La commission « TAXE » lave plus blanc
La commission TAXE du Parlement européen fut instituée après l’affaire LuxLeaks qui avait révélé les accord fiscaux de gré à gré du Luxembourg de Monsieur Junker avec plus de 300 multinationales. Elle est actuellement présidée par Monsieur Alain Lamassoure.La mission de Monsieur Lamassoure est de lutter contre les « rulings » afin de ne plus permettre aux Etats d’appliquer d’autres règles fiscales que celles édictées au niveau européen. Les « rulings » sont ces accords entre entreprises et autorités fiscales qui permettent de déterminer la clé de répartition des impôts entre les succursales d’une multinationale. De tels accords peuvent entraîner des déplacements fictifs d’actifs, par exemple des brevets ou des prestations de service, qui sont légaux mais créent de fortes inégalités entre entreprises.
Voici comment Alain Lamassoure justifiait récemment son postulat dans un document interne du Parlement européen: «Contrairement à la fraude, l’optimisation fiscale est légale, mais peut être considérée juridiquement comme illégale dans la mesure où elle constitue un abus de droit. Mais le démontrer en pratique reste difficile pour l’administration fiscale d’un pays lésé» . La tendance, au niveau de la Commission européenne, est d’instituer rapidement un échange automatique des accords de ruling entre les autorités fiscales.
Étendre son autorité sur la Suisse? Pas gagné!
Hier, vendredi, cette commission s’est rendue à Berne afin de rencontrer Monsieur Jacques de Watteville, secrétaire d’Etat aux Questions financières internationales (SFI).Derrière les propos diplomatiques de circonstance, plusieurs sujets qui peuvent fâcher ont été abordés. L’un d’eux est justement la manière de contrôler les « rescrits fiscaux » * , plus connus sous le terme de «rulings» qui ont cours aussi en Suisse. Alain Lamassoure dit attendre de la Suisse qu’elle adopte la règle de l’échange automatique. Economiesuisse lui a cependant fait clairement comprendre que les règles suisses actuelles sont suffisantes et qu’elles ne changeront pas avant qu’un standard international soit approuvé et appliqué aussi hors de l’UE.
En effet, officiellement, la Suisse se dit prête à appliquer les règles internationales et, pour cela, l’accord sur l’échange automatique d’informations fiscales «ordinaires» sera signé mercredi prochain à Bruxelles, même si cette mesure est loin de faire l’unanimité dans la Confédération et ouvre la porte à un vif débat interne qui devra être réglé avant 2018.
Si elle est favorable à davantage de transparence, la Suisse n’est pourtant pas prête à aller jusqu’à l’échange automatique d’informations sur les rulings. Du moins pas sans avoir pu englober dans ce dossier les formes non fiscales de concurrence déloyale, comme les subventions à la création d’emplois, ou l’offre de terrains pour attirer des entreprises suisses en France ou en Allemagne
L’OCDE comme référence
L’OCDE prépare aussi, pour le mois de septembre, une directive allant dans le sens d’une large transparence des rulings. Si elle ne fait pas partie de l’UE, et n’a donc aucune raison de se plier aux diktats des fonctionnaires de l’Empire, la Suisse est bien membre de l’OCDE.C’est la raison pour laquelle Jacques de Watteville a réaffirmé très diplomatiquement hier que «… la Suisse s’alignera sur le standard OCDE, en espérant qu’il ne divergera pas trop de celui de l’UE...»
C’est beau, tout de même, un pays qui décide librement de sa politique fiscale, des normes qu’il applique et des accords qu’il passe avec ses voisins…..
* Eh oui, la Suisse utilise toujours les termes français, une monnaie qui s’appelle « franc » deviendra-t-elle un jour notre vaisseau de survie, comme certains romanciers l’écrivaient déjà il y a quelques années (La République du Mont-Blanc)?