Le PEAD est issu d’un événement ponctuel et induisant une forte réaction comportementale dans la vie d’une action. Ces incidents sont la conséquence d’une nouvelle information disponible par les opérateurs et les obligeant à réévaluer le juste prix théorique de l’actif. De telles informations peuvent déclencher des rallys de plusieurs mois voire années ou au contraire inverser une précédente tendance. En effet si vous prêtez attention à une action ayant déjà développé une large avancée, vous devriez pouvoir identifier une série de séance sur fort volume après une annonce qui est justement à l’origine de la dérive haussière des prix.
Une anomalies structurelle de marché
En 1968, Ball et Brown ont rendu public pour la 1ère fois le résultat d’une anomalie récurrente constatée sur le marché des actions au cours de ce dernier siècle. Cette dernière consiste en la persistance d’une dérive haussière ou baissière des cours de bourse allant de 1 à 3 mois après l’annonce d’un profit trimestriel respectivement supérieur ou inférieur aux attentes du consensus.
La plupart du temps, lorsque des recherches sur les inefficiences de marché sont publiées, les opérateurs commencent à les exploiter jusqu’à ce que l’anomalie disparaisse complètement. Le symbole le plus représentatif de cette affirmation c’est LTCM qui a explosé en plein vol en augmentant son effet levier progressivement pour conserver ses rendements malgré la disparition graduelle de l’anomalie exploitée (resserrement des spread). On peut dans ce dernier cas parler d’anomalie éphémère et non structurelle.
Chaque trimestre, les entreprises publient leurs résultats, et parmi celles-ci un petit nombre provoque de bonnes ou mauvaises surprises. L’incidence est visible sur l’évolution des cours de bourse dans le sens de la surprise et sur une période d’environ 2 mois. Pourtant si vous demandez à un professeur « académique » de finance comment cela est supposé se produire, il vous répondra que les marchés étant efficients, les prix devraient gapper et s’ajuster instantanément au bon niveau de prix lorsque le bénéfice est annoncé.
Des faits et seulement des faits
La réalité c’est que le marché n’intègre pas immédiatement et totalement l’information contenue dans l’annonce de profit, cette anomalie renvoie littéralement à la cave la théorie de l’efficience des marchés. En effet elle peut être expliquée par la psychologie des opérateurs comme nous l’avons vu plus haut. Mais l’autre gros facteur à l’origine du momentum des prix s’explique par la mécanique d’entrée et de sortie en position des gros fonds. Un fond de pension aura de grosses difficultés à constituer une ligne sur un titre après une annonce de résultat exceptionnel. En effet, ces gros investisseurs ont de gros capitaux à investir, et construire une ligne de 1% sur une gestion de 1 milliard de dollar est tout autre chose que 1% sur 100 millions de dollars. A cause de la taille de leurs ordres, ils sont obligés d’étaler leurs achats sur plusieurs semaines afin d’éviter un envol démesuré des prix dû au relatif manque de liquidité sur le titre. Moins le titre est liquide et possède un faible float et plus l’impact sera prononcé. Plus l’annonce est hors consensus et plus le nombre de gros fonds à s’intéresser au titre sera important.
En somme, le compte rendu de l’étude Ball et Brown explique que la variable « profit » représente le critère le plus important dans l’impact des mouvements boursiers d’une action à court terme et à long terme. Autrement dit, les gros opérateurs qui génèrent 70% de l’activité sur les marchés financiers, se focalisent principalement sur ce facteur pour conforter leur analyse et enclencher le processus d’accumulation ou de liquidation d’une ligne dans leur portefeuille.
La conséquence est qu’à chaque annonce de résultat, l’action d’une entreprise a le potentiel de décaler dans les deux directions pendant 1 à 3 mois s’il y a effet de surprise. Les tests statistiques ont généré de solides retours sur investissement.
Une surprise sur les résultats est la différence entre ce que l’entreprise a publié et ce que les analystes attendaient. Une surprise positive implique une publication bien meilleure que ce qu’attendaient les analystes et inversement pour une surprise négative.
Quelques études Statistiques
Ball & Brown 1968
Voici les différents portefeuilles constitués sur la base d’une surprise sur les bénéfices.
Source : Ball & Brown 1968
En utilisant 3 différents facteurs dans le niveau de surprise, Ball et Brown montrent que l’impact de la surprise lorsqu’elle va de pair avec la tendance de fond, déclenche un trend d’environ 3 mois.
Bernard & Thomas 1989
Voici le résultat du PEAD, aussi appelé « l’effet SUE », mais en nombre de jours après l’annonce :
Source : Bernard & Thomas 1989
Ce graphique issu de l’étude de Bernard et Thomas en 1989 met en avant le momentum sur les cours de bourse qui a été enregistré après l’annonce, jour après jour. Le 1er mois est le plus rémunérateur. La dérive dans le sens de l’annonce est significative pendant une durée de 3 mois.
Effet du PEAD sur les Small, Mid et Large Cap
Cette étude met avant l’importance de l’impact de ces annonces sur les petites capitalisations boursière, trimestre après trimestre.
Source : Bernard & Thomas 1990
Les grosses capitalisations enregistrent des performances bien moins intéressantes.
L’effet de propagation
Il est rare de trouver une surprise sur bénéfice unique et isolée ; ce type de résultats est exceptionnel et peut être expliqué par une acquisition. La plupart du temps une bonne entreprise continue à battre le consensus pendant plusieurs trimestres. Ce phénomène s’explique par le changement des conditions de base du secteur. En effet ces surprises signalent une évolution sur le long terme de l’environnement économique qui est propre à l’entreprise et à son industrie. On peut parler de propagation sectorielle et temporelle. Lorsqu’une dynamique sectorielle se met en marche et qu’un résultat inattendu est publié ; les recherches montrent que la probabilité augmentent de 74%.(source : Zacks) quant au fait que l’entreprise batte à nouveau les attentes à la prochaine annonce.
La saison des résultats “Earning season”
La saison des résultats d’entreprise représente chaque trimestre un potentiel grand virage dans la vie d’une action. C’est le moment ou les nouvelles entreprises de croissance se révèlent aux publics en affichant des résultats exceptionnels. Chaque trimestre les investisseurs trouveront des actions complètement ignorées, inconnues, et occasionnant des surprises pouvant déboucher sur des mouvements de prix explosifs. Nous l’avons vu, c’est comme cela que le marché est structuré par les intervenants.
Sur le marché français, les annonces de chiffre d’affaire sont trimestrielles tandis que les annonces de bénéfice sont la plupart du temps semestrielles. En plus du peu de titres disponibles à la négociation, le manque de dates de publications rend ce marché moins opportun à l'observation de PEAD.
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Cédric Froment
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