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Vincent Benard

Vincent Benard

Vincent Bénard est analyste à l'Institut Turgot (Paris) et, depuis mars 2008, directeur de l'Institut Hayek (Bruxelles). C'est un spécialiste du logement et  de la crise financière de 2007-2008 (subprimes). Grand défenseur du libéralisme économique, Vincent décortique tous les errements des Etats providence !

Foreclosure-Gate (XI): le congrès confirme la situation précaire du système financier américain

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Dans son rapport tout juste publié le 16 novembre 2010, le comité de supervision du congrès américain (COP - Congressional Oversight Panel), présidé par le sénateur Kaufman, valide la plupart des analyses délivrées par Objectif Eco sur les incidences du ForeclosureGate, alors même qu'une grande majorité de commentateurs de la "grande presse" n'ont voulu y voir qu'une question technique secondaire. Pour ceux qui ne voudraient pas se nourrir des  120 pages certes instructives mais roboratives du rapport (PDF), nous vous en livrons les points saillants, énoncés dans le résumé exécutif (passages mis en gras par la rédaction):


- Le résumé consacre 5 lignes au "meilleur scénario" pour les banques, sans l'argumenter, contre 2 pages et demie au scénario du pire. C'est dire qu'ils n'y croient guère. Dans cette hypothèse:
 

 

"Les craintes vis à vis des irrégularités procédurales seraient exagérées. Cette hypothèse, qui est celle soutenue par l'industrie financière, quelques employés ont commis des erreurs matérielles et (...) tout rentrera dans l'ordre dès que de nouveaux dossiers de faillite seront présentés"

 

 


Notez que le COP prend la peine de préciser que cette hypothèse est celle de l'industrie financière.

- Le résumé embraye immédiatement sur le scénario le plus difficile:
 

 

"Le scénario du pire des cas est considérablement plus menaçant" (le terme employé, grim, peut aussi se traduire par "sinistre" ou "macabre").

 

 

 

 

"Ce scénario  est soutenu par nombre d'universitaires et d'avocats".
 

 

 

Bref, à part les financiers, bien peu semblent croire au scénario rose...

 


"Si les problèmes de mauvaise documentation des prêts se révèlent pervasifs, et non seulement jettent le doute sur la propriété des maisons forcloses mais aussi des pools de créances titrisées, les conséquences pourraient être sévères. Des droits de propriété clairs et incontestables sont la fondation du marché immobilier. Si ces droits sont remis en question, c'est cette fondation qui s'écroule (...) les magistrats pourraient s'opposer à toute procédure de saisie dans de telles conditions, même dans les cas où les emprunteurs auraient clairement fait défaut sur leurs paiements".
 

 

 

Le congrès estime probable qu'une des lignes de défense des banques selon laquelle "à partir du moment où les propriétaires sont en défaut de paiement, les erreurs de procédure n'ont pas d'importance". Le corps du rapport détaille particulièrement ces questions.

 


"Par exemple, si une banque de Wall Street venait à se retrouver propriétaire effective de prêts en déliquescence qu'elle croyait avoir vendu des années plus tôt, à cause de procédures réglementaires bâclées ("shoddily executed"), elle pourrait avoir à faire face à des milliards de dollars de pertes inattendues."

 

 

 

 

"De surcroît, les investisseurs dans les MBS exigeaient certaines assurances quant à la qualité moyenne des créances qu'ils achetaient à travers ces instruments (...) Des allégations ont été faites selon lesquelles les banques pourraient avoir mal décrit la qualité des prêts qu'ils vendaient aux investisseurs. Elles pourraient être contraintes de racheter tous les prêts affectés par ces mauvaises représentations. Parce que des millions de ces prêts sont en défaut ou en liquidation, le résultat serait des pertes très importantes si ce risque n'était pas correctement provisionné".

 

 


Note: le corps du rapport du COP montre clairement que le risque n'est pas correctement provisionné.
 

 

"Pour placer le problème en perspective, une seule action d'investisseurs pourrait obliger Bank Of America a racheter en partie les pertes sur 47 milliards de prêts qui leur ont été vendus"

 

 


Note : cette action, menée par Black Rock, PIMCO, Fannie Mae et la FED de New York, pourrait aboutir à 16 milliards (33%) de remboursements, et au 31 octobre, la somme des pools concernés par des actions similaires se montait à 375 milliards de dollars pour Bank of America.
 

 

"B.of A. a actuellement 230 milliards de fonds propres. Si des actions  (de grande envergure) menées contre B.oA. devaient réussir, la compagnie pourrait subir des dommages incapacitants ( disabling damage) sur son capital réglementaire"

 

 


On ne saurait mieux dire en termes polis que Bank Of America est en danger d'insolvabilité, comme nous le signalions il y a peu.
 

 

"Le département du trésor a affirmé que les problèmes liés au crédit hypothécaire ne représentaient aucun danger pour le système financier, mais à la lumière des incertitudes de ce jour, ces assertions du trésor apparaissent prématurées".

 

 


Je rappelle que c'est l'ancien congrès qui siège encore, le nouveau ne prendra ses fonctions que début janvier 2011. L'actuel Chairman du COP est un démocrate. On ne peut donc pas accuser le COP de régler des comptes avec l'administration Obama.
 

 

"Le trésor devrait expliquer pourquoi il ne voit pas de danger."

 

 


La confiance règne...

 

"Les régulateurs bancaires devraient en outre conduire de nouveaux Stress Tests sur les banques de Wall Street pour déterminer leur capacité à faire face à une crise potentielle".

"Le panel souligne que les prêteurs hypothécaires et les gestionnaires de MBS ne doivent pas entreprendre la moindre saisie-forclusion envers tout propriétaire sans être certains de pouvoir le faire en totale compatibilité avec les lois en vigueur et le respect de leurs engagements contractuels vis à vis des propriétaires"
 

 

 

Le congrès estime utile de rappeler aux banques qu'elles doivent respecter et la loi et leurs contrats. Cela donne la mesure des doutes qu'il nourrit quant à la validité des procédures en cours.

 


"Le système financier américain est dans une situation précaire".

 

 


Bref, tous ceux qui ont jusqu'ici avalé les explications des départements de relation publiques des grandes banques américaines - "Simple problème technique, circulez, il n'y a rien à voir"-  devraient commencer à se poser de sérieuses questions.

Le corps du rapport reprend à peu près toutes les questions que je soulevais dans l'épisode IV, la principale synthèse du Foreclosuregate à ce jour. 

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Lire également :  les précédents articles sur le Foreclosure-gate

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