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Investir ou trading ?

Et si le rachat d'actions par les entreprises détruisait de la valeur au lieu d'en créer pour les actionnaires

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Les bénéfices des sociétés sont encore remarquables, malgré le marché baissier en cours. Les entreprises cotées ont enregistré près de 2 trillions $ dans leurs bilans.

Corporate America a les moyens de générer du capital et d'investir dans de nouvelles technologies ou des innovations afin de stimuler sa croissance. Mais elle a préféré allouer plus d’argent aux rachats d’actions. Selon Reuters, ce sont au total environ 1 900 entreprises américaines qui auraient tranché en faveur de cette politique depuis 2010. Le retour sur investissement pour les actionnaires, en tenant compte des intérêts composés, s’est évalué sur la même période à 113% des dépenses en capital.

De nombreux spécialistes considèrent les rachats comme une bonne chose. En plus d'être un moyen pour redistribuer de l'argent aux actionnaires, ils réduisent le nombre total d'actions en circulation.

Ainsi, généralement le bénéfice par action augmente mécaniquement. Ce type de rachat d’actions choie les investisseurs, mais il se fait de plus en plus rare.

Aujourd’hui, la plupart des rachats sont effectués pour des raisons qui n’ont rien à voir avec le but de maximiser la valeur pour les actionnaires. Les dirigeants misent souvent sur des stratégies court terme, pressions diverses, plans de rémunérations de grands cadres. La conséquence, l’entreprise rachète une action surévaluée et le capital est mal géré. Ou tout du moins, il aurait beaucoup mieux être utilisé ailleurs !


En théorie, les sociétés devraient avoir un net avantage sur le reste du marché lors de l'achat de leurs parts. Les dirigeants connaissent leur secteur, les défis auxquels la société est confrontée, et leurs plans stratégiques mieux que quiconque, ce qui devrait à priori leur permettre d'acheter leur titre quand il est bon marché et non surévalué.

Mais la réalité est tout autre. Les statistiques montrent que les entreprises rachètent plus d'actions en période d'expansion et les vendent quand le marché stagne ou s’inscrit dans une tendance baissière. Ce comportement est similaire à celui d’un investisseur paniqué essuyant de mauvaises performances.

GE PoorBuybacks DestroyValue

A chaque fois, GE achète ses propres actions aux pires des moments

Sur le graphique, on peut constater que GE a racheté une incroyable quantité d’actions d’une valeur totale avoisinant les 12.3 $ en 2007, cela juste avant le grand plongeon des marchés. Ensuite, vient 2009. La société a vendu, à l’aube d’un important haussier, pas moins de 600 millions $ de ses propres actions. Tout au long de la dernière décennie, on peut déterminer une forte corrélation  entre la value des actions GE, le cash-flow, et la quantité de rachat d’actions allouée par l’entreprise.

Dans l'ensemble, GE a racheté près de 44 milliards $ de ses propres actions (17% de sa capitalisation boursière) depuis 10 ans. Pendant la même période, la value de son titre a chuté de 15%. En utilisant inefficacement du capital précieux pour racheter des actions à des prix surévalués, la société à réduit la valeur pour les actionnaires drastiquement.

Le piège de la surévaluation et la rémunération des dirigeants

Les actionnaires positionnés à long terme sur GE ont souffert en partie parce que les cadres de l'entreprise répondent aux pressions et à une vision court terme. Lorsque la capitalisation d’une société devient surcotée, ses dirigeants sont enclins de prendre des mesures pour tenter de justifier ce prix cher.

Une des initiatives les plus simples est de faire gonfler artificiellement l’EPS (bénéfice par action) grâce à des rachats d'actions. L’EPS de GE, sur les 15 à 16 derniers trimestres, a sans cesse été révisé à la hausse.

Il faut souligner aussi que de nombreuses entreprises multiplient les plans de rémunérations à l’adresse des dirigeants. Ce qui incite une récurrence excessive des phénomènes de rachat d’actions.Les buy back offrent aussi parfois des primes aux grands cadres, car ils retournent de l’argent aux actionnaires. Chez GE, en 2014, les dirigeants avaient pour objectif d’atteindre au moins 10 milliards $ avec les dividendes et les rachats d’actions, afin de pouvoir espérer toucher leur pleine prime.

D'autres entreprises incitent les rachats d'actions en soulignant qu’ils auront peu d’impact sur la value. Par exemple, les dirigeants de Cisco (CSCO) sont rémunérés en partie sur leur capacité à faire croître les bénéfices ajustés, ils peuvent jouer le BPA et le cash-flow. Ce mot «ajusté» est important. Cela signifie que les dirigeants peuvent payer les employés (et eux-mêmes) avec actions au lieu de l’argent disponible, puis de racheter des actions pour compenser l’excédant de cash-flow.

En 2015, CSCO a racheté 155 millions d'actions, mais après avoir déduit la rémunération en actions des employés, les titres en circulation s’établissaient à un nombre de 38 millions. Tous ces rachats sont simplement comptables ruse que les dirigeants utilisent pour augmenter leurs propres primes.


Les rachats ont donc tendance à détruire de la valeur pour les actionnaires, puisqu’ils s’appuient sur le fait d’acheter un actif surévalué

Toutefois, il y a un autre point à prendre en considération. L’entreprise qui mise trop sur le rachat d’actions gâche également des occasions d’investir dans son développement, sa croissance ou ses processus d’innovation.

Par exemple, AT & T (T) a racheté près de 50 milliards $ en actions sur les 10 dernières années. Cet argent aurait pu être utilisé pour améliorer la qualité de son réseau sans fil et de rattraper Verizon (VZ). Tous ces rachats ont pénalisé AT & T qui a enregistré des performances médiocres par rapport à celles du marché propre à son secteur d’activité. Son concurrent VZ, n’a pas procédé à beaucoup de buy back pendant 5 à 10 ans.

Contrairement, à ce qu’un grand nombre de personnes pense, les rachats d’actions sont souvent une mauvaise nouvelle. Du moins, il faut s’en méfier car en réalité, ils représentent un demi-aveu d'échec. Une entreprise qui rachète ses actions peut envoyer comme signal au marché qu'elle manque et gaspille des opportunités d’investissement, pénalisant ainsi son développement.

Quelles sont les conditions d’un buy back idéal ?

1. L’action doit être négociée à un PEBV inférieur à 1, ce qui signifie la société rachète des actions non surévaluées.

2. L’entreprise doit disposer du free cash flow (FCF) nécessaire pour pouvoir supporter le rachat sans mettre en péril l'avenir financier de la société, et de réduire ainsi à néant des possibilités d'investissement vitales ou intéressantes.

3. La société doit veiller à être peu endettée avant de réaliser une opération de buy back.

Une entreprise qui répond à ces trois critères est Oracle (ORCL). En 2015, ORCL a racheté 8,1 milliards $ en actions (5% de sa capitalisation boursière), ce qui réduit les actions en circulation de près de 120 millions. Les actions de ORCL se négocient actuellement à un PEBV de 0,9, ce qui signifie que les actions sont sous évaluées de 10% au moment du rachat.

Avec 50 milliards $ en excédent de trésorerie au bilan et 9 milliards $ de cash-flow annuel, ORCL a les  liquidités nécessaires pour soutenir son programme de rachat d'actions.

Dans ce cas, non seulement ces rachats servent les intérêts des actionnaires, mais ils sont aussi bon pour l'économie d’une manière globale. Quand une entreprise avec un excès de liquidités et peu de possibilités d'investissement rachète ses actions, il met cet argent en retour sur le marché, pour les investisseurs individuels, et pour les sociétés qui ont besoin de capitaux.

En rachetant des milliards de dollars d’actions l'année dernière, ORCL tire les bénéfices de son opération sans compromettre son potentiel d’investissement dans la croissance future.

Malheureusement, la majorité des entreprises qui rachètent de nouveau leurs actions aujourd'hui ne sont pas dans la même situation. Elles souffrent souvent d’un mauvais bilan financier et affichent un manque de liquidités évident.

William Finck

Pour aller plus loin dans le suivi de la distribution des dividendes, Loïc Abadie a lancé un portefeuille Rendement et dividendes sur le marché français. Les infos sont ici.
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