Tour d’horizon des mouvements qui livrent une guerre à l’obligation d’affiliation.
Article initialement publié par: Par Éric Verhaeghe“Quitter la Sécu” est devenu, assez curieusement parce que rien ne l’explique facilement, une idée de plus en plus répandue auprès d’un certain nombre d’assurés. Certes, les méfaits toxiques du RSI encouragent les indépendants à chercher une issue de secours pour échapper au désastre. Mais en dehors de cette visée immédiate, c’est bien le principe même de la liberté d’affiliation qui est de plus en plus revendiqué.
Voici un petit tour d’horizon des mouvements qui livrent une guerre à l’obligation d’affiliation.
La Sécu et Claude Reichman
Historiquement, le combat pour la libération de la protection sociale fut porté par Claude Reichman. Chirurgien-dentiste de son état, Reichman a surtout acquis une notoriété grâce à son Mouvement pour la Libération de la Protection Sociale (MLPS), qui combat activement l’obligation d’affiliation à la Sécurité sociale.Dans la pratique, la stratégie de Reichman repose largement sur des actions individuelles d’assurés qui tentent de faire valoir leur droit à quitter la Sécurité sociale devant les tribunaux auprès desquels ils sont régulièrement condamnés. Le MLPS ne pratique ni l’action de groupe (difficile à réaliser dans ce domaine) ni la saisine des cours européennes. Une certaine opacité règne sur l’effectivité de son action.
Reichman a néanmoins marqué la lutte contre l’affiliation obligatoire à la Sécurité sociale en arguant de la fin de ce monopole du fait du traité de Maastricht.
Le mouvement des libérés contre la Sécu
Dans le sillage de Claude Reichman a pris forme une sorte de collectif de fait appelé le Mouvement des Libérés. Ce regroupement d’assurés engagés dans un processus d’émancipation vis-à-vis de la Sécurité sociale donne des conseils sur la meilleure façon de sortir de la Sécu et publie des témoignages de cotisants qui ont suivi ce chemin.D’une certaine façon, le Mouvement des Libérés a la physionomie d’une coordination syndicale telle que certaines sont apparues dans les années 1990. Plutôt que de s’organiser de façon rigide autour d’une structure hiérarchisée, ce mouvement privilégie le recueil des bonnes volontés et l’action concrète de terrain.
L’un des enjeux du mouvement consiste désormais à faire reconnaître le caractère mutualiste de la Sécurité sociale française, afin de la rattacher à la directive assurances de 1992, affirmant l’application du principe de libre concurrence dans ce secteur.
L’alliance des professions de santé face à la Sécu
Ce combat pour une reconnaissance du statut mutualiste à la Sécurité sociale française est désormais mené parallèlement par un syndicat au sens de la loi de 1884 appelé l’alliance des professions de santé. De création récente, ce mouvement très actif vient notamment de déposer une plainte auprès de l’Union Européenne pour violation de l’article 258 du traité.Cette procédure est inspirée de l’arrêt BKK (2013) de la Cour de Justice de l’Union, qui répond à une question préjudicielle allemande, dont la conclusion est la suivante :
La directive sur les pratiques commerciales déloyales doit être interprétée en ce sens que relève de son champ d’application personnel un organisme de droit public en charge d’une mission d’intérêt général, telle que la gestion d’un régime légal d’assurance maladie.Pour l’APS, cette décision préjudicielle consolide le raisonnement selon lequel la nature mutualiste de la Sécurité sociale française oblige à respecter les principes de libre concurrence et rend impossible le monopole de l’affiliation tel qu’il existe. L’intérêt de l’APS est de joindre à ces contentieux traditionnels une vision plus large de réforme en matière de santé publique qui risque de mordre sur le syndicalisme médical historique.