Comme en France, le courant nucléaire a été vendu bien au-dessous de ses coûts réels. Les contribuables vont-ils devoir passer à la caisse via leurs impôts et l’augmentation des tarifs ? Comment en est-on arrivé là ?
Un novembre cauchemardesque pour le nucléaire mondial
Très mauvais mois pour le nucléaire. Après que l’IEA (International Energy Agency) tirait la sonnette d’alarme sur les montants nécessaires pour démanteler les centrales atomiques à travers le monde, l’état de quasi faillite d’Areva, c’est le Contrôle fédéral des finances Suisse qui arrive, par hasard, avec un rapport au vitriol, à la veille du débat du Conseil national (chambre Suisse).Un trou de 6 milliards
Fin 2013, le premiers fonds Suisse, consacré à la désaffectation des installations nucléaires, disposait de 1,7 milliard de francs, alors que ses besoins se monteraient à 2,9 milliards de francs, selon une étude officielle commandée par la Confédération et publiée en 2011. Selon l’IEA, il faudrait entre 5 et 10 milliards pour les démanteler ce qui enfonce encore plus le clou.Le second fonds, dédié lui à la gestion des déchets radioactifs, devrait compter sur 8,4 milliards de francs d'ici la mise hors service des centrales nucléaires. Aujourd'hui, seuls 3,6 milliards sont disponibles.
Cette différence doit être financée par des contributions annuelles versées par les propriétaires des centrales, principalement Axpo, Alpiq et les BKW. Or, «si les exploitants ne parviennent pas à satisfaire à leurs obligations financières dans ces deux fonds, la Confédération risque de devoir fournir les fonds manquants».
Organe de contrôle consanguin
Autre grief de l’audit: la gouvernance actuelle des Fonds de désaffectation et de gestion pose aussi problème. Il prévaut un trop grand mélange des responsabilités entre gestions des fonds et haute surveillance. L’actuel directeur de l’Energie Suisse vient d’être écarté de la table tout comme les hauts fonctionnaires du DETEC chargés de la surveillance qui ne siègeront plus à la Commission qui gère les fonds aux côtés des délégués des centrales nucléaires. L'audit relève d’ailleurs que les propriétaires de centrale sont surreprésentés et leur influence trop grande pour ne pas dire unilatérale.Calculs pas assez réalistes
Il y a quelques mois, le Conseil fédéral avait demandé l’augmentation de 30% les versements des cinq centrales nucléaires suisses dès le 1er janvier 2015. Les exploitants avaient crié au scandale. Aujourd’hui, selon l'audit du CDF, ce ne sera pas suffisant.Prix de l'électricité à la hausse?
Deux options sont plausibles:La première est d’allonger la vie des Centrales nucléaires afin de combler le manque. Mais après 40 ans d’exploitation, les opérateurs ont démontré leurs aptitudes à trouver des failles dans le système. Le problème risque simplement d'être remis à demain.
L’autre est de demander aux exploitants de passer à la caisse et de facturer le prix exact du nucléaire à ses clients. La facture va prendre l’ascenseur.
La France, reine du nucléaire, se trouve exactement dans la même situation.
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