puissances de l'argent, notons tout de même qu'aux USA, un directeur d'agence publique qui s'amuserait à faire de fausses déclarations dans un document à portée législative ou lors d'un témoignage devant ses assemblées représentatives risquerait d'une part de perdre sa place, et d'autre part des poursuites judiciaires. Cela n'interdit pas de penser que certains aient pu se laisser acheter, mais tous ? Et sans que cela ne se sache, ou que les proches collaborateurs n'expriment un point de vue dissident ? Ajoutons que, comme dans tous les ministères de l'environnement du monde, on y trouve plutôt en majorité des profils de gens naturellement très méfiants vis à vis des affirmations des industriels. Cela ne constitue pas une preuve, mais tout de même une présomption que l'on ne peut écarter d'un simple haussement d'épaules. Personnellement, cela me rend plutôt confiant !
Ainsi, dans un document de septembre 2009 (de plus de 800 pages) devant servir à établir la réglementation des forages dans l'état de New York, le New York State Department of Environmental Conservation écrit il (page 34 - PDF) que:
"Aucune occurrence de contamination des eaux souterraines n'a été enregistrée par le NYSDEC suite à des forages horizontaux ou l'emploi de fracturation hydraulique dans l'état de NY".
Le document, en pages 706-712, compile des constats identiques faits par les directeurs ou des scientifiques en chef d'agences environnementales et locales pour les états de l'Alabama, Alaska, Colorado, Indiana, Kentucky, Louisiana, Michigan, Oklahoma, Tennessee, Texas, South Dakota et le Wyoming.
En Pennsylvanie, état fortement concerné par l'exploitation du gisement "Marcellus shale", le Département de la protection de l'environnement écrit (pdf):
Le Ground Water Protection Council, une organisation regroupant les agences de régulation de l'eau des 50 états, écrit, dans un rapport de 2009 (pdf), que:
"Hydraulic fracturing has been a key technology in making shale gas an affordable addition to the Nation's energy supply, and the technology has proven to be a safe and effective stimulation technique"
developed by industry, serve to protect human health and to help reduce environmental impacts from shale gas operations"
Autrement dit, les réglementations applicables constituent une protection des eaux potables aussi bonne que possible.
Naturellement, cela ne veut pas dire que le danger est "nul", mais que les autorités légales en charge de la protection de l'environnement estiment qu'il est "extrêmement faible", "maitrisable", et sans risque de propagation incontrôlable de phénomènes indésirables.
Dans ces conditions, se priver de toute exploitation des gaz de Schistes de par une loi jusqu'au boutiste est totalement exagéré et hors de proportion avec le risque encouru.
Risques de pollutions accidentelles
Des pollutions accidentelles sont possibles (et se sont déjà produites) non pas dans la zone de fracturation par forage horizontal, mais dans la zone verticale par laquelle les produits de "fracking" puis les gaz remontent à la surface. J'ai évoqué dans mon article précédent le cas de Dimmock.
Ce risque n'est pas propre aux gaz de schistes. Il existe pour les gaz naturels, les pétroles et tout autre fluide remonté des profondeurs. L'accident de la plateforme off shore de BP au large de la Louisiane a d'ailleurs montré que ces risques étaient parfois sous estimés.
Concernant l'exploitation terrestre des gaz de schistes, les accidents sont l'exception et non la norme, et en cas d'occurrence, il n'est pas certain, s'il est traité à temps, que les nappes touchées le soient de façon irrémédiable. Mais en attendant, mieux vaut tout faire pour éviter de tels accidents. Aussi les industriels, sous la pression des régulateurs, ont ils été conduits à améliorer constamment leurs techniques d'isolation des zones aquifères des puits.
Ajoutons que les industriels ont un intérêt économique évident à limiter les risques de fuite: en effet, outre les indemnités payées aux riverains en cas de problème, toute perte de pression dans le tuyau réduit l'efficacité de la fracturation, et toute perte de gaz en retour est évidemment une perte sèche pour le puits. Voilà pourquoi les techniques de confinement des tuyaux, généralement dans une double ou triple gangue de ciment et d'acier, ne cessent de progresser depuis les débuts de la fracturation hydraulique en 1949 (technique mise au point d'abord pour l'extraction du pétrole).
Enfin, en cas d'accident, vu les contrôles qui seront mis en oeuvre (à juste raison) par les autorités au droit des forages, il est peu probable qu'une contamination puisse s'étendre largement au point de polluer de larges acquifères. Dès qu'une pollution sera détectée, le puits incriminé fera l'objet d'une fermeture définitive par injection de ciment sur grande hauteur (en dessous des aquifères). De fait, une éventuelle pollution sera très limitée dans le temps et donc très largement diluée au fur et à mesure qu'elle gagnera un captage d'eau potable. Cela laissera largement le temps aux autorités de fermer un captage d'au voisin si par malheur, les valeurs limites de présence de certains matériaux sont rencontrées, et garantit que les captages plus lointains n'ont pratiquement aucune chance d'être impactés.
Je suis parfaitement conscient que cette dernière remarque me vaudra de véritables flammes de la part des anti-gaziers. "Comment donc, mais vous acceptez un risque non nul de pollution pour faire du fric, espèce de salaud", lirai-je dans les commentaires non modérés des divers blogs qui reprendront ce post. Et encore, je vous donne uniquement la version "gentille".
Mais le risque d'incendie doit nous interdire une utilisation raisonnée du feu ou de l'électricité, conformément à des normes de sécurité qui n'évitent pas les accidents mais en réduisent fortement la probabilité et les risques de propagation à un grand nombre de victimes. Par analogie, le risque de tels accidents, qui seront de toute façon rares ne doivent nous interdire d'utiliser une ressource si cela peut être fait à la fois de façon suffisamment sûre et rentable. L'état régalien doit se préoccuper de faire respecter le bon niveau de sûreté. Pour la rentabilité, le marché s'en charge.
(3) pollutions par les eaux de fracturation remontées en surface
Environ un tiers de l'eau additionnée de sable et d'additifs divers remonte à la surface après la fracturation hydraulique. Cette eau, en fonction des sols rencontrés lors de la fracturation, est chargée de différents composants.
Une grande partie est réutilisée pour un nouveau cycle de fracking, et le reste, après traitement local, est rejeté dans le réseau d'eaux usées ou dans les fossés si sa composition le permet. Cela n'est pas différent de ce qui se passe pour n'importe quelle industrie. Aujourd'hui, toutes les grandes installations industrielles sont dotées d'un traitement intégré de leurs eaux résiduelles, qui font l'objet de contrôles sanitaires réguliers, avant d'être rejetés dans les réseaux d'épuration classiques.
Ainsi, dans le cas du Marcellus Shale, l'eau de fracturation est chargée de divers sels (parce que le gisement Marcellus s'est formé sur un ancien lit marin) et de quelques éléments radioactifs... Les eaux font l'objet d'un traitement de dessalement, et sont rejetées dans le réseau d'eaux usées.
Avant que le mot "radioactif" ne déclenche une crise de panique, gardons le sens des proportions: nous subissons chaque jour des rayonnements radioactifs. Ainsi, les nantais reçoivent 114 nanosievert de rayonnement gamma à l'heure, et les Montluçonnais plus de 200. Notre propre corps rayonne le total de 0,25 millisieverts/an, et même les bananes sont radioactives. La radioactivité, à des doses très faibles, est donc partie intégrante de notre quotidien.
Les eaux de Fracturation peuvent être amenées à se charger d'éléments granitiques, radioactifs. Le département de l'environnement de Pennsylvanie, suite à des accusations portées par les opposants aux gaz de schistes, a analysé la radioactivité des eaux des rivières accueillant en bout de chaîne les eaux de retour traitées du Marcellus Shale. Leur conclusion du 7 mars dernier, c'est tout chaud (extrait):
Le DEP de Pennsylvanie a testé l'eau dans 7 rivières dans lesquelles l'eau usée traitée des puits de gaz est rejetée, et n'a trouvé non seulement aucune élévation de la radioactivité, mais que tous les échantillons étaient en dessous des niveaux de radioactivité naturelle de la roche, et que tous les échantillons montraient des niveaux inférieurs aux standards de potabilité pour le radium 226 et 228.
Il a été également noté l'usage de certaines substances cancérigènes lors du processus de fracturation, principalement le benzène, substance dont le rôle dans l'apparition de leucémies, notamment, est bien documenté.
Il y a là un évident point faible dans le processus de Fracking, même si, là encore, l'industrie rappelle que le benzène, naturellement présent dans tous les hydrocarbures, n'a pas de raison de remonter des centaines de roches imperméables.
Le Département des Ressources Naturelles du Colorado, dans un PDF visant à répondre à certaines allégations du documentaire "gasland", rappelle que ses analyses n'ont pas trouvé de traces de BTEX (Benzene, Toluene, Ethylbenzene et Xylène) dans les captages d'eau potables attenants aux exploitations de Shale Gases, ou d'autres installations pétrolifères utilsant la fracturation hydraulique.
Mais le benzène peut également résulter de fuites gazeuses elles mêmes dans l'air. Ces fuites ne représentent, selon le GWPC, que 2% du benzène émis dans l'air aux USA, très loin derrière le trafic automobile. Je n'ai pas pu trouver de chiffres officiels récents, mais l'EPA, en 1999, montrait que l'industrie pétrogazière n'était qu'un acteur marginal des rejets atmosphériques de Benzène (PDF). Des chiffres plus récents ne feraient évidemment pas de mal. Gageons que ce point fera partie de la grande étude lancée par l'EPA dans les jours qui viennent, à la demande du congrès, visant à réactualiser les connaissances sur la prévention des risques liés à l'exploitation des Shale Gases.
L'industrie gazière, voyant là un problème potentiel, travaille à déterminer de nouvelles solutions permettant de se passer des produits les plus controversés.
Ainsi, les dépôts de brevets concernant de nouveaux procédés de fracturation propre ont explosé, dont un certain nombre font appel aux nanotechnologies. Certains procédés commencent à être utilisés (un exemple). Le seul "inconvénient" de cette course à la nouveauté technologique est que les gaziers, qui investissent lourdement en R&D, sont très réticents à dévoiler aux régulateurs, et donc à leurs concurrents, la liste précise des produits qu'ils utilisent, ce qui alimente toutes les spéculations de la part des anti-gaziers.
(4) Dépérissement des ressources en eau
Il est affirmé que l'exploitation des gaz de schistes consomme une importante quantité d'eau.
Selon les chiffres de l'US Geologigal Survey mentionnés par le dernier rapport du GWPF (Global Warming Policy Foundation, à ne pas confondre avec le GWPC déjà mentionné), l'extraction des gaz de schistes en Pennsylvanie consomme 227 millions de litres d'eau par jour, soit 227 000 mètres cubes, à comparer la consommation d'eau domestique, 6 milliards de litres, idem dans l'industrie, et 22 milliards de litres dans la production d'énergie.
Selon un industriel du Shale Gas, la Chesapeake Energy Corporation, l'efficacité hydrique des gaz de schistes par millions de BTU (unité permettant de comparer le contenu énergétique de différents types d'énergies) est nettement supérieure à celle de toute autre énergie:
Naturellement, on me rétorquera que les chiffres cités par un gazier sont biaisés, mais de toute façon, que ce soit chez les pro ou les anti-gaz de schistes, tout le monde a intérêt à faire du "cherry picking" de chiffres avantageux pour sa thèse. Et les chiffres cités proviennent du département US de l'énergie, dont on voit mal pourquoi il chercherait à privilégier l'industrie du gaz sur celle du charbon ou celle du pétrole, deux lobbies tout à fait puissants, comme les environnementalistes aiment à le rappeler...
Les gaz de Schistes ne sont donc clairement pas un danger pour la disponibilité des ressources en eau.
(5) Impact paysager
Les derricks ne sont visibles que lors du percement du puits. Pendant la phase d'extraction du gaz, ils sont démontés. Les technologies, sous la pression des riverains des gisements US propriétaires de leur sous-sol, qui veulent bien toucher les royalties des Shale Gases mais pas subir un impact paysager fort, ont beaucoup progressé de ce point de vue.
Voici, photographié par Matt Ridley, le journaliste scientifique auteur du rapport du GWPF pré-cité, à quoi ressemble un puits moderne: une aire de 2 à 3 hectares, qui permet d'extraire du gaz sur plus de 450 hectares (4,5 km2)
Entre ceci et un champ d'éoliennes, lequel est le plus impactant sur le paysage ? Mais bon, les goûts et les couleurs...
Autres considérations
Le récent rapport de Matt Ridley cité ci dessus, préfacé par le scientifique multi-distingué Freeman Dyson, pour la Global Warming Policy Foundation, mérite un coup d'oeil (32 pages), de part la diversité des questions qu'il traite de façon très synthétique. Je citerai simplement, rapidement:
- Le prix du Kw/h produit par le gaz de schiste est potentiellement de loin le moins cher, même par rapport au nucléaire.
- Le gaz de schiste, par rapport aux huiles, au nucléaire, au charbon, est celui dont l'usage, de très loin, est le moins générateur d'externalités négatives non incluses dans son prix de revient.
- L'intrusion d'un puits de gaz dans le paysage est bien moins traumatisante qu'un champ d'éoliennes: il faudrait 47 turbines géantes de 2,5Mw pour produire la même énergie qu'un seul champ gazier de 2,5 hectares, chaque turbine géante immobilisant une surface au sol d'environ 1,5 hectare. Faites le calcul vous mêmes. Ajoutons que les champs gaziers ne tuent pas des milliers d'oiseaux ou de chauves souris chaque année, et que les turbines au gaz produisent la quantité d'énergie voulue quand on en a besoin, et pas uniquement quand le vent n'est ni trop fort, ni trop faible...
- Le gaz est rentable même sans subventions.
- Un certain nombre de progrès récents dans le domaine des turbines à gaz permet d'envisager que le GPL puisse prendre des parts de marché à l'essence ou au diesel à bien moindre coût dans le transport terrestre, et ce pour un bénéfice environnemental certain.
J'ajouterai pour ma part d'autres considérations tout aussi importantes:
- En minorant les importations d'énergie importée fort coûteuse, le gaz de Schiste peut contribuer à améliorer notre niveau de vie en maintenant dans notre économie des sommes assez considérables, sans parler des avantages géopolitiques à ne pas dépendre de régimes qui ne nous veulent pas toujours que du bien.
- Si le législateur avait l'intelligence d'attribuer le produit des taxes que cette activité génèrerait au niveau des collectivités locales, alors les populations locales seraient directement bénéficiaires des richesses de leur sous-sol.
Conclusions : les gaz de schistes sont une opportunité économique ET environnementale, pas une menace
Très rares sont les activités industrielles qui engendrent un risque zéro, létal ou environnemental. Produire du charbon ou du pétrole n'a pas toujours été une activité de tout repos, et l'accident de la plateforme BP nous a rappelé que le risque environnemental lié à ces activités, que l'on avait fini par oublier, était réel. Sans oublier l'accident de Fukushima...
Pourtant, personne (sauf mouvances politiques très particulières...) n'envisage sérieusement d'arrêter toute activité pétrolière ou nucléaire. Personne n'envisage d'arrêter la circulation automobile, malgré un impact létal et environnemental bien plus important que toute autre activité humaine en temps de paix.
Or, tout porte à croire que les risques liés à l'exploitation des gaz de schistes sont bien identifiés, bien circonscrits, ne mènent pas à des situations potentiellement incontrôlables. En outre, il est plus que probable que l'exploitation ou l'utilisation des gaz de schistes soit environnementalement bien plus favorable que la plupart des énergies alternatives utilisées de par le monde, au premier rang desquelles le charbon et les pétroles liquides.
Loin d'être une menace, la présence de gaz de schistes en grande quantité dans notre sous sol est donc une opportunité non seulement économique, mais aussi environnementale.
Aussi serait-il particulièrement idiot de s'interdire toute exploitation des gaz de schistes, au nom de risques visiblement fortement exagérés par une mouvance politique de nature intégriste qui s'est faite pour spécialité le commerce politique de la peur, et qui s'en sert d'ailleurs assez largement pour récolter des fonds (un exemple).
La pression environnementaliste est saine lorsqu'elle force les industriels à améliorer leurs processus pour réduire leur impact sur notre environnement, ce qui se produit de façon continue grâce aux progrès technologiques, mais elle devient délétère lorsqu'elle s'appuie sur des positions extrémistes qui poussent les politiciens à prendre des décisions visant à interdire tout progrès, en s'abritant derrière le dramatique principe de précaution.
Non à une interdiction !
Voilà pourquoi, à partir du 10 mai, il ne faut pas que l'assemblée adopte une interdiction pure et simple de l'exploration des gaz de schistes. A l'instar du travail exploratoire effectué par l'état de New York cité dans cet article, il est bien plus constructif de demander à un organe scientifiquement irréprochable tel que l'académie des sciences de produire, en 6 à 9 mois, un guide de "bonnes pratiques", cernant les certitudes et incertitudes technologiques liées aux gaz de schistes, déterminant les meilleurs moyens de réduire les zones d'incertitude, et posant les jalons pour une réglementation de l'exploitation "raisonnée" et "durable", selon les termes à la mode, réglementation qui pourrait être mise au vote, au hasard, après les présidentielles !
Si vous pensez qu'il en vaut la peine, faites passer d'urgence cet article à votre député ou sénateur !
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Lire également :
Ont servi de sources principales pour cet article :
Pennsylvania Hydraulic Fracturing State Review, Department of Environmental Protection - PDF
New York State Department of Environmental Conservation - Environmental Impact Statement - PDF
GWPC et USDOE - Shale Gas, a Primer - PDF
GWPF, Matt Ridley - Shale Gas Shock - PDF
Department of Natural Ressources, Colorado - Answer to Gasland - PDF
Articles précédents :
Gaz de Schistes, quand la bêtise et la lâcheté rencontrent l'état (objectif eco)
Principe de précaution contre responsabilité individuelle
Dossier réchauffement climatique
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Voir également :
Comprendre le foreclosure gate Ainsi que la bande annonce vidéo du livre
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